Le parcours de Meryl, prof doc stagiaire

Passionnée d’Histoire de l’Art, vous avez présenté un Master Recherche dans la spécialité des grandes mutations culturelles et artistiques de l’antiquité à nos jours. Quels étaient le sujet choisi, la problématique retenue et les grandes conclusions de votre travail ?

Dans le cadre de mon master en histoire, histoire de l’art j’ai étudié l’ancienne abbatiale Saint-Paul de Besançon sous la direction de Philippe Plagnieux et de Morana Causevic-Bully. Il s’agit d’une étude architecturale et d’archéologie du bâti d’un monument datant du XIVe siècle classé au titre des monuments historiques. Cet édifice est, avec la cathédrale Saint-Jean, le dernier encore en élévation de la période dite du « gothique comtois » à Besançon.
Le questionnement portait sur la chronologie architecturale afin de comprendre l’articulation entre les différentes campagnes de travaux qui ont eu lieu, mais aussi la façon dont le parti gothique se manifeste à travers le monument. Cette étude a permis de réaliser un phasage révélant les différents états de construction de l’édifice ainsi que les différents styles architecturaux, encrant l’ancienne abbatiale comme monument phare du gothique comtois.
Enfin, ce mémoire a également révélé le besoin d’un travail de recherche plus important qui pourrait être réalisé dans le cadre d’une thèse, afin de comprendre le monument dans son ensemble.

Entre 2012 et 2015, vous avez multiplié des expériences professionnelles liées au patrimoine et à la médiation. Pouvez-vous nous dire en quoi elles ont consisté et ce que chacune d’elle vous a apporté ?

Durant mes études j’ai effectivement travaillé au musée Georges-Garret de Vesoul en tant qu’agent du patrimoine. Cette expérience alliant patrimoine et médiation culturelle m’a beaucoup apporté, notamment dans la construction de mon rapport avec le public, qu’il soit adulte, jeune, ou scolaire. La médiation culturelle est un ensemble d’actions à la fois éducatives, ludiques et citoyennes, que j’ai pu expérimenter avec beaucoup de plaisir. Aujourd’hui, en ma qualité de professeure documentaliste stagiaire je retrouve de nombreuses compétences communes aux deux métiers, l’enseignant étant avant tout un médiateur des savoirs.
J’ai également pu, durant ma formation en histoire, histoire de l’art, obtenir un contrat étudiant avec l’université afin de travailler en tant que tutrice. Il s’agissait principalement de tutorat de recherche en direction des étudiants de licence, autour de la méthodologie de recherche à appliquer aux projets de mémoire. Il s’agit finalement des mêmes connaissances et compétences info-documentaires que l’on exige aujourd’hui des élèves à la fin de leur scolarité et qui constituent le domaine d’expertise des professeurs documentalistes.

Assistante d’éducation dans un lycée à Besançon, vous vous voyez confier des responsabilités pédagogiques à l’internat. Pouvez-vous nous en dire plus ? Quels liens faites-vous entre cette mission et votre désir de préparer le CAPES de documentation ?

Travailler en tant qu’AED durant ces années de formation s’est révélé être une véritable bouffée d’air frais pour moi. En effet le travail de recherche exige solitude et abnégation. Être AED m’a révélé deux choses : à quel point il était indispensable pour moi d’évoluer au sein d’un milieu professionnel qui travaille en équipe, mais aussi l’importance d’apporter savoirs et soutien aux élèves, qui à leur tour nous permettent de nous construire en tant que pédagogue.
Dans le cadre de l’internat, le contact privilégié avec les élèves mais aussi le travail au sein d’une équipe, qu’est celle de la vie scolaire, et plus largement de l’ensemble de la communauté éducative, m’ont permis de comprendre les rouages d’un établissement scolaire, mais surtout quelles étaient mes réelles motivations professionnelles. Plus les années passaient et plus je ressentais le besoin de m’investir et de passer à un autre statut au sein de l’établissement, celui d’enseignant. Le CAPES de documentation s’est imposé à moi, car les savoirs info-documentaires sont pour moi au carrefour de toutes les disciplines.

Lauréate de la session 2018 du CAPES, vous vous trouvez affectée dans un collège dans les environs de Besançon. Comment vous êtes-vous sentie accueillie par les personnels ? Quelles sont vos premières impressions après un mois et demi d’exercice dans l’établissement ?

N’ayant jamais eu d’expérience dans un collège rural, j’étais impatiente de faire mes débuts. Cette année l’équipe a été renouvelée de façon importante (le chef d’établissement, certains enseignants, etc.) ce qui a participé au fait que je me sente à l’aise et bien accueillie. L’équipe est dynamique et très motivée, j’ai pu trouver des collègues avec qui échanger sur des éventuels projets pédagogiques dès les premières semaines.
Durant ce premier mois je me suis sentie débordante d’énergie avec l’envie de soulever des montagnes ! J’ai cependant rapidement compris que des méthodes rigoureuses de travail devaient être appliquées pour ne pas se perdre dans la diversité des missions de notre métier. J’essaye d’investir cette énergie de façon productive en fonction des priorités que je suis en train de fixer avec mes collègues, mes tuteurs et mon chef d’établissement. Néanmoins, cette année j’ai très envie d’axer mon travail sur la pédagogie, l’expérimentation et le travail en collaboration avec les collègues.

Vous venez de découvrir une activité de sport collectif que vous pratiquez avec plaisir. Quel est ce sport et pourquoi l’avez-vous choisi ? Quelles sont les valeurs qu’il véhicule ?

Étant issue d’un milieu très modeste et étant très concentrée sur mes études et la préparation au concours, je n’ai jamais pu m’investir dans une activité de sport collectif comme je l’aurais désiré. Depuis la rentrée et grâce à mon statut de professeure stagiaire j’ai donc décidé de me faire plaisir et de me lancer un nouveau défi, celui d’apprendre et de découvrir un nouveau sport qui est le rugby. Je me suis inscrite au club local, l’olympique bisontin qui a une équipe féminine dynamique et qui joue à un bon niveau. J’ai choisi ce sport car c’est un sport exigeant physiquement et mentalement où on ne peut gagner que si l’on avance ensemble.
Par ailleurs j’adhère totalement aux valeurs qui y sont véhiculées, telles que le respect de l’autre, le courage, la solidarité, mais aussi l’intelligence tactique, la convivialité et bien évidemment, l’esprit d’équipe. J’ai également pu remarquer que l’humilité et le goût de l’effort étaient des qualités indispensables que chaque membre de l’équipe possède.
Je constate à quel point il est intéressant de se retrouver en position d’apprenante, contrastant ainsi avec mes débuts de carrière en tant qu’enseignante. J’apprends de joueuses beaucoup plus jeunes que moi, faisant preuve d’une grande gentillesse et de beaucoup de patience à mon égard.

Vous débutez une carrière qui s’annonce prometteuse et diversifiée. Comment vous projetez-vous dans 10 ans ? Quelles perspectives envisagez-vous ?

J’ai toujours avancé avec un objectif précis à atteindre. Aujourd’hui, étant dans une période de transition (étudiant à enseignant), je cherche avant tout à devenir une professeure documentaliste chevronnée. Néanmoins, je n’imagine pas ma carrière professionnelle sans perspective d’évolution, c’est un des nombreux aspects qui m’a plu dans le fait d’intégrer l’éducation nationale.
En effet, les diversifications professionnelles dans l’institution sont nombreuses. Ainsi dans un futur proche j’ai pour projet de participer activement à la formation des étudiants au sein de l’ESPÉ mais également à celle des enseignants.
J’aime assez l’idée de pouvoir participer à des journées autour d’un thème précis et d’échanger avec des collègues autour de nos pratiques. Les pratiques pédagogiques innovantes intégrant notamment les outils numériques me plaisent beaucoup et sont, je pense, des atouts qui sont souvent exploités de façon inappropriée.
Pour aller plus loin en me projetant dans quelques années, j’aimerais beaucoup participer au jury du CAPES et pourquoi pas tenter d’autres concours tels que celui d’inspecteur académique ou celui de chef d’établissement.

Meryl Laurent, professeure documentaliste stagiaire dans l’Académie de Besançon

Le cheminement de Caroline, CPE

Lors de la préparation du MASTER MEEF, sur quel domaine a porté votre mémoire ? Quelles grandes conclusions en avez-vous tirées ?

« En quoi les pratiques du Conseiller Principal d’Education au sein de l’instance du Conseil de la Vie Collégienne en éducation à la citoyenneté des élèves contribuent au déploiement de la démocratie scolaire ? » était la question de départ de mon mémoire de recherche.

Essais de la pédagogie institutionnelle de René Laffitte trouve une résonance particulière avec le sujet. Il y a 3 caractéristiques communes entre le courant et les mots-clés de la problématique :

  • « des activités qui accrochent le désir » car les CPE engagés dans le CVC (Conseil de Vie Collégienne) et la citoyenneté y croient, sont motivés.
  • « Des institutions variées » : diversité des établissements eux même et diversités des CVC (modalités élections des membres, thèmes des projets…)
  • et la dernière caractéristique « institution instituante, le conseil, qui permet de verbaliser les vécus divers des situations et de modifier ces situations qui influeront à leur tour sur les comportements, de faire bouger les choses sans que tout s’écroule »

En conclusion, j’émets l’hypothèse que si l’instance CVC est considérée en amont par le CPE et la communauté éducative comme une « institution instituante » au sens de René Laffitte, où les trois champs de réflexion et de pratique de l’éducation à la citoyenneté : droits et devoirs/vivre ensemble/démocratie sont mis en œuvre, alors le déploiement d’une démocratie collégienne serait réelle et permettrait de pallier à la diversité des contextes, surcharge du quotidien, conceptions protéiformes de la citoyenneté…. À vérifier par la suite.

Vous semblez attachée à la dimension pédagogique du CPE. Dans quel sens peut-on dire que le CPE est un pédagogue ?

La dimension pédagogique du CPE, de l’ancien CE ou Surgé était déjà présente, peut être de façon moins officielle, plus enfouie… les professionnels éducatifs n’ont pas attendu d’avoir des convictions et pratiques pédagogiques. Avant de passer par les premières formations collectives des délégués, par les séances de formation au vivre ensemble en vie de classe, le dispositif devoirs faits… la dimension pédagogique du CPE s’exprime dans une situation quotidienne. Par exemple, le CPE reçoit un élève exclu de cours. L’élève arrive en colère dans le bureau et a un langage verbal aux résonances vulgaires… Au delà de la mission qui est d’apaiser la situation sur le moment, travailler la reconnaissance des torts, la remise en question… En tant que CPE , à mon petit niveau, je vais aussi reprendre l’élève sur les mots qu’il emploie, parler un peu de français sans m’en rendre compte, aborder sa façon de parler, travailler son argumentation, son analyse… Tout cela pour dire, que la dimension pédagogique du CPE est partout et au même titre que la dimension éducative de l’enseignant est aussi présente. Sans nous en rendre compte bien souvent, nous sommes dans des situations pédagogiques et éducatives à la fois.

Diriez-vous que vos expériences d’assistante d’éducation ont confirmé votre motivation pour devenir CPE ? Dans quelle mesure ?

Bien sûr, mon expérience d’assistante d’éducation a complètement confirmé mon ambition. Je dirais que c’est une histoire « humaine », faite de rencontres. Je dirais que c’est l’intérêt que je portais pour la vie des élèves qui a été tout de suite le principal leitmotiv. Les tâches n’étaient pas toujours glorieuses mais ce n’était pas grave parce que je savais que c’était important pour l’élève. En second lieu : le climat entre tous les personnels y était pour quelque chose. Une équipe ouverte et en soutien de la vie scolaire lorsqu’elle en avait besoin, une amicale du personnel hyper active…. Enfin, j’ai été un peu moins de trois ans assistante d’éducation. Pendant ce temps, j’ai côtoyé 6 CPE. Si le turn-over des chefs de service avait un impact négatif pour la stabilité, ça a eu le mérite de me permettre d’observer différentes manières de faire, d’être ; ce qui m’a permis de « piocher » chez les uns et les autres.

Si vous deviez identifier les points forts de votre année de stage en 3 mots-clés, quels seraient-ils ? Pourquoi sont-ils si révélateurs selon vous ?

Je distingue les points-forts en mots-clés mais aussi en terme de périodes :

  • la première période de l’année entre la pré-rentrée et les Vacances de la Toussaint : temps de diagnostic de terrain en tant que Fonctionnaire stagiaire et d’affirmation du changement de statut d’AED à CPE. L’enjeu était de me servir de mon expérience qui était certes un atout, tout en marquant une rupture rapidement car j’étais attendue sur ce changement. Ce sont les premières réflexions sur le « moi professionnel », qui suis-je, avec quelles valeurs… Grâce aux échanges avec les tuteurs ESPE et de terrain, le Chef d’établissement
  • le deuxième temps fort se déroule tout au long de l’année à mon sens. C’est le processus d’apprendre à connaître ses faiblesses et de les travailler. Les miennes sont de ne pas trop savoir dire non aux collègues, une tendance à faire à la place de l’autre ce que je devrais simplement conseiller de faire, ne pas assez me protéger, avoir du mal à partir à l’heure, manquer de confiance en moi, apprendre à me sentir légitime à ma place. C’est la poursuite de la réflexion sur le « moi professionnel ».
  • Enfin, la fin d’année scolaire avec l’inspection pour la titularisation et le temps des vœux de mutation. Il faut prendre l’inspection comme le moment où on vient voir ce que j’ai accompli, c’est un espace de reconnaissance. Enfin, il a fallu prendre la décision entre : j’ai une possibilité de rester dans le même établissement, puisqu’un poste de CPE titulaire est au mouvement, ou couper le cordon. La première possibilité ne m’aurait rendue aucunement malheureuse mais, j’ai écouté ma soif de découvrir un autre établissement, d’autres problématiques… Pour mieux grandir professionnellement, je pense m’émanciper pour mieux m’affirmer.

 

Quels projets pédagogiques en tête dans ce nouvel établissement ? Comment avez-vous défini vos priorités d’action ?

Depuis 1 mois, je suis CPE dans un Lycée Professionnel des métiers du bâtiment et de l’hôtellerie, restauration. Je suis heureuse de développer mes connaissances et compétences en matière de lutte contre le décrochage scolaire, sur l’orientation des élèves, dans le service de l’internat et ce sont mes priorités d’actions. La gestion du quotidien c’est la priorité, il ne faut pas se leurrer, pour autant, l’éducation à la citoyenneté des élèves fait partie aussi de nos missions fondamentales. Actuellement, c’est le temps des élections au CVL. Le projet pédagogique à venir cette année scolaire ? L’idée viendra avant tout des élèves et de leurs envies. Le CVL c’est leur instance, et non la boite à projets du CPE. Je vous confie une toute première idée qui vient des élèves candidats : décorer les murs du Lycée qui leur semblent bien tristes. Ça ne parait pas extraordinaire comme cela, mais en développant cette idée, ce projet permettrait de faire en sorte, que les élèves se sentent un peu mieux dans leur établissement, que ça leur donne un peu plus envie d’y venir et d’y rester. L’idée venant des élèves, leur participation active à cet éventuel projet au sein ferait que le processus démocratique en route serve les causes premières de l’établissement : le climat scolaire, la lutte contre le décrochage.

C’est une belle carrière qui s’ouvre pour vous… Vous vous voyez où et dans quel peau professionnelle en 2033 ?

En 2033, je serais toujours dans l’Académie d’Amiens ou pas. Avant de penser à 2033 d’abord, je veux asseoir mon expérience professionnelle en tant que CPE tout simplement. Je débute dans ma carrière et il faut rester humble. Si j’ai passé le concours de CPE, c’est parce que je voulais être CPE et veux continuer à l’être. Ensuite, un jour plus ou moins proche, je serais peut être frustrée d’être CPE « tout court ». Si je dois évoluer, je pense à poursuivre mon mémoire de recherche au-delà du Master si le sujet intéresse d’autres personnes. Le plus grand intérêt de la recherche est qu’elle serve l’institution. La recherche-action serait une hypothèse plausible. Transformer la première enquête exploratoire qualitative en la faisant évoluer vers une recherche quantitative aussi, pour tenter de répondre à mon hypothèse, vérifier ma conclusion actuelle me boosterait oui ! À court terme et pour m’aider à cheminer par exemples, cela me brancherait carrément d’être de nouveau dans le circuit du concours CPE, mais de l’autre côté de la barrière, en étant jury, ou encore construire une séance de formation par exemple sur thème de « la démocratie scolaire et ses espaces de possibilités » ou « l’entrée dans le métier, l’analyse de pratiques »pour les étudiants de l’ESPE, les fonctionnaires stagiaires. Ce serait aussi un beau défi mais là encore on ne s’improvise pas formateur qui veut, ça s’apprend…

Caroline Letot, CPE dans l’Académie d’Amiens

Le parcours de Lisa, CPE stagiaire

Quels liens voyez-vous entre votre propre scolarité et votre désir de devenir CPE ? Quels souvenirs avez-vous des CPE rencontrés dans votre parcours d’élève ?

Durant le collège, j’étais une élève ayant de grandes difficultés scolaires. Je m’opposais complètement à l’École, aussi bien dans mon attitude qu’au niveau de mon travail scolaire. J’ai redoublé ma troisième et je suis partie en BEP carrières sanitaires et sociales. Mais je n’étais pas plus épanouie. C’est lors de cette année en BEP que j’ai rencontré une CPE qui a cru en mes capacités et m’a aidée à rejoindre un cursus ordinaire, en seconde. Je suis intimement convaincue que mon désir de devenir CPE provient de cette rencontre et de mon passé scolaire plutôt chaotique. Aujourd’hui, j’ai le désir d’aider les élèves éprouvant de grandes difficultés à l’École, subissant leur orientation, à l’image de cette CPE qui m’a accompagnée dans mon processus de réorientation.

Titulaire d’une licence SLIC, vous avez approfondi les problématiques relatives à la transmission de l’information et à la communication. Dans quelle mesure les connaissances acquises à ce moment-là viennent-elles percuter l’exercice du métier de CPE ?

La communication, dans le métier de CPE, est primordiale. Ma licence en sciences du langage, information et communication m’a appris à comprendre la communication explicite mais également implicite. À travers certains mots, certaines phrases, certains gestes, certains regards, se cachent des émotions qui doivent être pris en compte.
De prime abord, il serait difficile d’allier cette licence au master que j’ai acquis ensuite (master encadrement éducatif), mais finalement, cela va de pair. La communication fonde le métier de CPE et je suis heureuse, aujourd’hui, d’avoir pu apprendre à comprendre ce qu’est la communication et les sciences du langage. Cela me permet de choisir mes mots lors des entretiens avec les élèves et de comprendre l’implicite, ce qu’ils n’arrivent pas à dire, à formuler…

Attachée à la notion d’accompagnement, vous vous êtes investie dans des métiers d’aide à la personne. Quels enseignements avez-vous retiré de cet engagement professionnel ? En tant que personne ? En tant que CPE ?

En effet, durant les vacances scolaires, j’ai travaillé avec des personnes âgées et/ou en situation de handicap. Ces expériences m’ont permis de développer une grande empathie, une capacité d’écoute et d’accompagnement. Ces qualités me paraissent primordiales et importantes dans le métier de CPE, mais également personnellement, au quotidien.

Ces expériences m’ont aussi appris que la solidarité et la fraternité sont des principes fondamentaux de notre société. De nombreuses personnes vivent seules, sans aucune compagnie. Écouter notre prochain, tendre la main, permet souvent de briser certains quotidiens difficiles. Ces principes doivent être enseignés aux élèves et le métier de CPE le permet.

Durant votre cursus universitaire, vous avez été recrutée comme assistante d’éducation dans plusieurs lycées de Besançon. En quoi ces expériences sont venues confirmer votre projet de devenir personnel d’éducation ? Quel regard portez-vous sur le fonctionnement de l’internat et sur ses enjeux pédagogiques et éducatifs ?

Être assistant d’éducation m’a permis de connaître véritablement le métier de CPE. Petit à petit, ce métier s’est imposé à moi : c’était lui et pas un autre. J’avais envie de pouvoir, moi aussi, faire ce métier qui se situe au plus près des élèves et des familles, d’évoluer au sein de la communauté éducative et, surtout, d’être force de propositions pour accompagner au mieux les jeunes.

Selon moi, l’internat est un lieu alliant éducation et pédagogie. C’est dans ce lieu-même que les adultes peuvent permettre aux élèves de travailler en toute sérénité, leur proposer des activités qu’ils ne pourraient pas forcément faire chez eux. C’est également un lieu permettant aux élèves de partager, de travailler ensemble, de se construire, d’apprendre à vivre en communauté… Ce lieu incarne les valeurs de la république et permet aux élèves de pouvoir s’investir dans une citoyenneté participative, grâce aux élections des délégués par exemple.

Inscrite à l’ESPE de Franche-Comté en Master MEEF, l’objet de votre mémoire portait sur les interactions verbales et para-verbales entre les CPE et les élèves. Pouvez-vous nous faire partager les grandes conclusions de votre recherche ?

Grâce à ce mémoire, alliant les connaissances acquises lors de ma licence et mon master, je me suis principalement intéressée aux « parlers-jeune » et aux malentendus qu’ils peuvent générer entre les adultes (ici les CPE) et les élèves. J’ai remarqué que ces malentendus étaient omniprésents dans les divers entretiens. La portée des mots, leur sens, n’est pas le même pour le jeune adolescent et l’adulte.

J’ai également remarqué que le statut « élève-adulte », pouvait engendrer un certain repli de la part des élèves, pouvant se fermer au dialogue.

Enfin, et surtout, je me suis intéressée au dialogue bienveillant et aux répercussions que celui-ci peut avoir sur la communication CPE-élève. Ce dialogue, dans tous les entretiens réalisés, a permis de créer une ambiance propice à la conversation, à l’échange, et à la confiance réciproque.

Lauréate du concours externe CPE 2018, vous venez d’être nommée dans un lycée professionnel du bâtiment. Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous en ce début d’année ? Quels sont vos objectifs 2019 ?

Je suis plutôt positive concernant ce début d’année. Petit à petit, je trouve ma place au sein de l’établissement et prends mes marques. J’ai été mutée dans un petit établissement, avec un effectif plutôt réduit, ce qui n’est absolument pas pour me déplaire.

Cette année, j’aimerais principalement apprendre sur le métier, sur les relations humaines au sein d’un établissement et adopter certains réflexes. J’ai envie de me préparer au mieux, pour être à l’aise l’année prochaine, si je suis titularisée.

Enfin, on ne pourrait vous définir objectivement sans parler de la place du sport dans votre vie. Quelle est votre activité préférée et en quoi vous ressource-t-elle ? Envisagez-vous des « ponts » entre cette passion et votre métier de CPE ? Sous quelles formes ?

Je pratique le sport depuis plusieurs années, particulièrement la course en haute montagne (trail). Cette activité me permet de m’évader et de « recharger les batteries » pour pouvoir affronter les tracas de la vie. C’est une vrai bouffée d’air frais.

Je pense qu’il est possible d’envisager des liens entre cette passion et mon métier, notamment à travers un travail collaboratif avec les professeurs d’EPS. Le sport est également un moyen de transmettre des valeurs fondamentales dans l’éducation des élèves : solidarité, persévérance, dépassement de soi… La semaine du « sport scolaire » peut être un moyen de réunir adultes et élèves autour de ces différentes valeurs, quelque soit le sport pratiqué.

Lisa Girard, CPE stagiaire dans l’académie de Besançon

Lisez aussi « Un conseil de vie collégienne en REP, une CPE raconte… » par Lisa Girard sur notre blog École de demain

Le parcours d’Arnaud, autiste Asperger élève de terminale STMG

La maman d’Arnaud, jeune autiste de 17 ans actuellement en terminale STMG, nous raconte son parcours scolaire. Une inclusion qui ne relevait pas de l’évidence mais qui s’est révélée tout à fait réalisable et profitable malgré les nombreuses réticences et obstacles rencontrés…

À chaque rentrée, c’est la même chose : on parle des réformes, des effectifs, et aussi, parfois, de l’inclusion scolaire des élèves porteurs de handicap. Une inclusion qui ne coule pas encore de source, treize ans après la loi handicap, notamment du fait du manque d’accompagnants pour ces enfants et adolescents à besoins particuliers.

Pourtant, l’inclusion, ça peut marcher même si c’est compliqué, même si ça demande des efforts. Ça a marché pour mon fils Arnaud, 17 ans, atteint du syndrome d’Asperger, une forme d’autisme sans retard intellectuel.

Arnaud vient de faire son entrée en terminale STMG dans le lycée de secteur. Il part avec un bon matelas de 34 points d’avance pour le bac, après les épreuves anticipées de première pour lesquelles il a bénéficié d’un tiers temps et de la présence d’un AESH pour reformulation des consignes. Il n’a jamais redoublé, n’a jamais eu d’heure de colle ou de sanction, n’a jamais eu un seul retard. Et pourtant, tout n’a pas été simple et il a fallu sans cesse qu’il fasse ses preuves, année après année. Et l’école, il a bien failli ne jamais la connaître…

En maternelle, c’était la catastrophe : il ne restait pas en place, se levait pendant la classe pour sortir et restait en marge de ses camarades. Il refusait de suivre la moindre consigne. Ses cahiers restaient désespérément vides. Pour l’entrée en CP, nous avons constitué un dossier MDPH pour obtenir une AVS. Première difficulté pour nous : encaisser le « H » de l’acronyme, ce H qui veut dire handicapé…

C’est pendant les années de maternelle que nous avons débuté une prise en charge en CMPP, qui allait durer plusieurs années et s’avérer catastrophique, à l’image de cette première séance où le psychiatre nous a abruptement annoncé que notre fils serait incapable de suivre une scolarité ordinaire et que sa place était en IME (Institut Médico Educatif).

Nous avons été très chanceux car dès l’entrée en CP, Arnaud a bénéficié de l’aide de deux AVS, qui se relayaient au cours de la semaine, sur 18 heures. L’un comme l’autre étaient pleins de bonne volonté, mais sans formation, ils en étaient réduits à « naviguer à vue ».

Arnaud a aussi été suivi par un enseignant rééducateur dans le cadre du RASED1 pendant quelques séances.

L’AVS a été reconduite d’année en année, ce qui a permis à Arnaud de faire de très gros progrès sur le plan comportemental et scolaire. Le rôle de l’AVS consistait principalement à le rassurer et à reformuler certaines consignes trop abstraites.

La bienveillance des enseignants de l’école a par ailleurs joué un grand rôle dans cette évolution positive : ils ont souvent été désarmés, mais ils ont su trouver les mots et l’approche pédagogique pour lui permettre d’évoluer à son rythme, en tenant compte au maximum de ses particularités. Je leur en serai éternellement reconnaissante.

À l’école, chaque année a été rythmée par les réunions de l’équipe de suivi, une véritable épreuve pour nous : à chaque fois, on nous disait que si, jusqu’à présent, il avait réussi à s’en sortir à force de persévérance et de volonté, il en irait autrement l’année suivante, où de nouvelles compétences, plus compliquées, allaient être mobilisées. L’impression d’être constamment en sursis, alors pourtant qu’il ne déméritait pas.

Au moment de l’entrée au collège, un bilan réalisé dans un hôpital psychiatrique bien connu a conclu à la nécessité d’une prise en charge psychanalytique au long cours et à une orientation en hôpital de jour. Je dois préciser qu’à cette époque, alors qu’Arnaud avait 10 ans, le diagnostic n’était toujours pas posé par le CMPP, pour ne pas, nous disait-on, « figer les choses ».

Nous avons radicalement changé de prise en charge pour nous orienter vers les thérapies cognitivo-comportementales et refusé cette orientation en hôpital de jour. Nous avons opté pour le collège de secteur. Un choix qui s’est révélé payant, puisqu’il y a poursuivi une scolarité normale, en se situant toujours dans la moyenne de sa classe, et sans autre aménagement que la présence d’une AVS, 18 heures par semaine, puis 12 heures. On nous avait dit qu’il serait perdu dans un grand collège : il s’y est pourtant senti comme un poisson dans l’eau, mettant ses facultés de mémorisation au service de ses camarades pour leur indiquer leurs salles de cours et leurs emplois du temps !

Chaque année, j’ai conçu et distribué à l’équipe enseignante un petit fascicule de quatre pages expliquant simplement ce qu’est le syndrome d’Asperger et quelles en sont les manifestations chez Arnaud. Tous les enseignants m’ont dit s’en être beaucoup servi pour trouver comment aborder mon fils.

Tout n’a pas toujours été rose : il y a eu quelques moqueries, quelques incompréhensions, quelques difficultés d’intégration avec ses pairs, davantage d’ailleurs avec les élèves « têtes de classe » qu’avec les camarades moins scolaires. La scolarité en milieu ordinaire a exigé de nous, ses parents, certains sacrifices : nous avons mis en place une « machine de guerre » pour l’aider au maximum dans ses apprentissages. L’investissement a été immense, à coup de week-ends et de vacances sacrifiés pour réviser tout le programme, mais le jeu en valait la chandelle.

Après le collège, Arnaud a poursuivi sa scolarité au lycée de secteur, en seconde générale, malgré les doutes de l’équipe pédagogique – je serais tentée de dire « comme d’habitude » – sur ses capacités à investir les apprentissages au lycée. Comble de l’ironie : il a tellement bien investi ces apprentissages qu’en fin de seconde, quand nous avons opté pour une première technologique (STMG), qui correspond mieux à son profil, nous nous sommes entendu dire que nous manquions d’ambition !

L’ambition, nous en avons pourtant toujours eu pour lui, convaincus qu’il pouvait largement être à la hauteur. Même s’il a fallu parfois batailler pour le faire admettre aux autres. Le fait d’avoir été constamment en sursis et sommé de faire ses preuves lui a donné une motivation et une volonté que beaucoup d’élèves neurotypiques (non autistes) pourraient lui envier.

Tous les Aspies (autistes Asperger) n’en sont peut-être pas capables. Ce n’est que notre expérience, et je ne prétendrai jamais parler au nom de tous les parents, tant l’autisme a des visages divers, et tant les atteintes sont variables d’un individu à un autre. Mais je suis convaincue que la plupart de ces enfants ont les capacités d’évoluer, pour peu qu’on les aide, qu’on leur fasse confiance et surtout, qu’on ne les exclut pas par principe, du seul fait de leur différence.

Les Aspies ont souvent d’immenses ressources, des surcapacités qui peuvent être exploitées, mais cela suppose de s’adapter un peu à eux et d’être attentif à leurs rapports avec les autres. J’ai l’espoir que ce type de témoignage ne sera un jour plus nécessaire, parce que la scolarisation et la réussite de ces enfants seront devenus tellement naturelles qu’il n’y aura même plus besoin d’en témoigner. Ce jour-là, c’est la société tout entière, et pas seulement l’école, qui sera devenue inclusive.

1 Réseau d’aide spécialisée aux élèves en difficulté

Crédit image : Pixabay CCO Public Domain

Ça y est, le CDI ressemble à celui dont je rêvais !

Professeur documentaliste au Collège Leconte de Lisle de Saint Louis, à la Réunion, Catherine Jogama s’est réjouie « Au bout de 8 ans, ça y est, le CDI ressemble à celui dont je rêvais ! »

Quels espaces pour quelles activités ?

« L’établissement, classé REP, accueille 850 élèves. Je souhaitais faire évoluer les espaces du CDI pour améliorer sa fréquentation : les élèves n’avaient pas conscience de la multitude d’activités possibles dans ce lieu : il n’est pas fait que pour lire !

Je me suis donc adapté aux besoins et envies de mes élèves pour faire évoluer l’existant, un grand espace divisé en deux salles. Aujourd’hui la première salle comporte de multiples « coins » appropriés à différentes activités : un espace informatique, un espace galerie d’art, un espace jeux de société, un espace de travail sur tables, et même une étagère dédiée au coloriage ! Chaque coin est matérialisé par un mobilier spécifique et une signalétique appropriée. Enfin la deuxième salle, séparée de la première par une cloison en partie vitrée, est une grande salle de lecture où se trouvent deux banquettes en bois pour s’asseoir de manière plus confortable – avant elles étaient ornées de coussins mais ils se sont vite salis. Ils ont tenus moins de 3 ans. Les tissus sont à déconseiller ! »

Quel est l’avantage de disposer de différents « coins » au sein d’un même lieu ?

Les élèves repèrent désormais très bien les activités qui sont possibles au CDI, et les espaces appropriés à telle ou telle activité. Les espaces sont identifiés au premier coup d’œil.

Un regret ?

Malheureusement quand je suis seule (ndlr sans assistante d’éducation), la salle de lecture, pourtant bien insonorisée, n’est pas accessible pour les élèves, pour des raisons de sécurité.

Votre dernière acquisition ?

Le budget d’équipement de l’établissement : chaque année de nouveaux investissements ont été réalisés à l’intérieur du CDI, à partir de devis effectués par le professeur documentaliste. Le dernier achat en date, des îlots « informatiques » pour proposer 12 postes aux élèves, en partie financés par le Conseil Général. 5 tablettes fonctionnent avec une borne WIFI, grâce à un projet « tablettes » au sein de l’établissement !

Le parcours de Julie qui prépare le CAPES d’anglais

Quels sont les meilleurs souvenirs des professeurs d’anglais rencontrés dans votre scolarité ? Quel est le visage marquant qui vous remonte le plus ? Pourquoi ?

Pour moi, chaque professeur d’anglais que j’ai rencontré m’a apporté quelque chose. Chaque professeur d’anglais a une méthode d’enseignement différente, ce qui fait que chaque personne est marquante, à sa manière. Toutefois, le visage marquant de mon parcours est celui de mon enseignante au lycée, c’est également elle qui m’a donné l’envie d’enseigner, de par sa personnalité, toujours très posée.

J’ai eu cette enseignante tout le long de ma période lycéenne. J’ai eu l’occasion lors de mon année de première littéraire de choisir l’option Anglais en spécialité. Nous avons travaillé sur un livre, ce qui m’a donné l’envie de lire en langue étrangère, mais également d’enseigner l’anglais.

Lors de la préparation de votre Master MEEF, vous avez acquis des compétences lors des différents stages vécus en établissement. Lesquelles ?

La principale compétence que j’ai acquise est celle de la pédagogie. Durant ces différents stages, un en lycée et l’autre en collège, j’ai pu, d’une part observer, et d’autre part pratiquer le métier d’enseignant. Je me suis sentie très à l’aise devant une classe, malgré un peu d’appréhension au début.

Je me souviens d’une séquence que j’ai préparé de A à Z dont un des objectifs principaux était l’obligation et l’interdiction. Après avoir eu des retours sur ma préparation, j’ai donc pu me lancer ! Cette séquence m’a permis de faire travailler les élèves par groupe, mais également d’inclure les TICE : le collège étant doté de tablettes, j’ai fait travailler les élèves sur des exercices interactifs.

Cependant, le travail en groupes crée quelques débordements, notamment les bavardages, ou encore un seul élève qui travaille pour le groupe : je mettais donc en place un système de bonus/malus par groupe.

L’autre compétence acquise est celle de la bienveillance à l’égard des élèves et celle de la responsabilité, remarquée par plusieurs collègues : responsabilité de tenir une classe mais également la responsabilité de l’apprentissage.

Toutefois, j’ai pu remarquer une nette différence pédagogique entre le collège et le lycée : au collège, il faut absolument guider les élèves afin de veiller au bon apprentissage, contrairement au lycée où les élèves sont davantage autonomes.

Dans la cadre de la formation à l’ESPE, vous avez rédigé un mémoire sur le thème « la 2nde guerre mondiale dans la littérature et l’art américain ». Quelles grandes conclusions en sont ressorties ?

De par ce travail de recherche sur ce thème, grâce auquel j’ai acquis certaines capacités d’organisation, quelques conclusions en sont ressorties. La principale étant que ce sujet – la Seconde Guerre Mondiale – a touché beaucoup de personnes, et sur une durée de temps bien plus longue que la période de guerre. Elle se retrouve dans différents supports, notamment des supports iconographiques.

La seconde grande conclusion tirée de ce travail de recherche est que, en fonction de l’angle choisi par l’auteur, le photographe, le peintre ou toute autre personne traitant de ce sujet, le message à tirer est important et souvent lourd de sens.

Je n’ai pas d’exemple particulier pour illustrer ces propos : il y en a tellement ! Mais je me suis concentrée sur une photographe de l’époque en particulier, Lee Miller : ses clichés parlent d’eux-mêmes. De plus, elle porte les valeurs d’une femme forte dans un milieu essentiellement masculin, notamment avec le cliché où elle porte elle même un uniforme de soldat.

Après votre échec à l’oral du CAPES en 2017, vous avez décidé de rebondir en sollicitant un poste d’enseignante contractuelle. Quels sont les points forts de votre première année d’enseignement ?

Cette année en tant que contractuelle m’a beaucoup aidée : il n’y a rien de plus formateur que la confrontation au métier, devant des élèves, en enseignant en les préparant pour leur futur, mais aussi en découvrant la vie d’un établissement (les projets, les conseils de classe etc…)

Il est vrai qu’il faut être ferme dès le début afin que tout se déroule pour le mieux. J’avais des petits effectifs, ce n’était donc pas très compliqué d’avoir une bonne ambiance de classe et de travail.

De plus, cette année d’enseignement m’a apporté beaucoup, tant du point de vue personnel que professionnel.

En effet, j’ai eu la chance de rencontrer des personnes qui m’ont beaucoup aidée, et notamment ma collègue d’anglais qui m’a traité d’égale à égale et qui m’a donnée sa confiance dès le début.

Nous avons monté un projet en équipe de voyage en Angleterre que j’ai piloté. Ce projet m’a permis de développer une de mes compétences : la responsabilité des élèves.

Vous vous présenterez à nouveau aux épreuves du CAPES en 2019. Dans quel état d’esprit vous trouvez-vous pour faire face à ce défi ?

En effet, je veux croire que cette année sera la bonne. Je suis plus déterminée que jamais à décrocher ce concours. Grâce à mes deux années d’enseignement et aux nombreuses compétences que j’ai acquises, notamment la pédagogie, la bienveillance, la capacité à gérer une classe, l’organisation dans le travail, cela me met en confiance pour affronter les épreuves du CAPES 2019.

Je compte préparer le CAPES 2019 à l’aide des cours du CNED et me prépare aux épreuves orales avec des amies qui le passent également.

Comment imaginez-vous votre parcours dans l’Éducation Nationale ? Quelles perspectives de carrière avez-vous en tête ?

Pour l’avenir, j’aimerais pouvoir organiser des voyages scolaires, comme j’ai pu le faire durant mon année de contractuelle afin de partager avec les élèves la culture anglo-saxonne.

J’aimerais pouvoir également me spécialiser dans l’enseignement, et ainsi diversifier le public : accueillir des élèves des élèves de SEGPA, d’enseignement spécialisé tels que l’ULIS etc…. Ces élèves à besoins éducatifs particuliers sont souvent attachants et requièrent toute notre attention.

Et pourquoi pas envisager, pour un futur plus éloigné, la formation, pour adultes, devenir tutrice d’étudiants ou de stagiaires ?

Julie BERGEROT
Enseignante contractuelle d’anglais
Académie de BESANÇON

Céline, CPE contractuelle, a déjà beaucoup d’expérience…

Vous avez obtenu un doctorat en sociologie et démographie. En quoi la transversalité de cette discipline rejoint la polyvalence du métier de CPE ? Votre thèse porte sur la place et le rôle du théâtre politique dans la société d’aujourd’hui. Quels grands enseignements en avez-vous tirés ?

Les méthodes de la sociologie se rapprochent énormément du métier de CPE, notamment au niveau du travail d’observation et de l’approche analytique. Comme le CPE, le sociologue a pour dynamique le mouvement et aussi la remise en question perpétuelle. À mon sens, une bonne connaissance et maîtrise de la sociologie des organisations sont nécessaires au bon fonctionnement d’un établissement et notamment pour être en mesure de coordonner un groupe. Collecter, analyser et coordonner pour être en mesure de faire bouger les lignes, c’est ainsi que je résume le lien entre le CPE et le sociologue.

Je ne vais pas parler des grands enseignements que j’ai pu tirer de ma propre thèse. Pour moi, il est plus important de se pencher sur la complexité de l’exercice sur le global. La thèse est à mon sens l’une des meilleures écoles de la persévérance. Quel thésard n’a jamais eu envie de tout arrêter ? Pour moi, le plus grand enseignement, c’est de toujours aller au bout des choses.

Dans le cadre d’un emploi auprès d’une mutuelle étudiante, vous avez animé des campagnes de prévention en direction d’un public étudiant. Sur quels thèmes portaient les formations ? Quelles compétences avez-vous acquises dans ce cadre ?

Les thématiques des campagnes de prévention étaient uniquement en relation avec les problématiques majeures de la population étudiante. Elles portaient par exemple sur les addictions (tabac, alcool, cannabis) ; la sexualité et notamment les infections sexuellement transmissibles, avec comme point d’orgue la journée d’action du 1er décembre ; la nutrition avec notamment un gros travail sur l’importance du petit-déjeuner ; les risques liés au son avec notamment la distribution de bouchons d’oreilles dans des salles de concert et festivals et enfin tout simplement l’accès aux soins.

Plus que des compétences, j’ai pu acquérir une meilleure connaissance des problématiques étudiantes en matière de santé et me rendre compte aussi de la nécessité de mettre en place une véritable éducation à la santé.

En tant qu’AED dans un lycée polyvalent, vous avez travaillé sur un projet intitulé « les cordées de la réussite ». En quoi consistait-il ? Quels étaient ces principaux objectifs ?

Ce projet permettait de mettre en lien un élève de BTS avec un collégien sous la forme d’un tutorat de deux ans. Le but était de choisir un collégien qui en règle générale avait de bons résultats scolaires, mais pas forcément la volonté (ou un entourage social favorable) de faire des études plus tard dans le supérieur.

Le but étant aussi de faire en quelque sorte une « éducation » à l’orientation afin de lever certains freins. Il reste parfois compliqué pour un élève (mais aussi pour la famille) de se projeter dans la perspective de faire des études alors qu’aucun membre de sa famille ne possède le bac. Il est aussi essentiel de confronter un élève de BTS à la possibilité de poursuivre ses études.

« Les cordées de la réussite », c’est aussi organiser concrètement des sorties, comme par exemple participer à un forum sur l’orientation ou (et) la visite d’une grande école, découvrir la vie étudiante (comme par exemple le logement, mais aussi restaurant universitaire, etc.). Ce projet, c’est aussi l’occasion d’ouvrir les élèves à des visites culturelles, mais aussi prendre le temps de « juste profiter » avec par exemple une journée dans un parc d’attractions. Concrètement, c’est un moyen de donner une ouverture sur le monde à des jeunes qui, souvent pour des raisons sociales, n’ont pas cette chance.

Candidate à un poste de CPE contractuelle, vous vous êtes vu confier au fur et à mesure des collèges de taille de plus en plus importante en effectifs. Quelles conséquences ces effets de taille ont-ils eu sur le fonctionnement même des vies scolaires ?

Chaque type d’établissement a ses avantages et ses inconvénients. Plus la structure est grande, plus il est nécessaire de déléguer et de faire confiance à son équipe d’assistants d’éducation. D’où la nécessité d’un bon travail de communication et d’un rapport de confiance. L’un des points très positif, c’est la présence plus fréquente d’infirmière scolaire, d’assistante sociale, de PsyEN, c’est-à-dire d’acteurs qui permettent au mieux d’accompagner des élèves en prenant plus en compte la complexité des problématiques.

Dans une structure plus petite avec moins de personnel nous pouvons nous rendre compte que chaque absence d’enseignant, mais aussi d’AED, est souvent très difficile à combler. Il est plus compliqué de faire face à des imprévus au sein d’une structure plus petite. Néanmoins, cette structure est souvent plus rassurante pour les élèves, une sorte de second cocon familial.

Vous êtes affectée dans un collège du Haut-Doubs dans lequel est mis en place un projet pédagogique relatif au soutien au comportement positif. Comment décririez-vous les points fort de ce dispositif ?

« Le soutien au comportement positif », c’est une manière un peu différente d’aborder les élèves et surtout une autre approche des notions « sanction » « punition ».

Ce dispositif apporte aussi des outils pour « mieux » comprendre et se faire comprendre. Il place la communication au cœur de notre travail. Ce type de projet nous met face à l’urgente nécessité de se réapproprier un vocabulaire adapté.

Le comportement positif, c’est aussi remettre la notion de « bienveillance » au cœur de notre travail et redonner du sens et de la valeur à ce terme si souvent moqué.

Comment imaginez-vous votre carrière dans l’Éducation Nationale ? Quelles perspectives à moyens termes avez-vous en tête ?

Actuellement, je suis contractuelle CPE et j’accumule des expériences afin de me préparer au mieux à cette profession. Cette pluralité d’expérience est, à mon sens, très bénéfique, c’est un excellent exercice d’adaptation.

Cette année, je souhaite passer le concours de CPE en externe. Si je réussis le concours, j’espère obtenir un poste dans un établissement où mes expériences apporteront réellement un plus. Si au contraire, j’ai cette douloureuse impression de ne pas être utile, je ferai tout simplement autre chose.

Céline Lachaud

CPE… en passant par A jusqu’à Z

« CPE… ça consiste en quoi au juste ?»

Quinze ans de métier et toujours cette difficulté à expliquer mon travail aussi bien à d’autres professionnels, à des amis, à la famille, à mes enfants. Et la réponse est constamment horriblement réductrice.
Alors par quoi je commence ? J’ai combien de temps ? On va au plus rapide et au plus compréhensible par tous : les absences, les punitions, les permanences, les surveillants, mais du coup je ne parle pas des projets, de la course contre le temps et du coup j,ai cette frustration constante de ne pas avoir su parler de moi, de ce qui fait mon quotidien, donc le sentiment d’avoir complètement raté un oral.
En même temps, la question est presque un sujet de philosophie, non ?

« Qu’est-ce-qu’« Être CPE » ?

Et comme si le sujet n’était pas assez flou, le CPE est associé à un autre concept tout aussi flou « la vie scolaire ». Mais au moins il y a le mot « vie » et là j’ai un début de réponse à mon sujet de philosophie : le CPE est la personne qui s’occupe de tout ce qui touche à la vie des élèves dans l’établissement. C’est joliment dit mais je ne suis pas sûre d’expliciter mon quotidien.

Je vais essayer avec le sigle. On pourrait croire qu’il n’y a pas de quoi philosopher et pourtant : les universitaires et chercheurs voient (naturellement ?) dans le P de CPE de la… pédagogie​. Dans un article du Centre Alain Savary de septembre 2017 on lit qu’une « conseillère pédagogique d’éducation (CPE) » est membre d’une équipe en projet.

Je choisis la facilité et je vais vers le consensus : CPE = Conseiller Principal d’Education.

Oui mais en quoi ce sigle reflète-t-il mon activité, mes activités au quotidien ? Ma principale activité n’est pas de conseiller et du coup cela me gêne parce que j’ai le sentiment d’usurper une identité qui n’est pas la mienne. Et puis, si on confronte le prescrit au réel, il apparaît que :

  1.  Pour être… un conseiller, il faut être… consulté. Or, dans bien des situations (sanctions posées…) le CPE ne l’est pas pour différentes raisons (temps, organisation…).
  2. Pour être… force de propositions, il faut être reconnue dans sa professionnalité. Cela suppose en amont que l’expertise du CPE soit admise : si on se sait écouté, on est plus enclin à proposer ses idées (avec bien sûr l’assurance de ne pas en être dépossédé).

Par ailleurs, le principal conseiller du chef d’établissement varie en fonction de la problématique d’un élève : s’il est question d’une pathologie, le principal conseiller devient l’infirmier ; s’il est question de précarité, le principal conseiller devient l’assistant social. Et ce n’est pas que du médical ou du social c’est aussi de l’éducatif.

CPE : Le sigle serait donc trompeur ?

Ah les élèves ont finalement raison, il y a toujours des pièges dans un sujet de philo !

Mais j’ai été prévenue : c’est à moi qu’il revient de construire mon identité de CPE.

Donc, pour ma rédaction, inutile de rechercher sur internet les missions du CPE. Je construis moi-même : pas uniquement avec trois lettres : le C le P et le E.

Je vais prendre les vingt-six lettres de l’alphabet et je rends ma copie :

La/le CPE est ce Professionnel qui se veut au Quotidien Bienveillant avec les Elèves et leurs Familles. Soucieux de l’Inclusion de Tous, il veille Habilement au bien-être de chacun afin qu’aucun.e de ces futur·e·s Grand·e·s Citoyen·nes- (Y compris ces Wistitis qui s’amusent à faire les Zigotos) –Jamais ne Décroche des Apprentissages et que tous et toutes Réussissent. Ultra Vigilant, il tire le Klaxon dès que Nécessaire. En tout cas, c’est certain, ce n’est pas une Madame Ou un Monsieur X !

Et malgré tout l’alphabet, j’imagine ce que serait l’appréciation sur ma copie :
« Vous n’avez traité qu’une TOUTE PETITE partie du sujet ! »

Hanène Stambouli, C.P.E de l’académie de Créteil

CPE et doctorant, Edmond nous raconte…

Quel est le sujet de votre thèse et sous quelle direction écrivez-vous ?

J’étudie l’identité professionnelle des Conseillers Principaux d’Education sous la direction de Patrick Rayou (Professeur émérite en sciences de l’éducation, Université Paris 8) au laboratoire Circefet-Escol. J’analyse le processus de professionnalisation des CPE à travers leurs activités afin d’identifier et de comprendre leurs logiques d’engagement, dans l’objectif d’engendrer une théorie enracinée. Ce qui m’intéresse ce sont les grammaires ou les rhétoriques que véhiculent les CPE.

Pourquoi avoir choisi ce sujet ? En quoi est-il pertinent ?

Ce choix, avant tout, permet d’observer le CPE, comme une figure marginale du monde de l’enseignement. Au sens où, il incarne à lui seul la préoccupation éducative du système scolaire français, tout en se trouvant bien souvent défini par la négation des autres : métier flou, sale boulot. La perspective adoptée permet d’aller voir l’arrière-cour du groupe social formé par les CPE sous un prisme non déterministe. Autrement dit, comprendre les jeux et enjeux qu’ils déploient et développent afin de faire tenir leur fonction leur permettant de s’inscrire dans une démarche professionnalisante.

Quelle est votre méthodologie ?

La recherche qualitative menée, sollicite un modèle d’analyse inspiré de la clinique des activités pour restituer du « pouvoir d’agir » par la « transformation des situations de travail ». À l’aide d’interrogations portant sur le genre et le style (Clot et Faïta, 2000), elle ne vise pas à poser un regard d’expertise. Elle s’appuie sur trois types de matériaux recueillis auprès de CPE : des entretiens semi-directifs, des agendas et une enquête monographique d’un an dans un lycée. Tout ceci, complété par le travail de confrontation d’un collectif de CPE formé de neuf membres, réalise un dispositif d’intervention conçu pour élaborer « un modèle compréhensif » (Wittorski, 2010) de la dynamique de professionnalisation des CPE par l’expérience professionnelle. Il s’agit concrètement d’identifier et de comprendre ce qu’ils font quand ils travaillent, pour révéler les logiques d’engagements qui sont en jeu dans leurs activités réelles.

Quels sont les observables les plus récurrents ? Et que traduisent t-ils ?

Le collectif : le groupe de CPE présente des phénomènes d’économie (négociations) comme dans tout groupe social. C’est en étudiant les mouvements de ces négociations que l’on peut identifier les logiques d’actions.
Les CPE, fragilisés par leur statut peu connu, leurs missions très peu définies (malgré l’affichage institutionnel) ainsi qu’un mode d’association qui ne les rend pas visible ni lisible s’emparent des miroirs (ici le chercheur) qui leur sont tendus pour trouver une voie d’accès à un processus de professionnalisation qui leur permettrait de construire leur identité professionnelle. Ceci traduit la difficulté rencontrée par une profession qui ne sait pas trouver une voie propre pour construire une identité.

En quoi votre thèse permet-elle d’actualiser le regard porté sur le métier de CPE. Autrement dit, apporte-t-elle de nouvelles perspectives ?

Mes réflexions proposent de penser le CPE comme un acteur singulier des collèges et lycées et non comme un élément exogène dont la légitimité peut être sans cesse remis en cause ; tant sur le champ éducatif que sur le champ pédagogique. Je pose dans cette perspective un regard qui consiste à voir le CPE comme un professionnel doté de savoirs et de savoirs faire propres qui lui permettent d’être le metteur en scène de la Vie scolaire.

Edmond Houkpatin, CPE dans l’académie de Créteil

Le CPE et le développement du sentiment de justice en milieu scolaire

Qu’est-ce que la justice en milieu scolaire ?

La justice en milieu scolaire comprend l’ensemble des situations au travers desquelles un ou des membres de la communauté scolaire vont vivre ou faire vivre à autrui un sentiment de justice ou d’injustice¹. Il est nécessaire de bien comprendre qu’elle dépasse très largement la simple question des sanctions et punitions.
Cette question des punitions, au sens large, peut-être dénommée, elle, sous le vocable plus restreint de « justice scolaire » et ne recouvre donc pas totalement les mêmes domaines.
Enfin afin d’éviter les confusions, Il faut garder en tête que l’appellation de « justice », ici, ne doit en rien être prise dans le sens légal de « judiciaire ». La progressive pénétration du droit commun dans les règlements et circulaires peut parfois générer des malentendus.
La justice en milieu scolaire relève autant d’une éthique professionnelle que d’une réglementation.
La notion de « justice en milieu scolaire » se situe à chaque instant et chaque endroit de la vie de l’élève (en premier lieu là où il, elle, passe le plus de temps c’est-à-dire en classe).

Comment le CPE peut participer à développer ce sentiment de justice ou, a minima, réduire celui d’injustice ?

En théorie, tous les collègues doivent, selon les prescriptions institutionnelles², s’emparer de cette question de justice en milieu scolaire dans le cadre de sa participation à l’instauration du meilleur climat scolaire possible.
Par sa formation, le CPE est un des membres de la communauté éducative le mieux placé pour faire entendre que le sentiment d’injustice ressenti par les élèves est un des principaux facteurs dégradant le climat scolaire d’un établissement.
Il n’est plus nécessaire de souligner la corrélation entre ce climat et la réussite scolaire, indépendamment des facteurs socio-économiques initiaux. Il n’est plus nécessaire, non plus, de souligner les liens entre un climat positif et les différentes formes d’incivisme connues dans les établissements qui font la violence en milieu scolaire³.
Toutefois un certain nombre d’obstacles contribuent à freiner la mise en place des pratiques efficientes en ce domaine.
C’est bien en premier lieu la charge de travail qui ne permet pas toujours d’adopter une démarche réflexive suffisante. De même que la force des habitudes, l’attente de certaines familles voire l’attente des élèves eux-mêmes…

Quels sont donc les leviers à la disposition des CPE ?

Le premier des leviers sur lequel peut jouer le CPE est, bien sûr, le projet de vie scolaire. S’il a ses limites, il est aussi ce qui va lui permettre de fédérer l’équipe éducative autour de ces thématiques.
Au moins à la prérentrée, le CPE peut exposer ce projet, définir cette forme de « justice », amener les collègues à repérer les situations multiples où elle se manifeste.
Citons, par exemple, les sanctions diffuses (encouragements ou dévalorisations de l’élève) mais aussi l’évaluation ou l’attitude des adultes… C’est aussi l’occasion de souligner les bénéfices communs (enseignants/enseignés) qui surviennent dès lors que tous travaillent dans cette direction.
Un second levier est l’application pleine et entière des textes officiels, la modération dans les usages des sanctions les plus sévères, la lutte contre l’impunité, la vérification de la légalité des procédures dont les interprétations peuvent parfois laisser place au doute.
Ou encore la mise en place de dispositifs variés, la désormais célèbre médiation par les pairs, le travail autour de la communication non violente voire, certainement plus efficacement, l’introduction de l’acquisition des compétences psycho-sociales en la plaçant dans l’emploi du temps des élèves au même titre que toute autre discipline.

En quoi le développement de ces dispositifs ou l’instauration d’heures dédiées aux compétences psycho-sociales jouent sur le sentiment de justice ressenti par les élèves ?

Ce sont différentes manières de poursuivre la prise en compte réelle de la parole de l’élève. Cette écoute effective joue un rôle primordial pour favoriser le sentiment de justice. Les élèves ressentent souvent (notamment dans l’éducation prioritaire) que leur parole, aux conseils de classe par exemple, est écoutée sans être entendue. Certains dispositifs, l’évaluation par contrat de confiance pour n’en citer qu’un, les rendent mieux acteurs de leur scolarité.
Le respect et surtout l’explicitation des textes (aux parents comme aux élèves) qui régissent le droit à l’école permettent la transmission de grandes valeurs dont celle de justice. Les valeurs se transmettent par des paroles, par des actes mais aussi par des institutions explicites, précises. Les « institutions parlent » dit Jean-Pierre Obin.
Enfin la prise en compte par l’ensemble de la communauté éducative de ces différents aspects de la justice en milieu scolaire contribue à la construction d’un climat globalement positif dans l’établissement et dépasse donc le cadre du seul « bien-être » qui reste essentiellement individuel.

Gautier Scheifler
Collège d’éducation prioritaire de Clichy-sous-Bois
Académie de Créteil

 

 

 

  1. Pour une justice en milieu scolaire préventive et restaurative dans les collèges et lycée, MMCPLMS, 2013
  2.  Circulaire n° 2015-139 du 10-8-201
  3. Debarbieux, E., Anton, N. , Astor, R.A., Benbenishty, R., Bisson-Vaivre, C., Cohen, J., Giordan, A., Hugonnier, B., Neulat, N., Ortega Ruiz, R., Saltet, J., Veltcheff, C., Vrand, R. (2012). Le « Climat scolaire » : définition, effets et conditions d’amélioration. Rapport au Comité scientifique de la Direction de l’enseignement scolaire, Ministère de l’éducation nationale. MEN-DGESCO/Observatoire International de la Violence à l’École. 25 pages.
  4. Moignard B., Le collège fantôme. Une mesure de l’exclusion temporaire des collégiens, Diversité,n°175,
  5. Évaluer par contrat de confiance. Quels effets sur les acquis des élèves ?
  6. En particulier dans le cadre de la justice scolaire la circulaire n° 2014-059 du 27-5-2014
  7. Liberté, égalité, fraternité, laïcité, justice sociale : comment transmettre les valeurs de la République ?

 

Réflexion d’un CPE sur l’Autorité

Autorité et valeurs républicaines

En étudiant le concept d’autorité, nous apprenons à faire la différence entre différentes formes d’autorité. En effet, tout le monde n’y met pas la même idée, et donc n’y met pas les mêmes moyens pour l’imposer. Pour reprendre les travaux d’Eirick Prairat, on doit faire une grande distinction entre L’Auctoritas et la Potestas. L’une passe par la confiance et l’adhésion morale, alors que l’autre passe par la coercition et la violence. Évidemment, aujourd’hui, même sans utiliser ces notions, nous faisons bien la distinction. Et tout l’effort actuel de l’éducation est de passer par cette première forme qui provoque cette adhésion pleine et entière de l’individu. Mais pour bien les comprendre l’une et l’autre, il faut bien se rendre compte malgré tout qu’il y a une forme de confiance dans les deux : dans les deux cas, l’individu est convaincu qu’une cause produira le même effet. Si dans le premier cas, la personne pense que l’autorité dit la vérité et que de se fier à elle permet d’obtenir les meilleurs effets, ceux qui sont souhaitables pour soi et pour autrui, dans la deuxième elle sait que si elle n’adhère pas à son discours elle en payera les frais par une compensation désagréable. Le métier de CPE, qui semble fortement lié à l’autorité, fait sens ! Nous avons l’opportunité d’être utiles, de servir les idéaux humanistes des Lumières par l’entremise des valeurs républicaines, de les transmettre, et d’aider quelques élèves à s’agripper à l’École et à ce qu’elle a offrir : pour la part très pragmatique, un métier et la possibilité de le choisir, ainsi qu’une place dans cette société ; mais surtout, ce qui importe peut-être encore plus pour cette génération désenchantée, de se construire comme un individu éclairé et autonome.

Idéologie de la réussite contre l’autorité de l’École

Mais aujourd’hui ce qui désole justement le plus, c’est de constater que tout, et surtout l’École et ses apprentissages, ne sont réduits qu’à cette première partie très terre-à-terre. Fait-elle vraiment sens pour les jeunes ? On leur dit qu’ils doivent être présents en classe, apprendre et se tenir correctement pour réussir leur avenir. Ils doivent canaliser une énorme énergie, se discipliner pour obtenir un métier, de la reconnaissance et de l’estime. Est-ce si sûr ? Pour l’ambitieux, qui se fie à la profusion de messages médiatiques et politiques, la réussite ne passe pas par l’école, mais par les réseaux. Comment leur faire donc croire en ce discours quand on impose une rigueur contraignante qui passe plus pour une injustice et une perte de temps que pour un moyen ? Comment leur donner confiance en nous, en l’école, avoir de l’autorité en somme quand on diminue l’école à ce quasi-mensonge, ou en tout cas à ce qu’une toute petite voix leur dit d’inverse à ce que cet assourdissant vacarme médiatique proclame ? Fort heureusement, ce n’est pas tant un constant d’échec pour l’école que pour un modèle de société. Le souci pour l’école, c’est quand elle se fait le relais de ce paradigme idéologique et qu’en plus elle croit s’en faire une force. Elle ne dupe qu’elle-même ! À vrai dire, dans son effet, elle réussit toujours à transmettre savoirs, connaissances et compétences et à former ces « ouvriers qualifiés ». On a d’ailleurs oublié que l’école de Jules Ferry avait plus insidieusement cette vocation que celle d’ouvrir tout un chacun aux Lettres et à la Culture. Le cynisme se donne bonne figure, et même si l’école avait su tirer son épingle du jeu un temps, il revient au galop. Ce qui est inquiétant, c’est qu’en revanche elle semble du coup de plus en plus passer à côté de cette vocation bien plus noble : celle de rempart contre ce cynisme. Ce rempart qui permet de protéger ce qui est inscrit au fronton de tous nos établissements publics : Liberté, Égalité, Fraternité !

La violence du pragmatisme : l’absence de sens et de lien

Pour revenir à l’idée du sens, le monde est interactions. Il est un enchevêtrement de relations qui le rendent beau, qui lui donnent tout son intérêt, toute sa profondeur. Quand tout est ramené au « vital », tout devient plat et insipide. Tout comme le discours qui le porte. À ce titre, même si du coup l’on pense travailler et agir par l’emploi de cette autorité douce, on secoue cet épouvantail de l’avenir : travaille, ou tu échoueras, tu seras marginalisé(e) ! En somme, on essaye de faire peur. Est-ce vraiment ça, l’Auctoritas ? Est ce qu’on a vraiment tiré les bonnes leçons ? La vie se résume-t-elle à la nutrition, à la sécurité ? Ces disciplines qu’on enseigne à l’école n’ont-elles vocation qu’à satisfaire ces besoins ? Évidemment que non. Elles nourrissent en premier lieu cette conscience humaine. Alors pourquoi, si nous perdons tant de temps, d’énergie et d’argent à transmettre ces savoirs, croyons-nous que les élèves ne puissent pas être touchés par autre chose ? Pourquoi pour les motiver ne leur parlons-nous pas de ce qui émerveille dans ce monde ?
J’entends trop souvent ces propos cyniques où l’on me dit que « tous les élèves ne sont pas fait pour l’école », qu’ils sont justement eux-mêmes très « premier degré », très matérialistes » … En même temps, l’école participe aussi à la transmission de cette vision. Mais de plus, c’est bel et bien de cette idée d’une école à vocation pratique dont on parle à cette occasion : cette école qui ne voit son savoir que comme un bagage à vendre et à exploiter.

Pessimisme du discours institutionnel ou joie d’apprendre ?

Pourtant l’émerveillement ouvre à l’admiration et donc à la curiosité, à la recherche de la compréhension. L’individu qui se crée dans ce rapport à l’autre creuse encore et encore pour comprendre toujours plus ce qui n’est pas lui. Pourquoi d’ailleurs les enfants sont-ils toujours aussi avides d’apprendre jusqu’à la fin de l’école primaire ? La curiosité est pourtant si naturelle. Qu’est ce qui casse cet enchantement par la suite ? Ne serait-ce pas l’angoisse de l’échec et de l’avenir ?
En somme, si l’autorité est la confiance en la parole de celui qui la détient, la confiance est déjà dans l’émotion que provoque le contenu de son discours. Il faut cultiver cet optimisme dans la découverte justement, cette joie d’apprendre. Peu importe la destination (même si elle n’est pas ignorée) quand il y a déjà ce plaisir à arpenter le chemin. Et pour ça, il faut que nous la vivions nous-même dans nos pratiques et nos discours. Encore une fois, je ne pense pas que le plaisir d’apprendre se situe dans le pragmatisme et le désespoir, ni dans une sclérose.
Bien sûr, il ne s’agit pas d’une solution miracle, et encore moins d’enfermer l’autorité dans un concept. Mais mes réflexions m’ont amené à me demander si en tant que professionnel nous ne la perdons pas déjà à cause de cette vision très pessimiste du Monde, de la société et de l’Homme, qui nourrit le discours institutionnel. Même si pour nos élèves en difficulté le résultat n’est pas immédiat, je ne vois pas ce que nous perdrions à arrêter d’être ces rabat-joie en leur rappelant que la connaissance n’a pas qu’une fonction bassement vitale. Pour les autres, ça s’ajoutera à ce qui fait déjà sens. La connaissance fait l’Homme, en particulier la connaissance de soi. Et pour apprendre à se connaître, il faut, comme dans un miroir, chercher à comprendre l’Autre.

Aurélien Brulois
CPE dans un collège du Territoire de Belfort
Académie de BESANCON

L’article complet est disponible ici : article Aurélien Brulois

CPE détaché en préfecture, Morgan nous raconte son parcours…

Après votre réussite au concours de CPE en 2002, vous exercez le métier d’abord dans un lycée professionnel de l’académie de Rennes puis dans un collège de l’académie de Versailles. Quels points communs et quelles différences voyez-vous dans ces deux expériences professionnelles ?

Ces deux expériences se sont finalement révélées assez proches l’une de l’autre. Exigeantes en terme d’adaptation et de réactivité, impactées par la précarité de l’environnement social et résolument construites sur un principe d’échange et de partage pédagogique. Il nous fallait comprendre (vite !), expérimenter, innover tout en plaçant l’humain au cœur du système… L’essentiel à mon sens. La première de ces expériences s’est faite en lycée professionnel maritime avec internat sur les bords de l’agitée mer d’Iroise, la seconde à quelques mètres de l’A86 et des lignes ferroviaires menant à Paris dans un collège classé PEP 4 et regroupant quarante-deux nationalités différentes. Absentéisme, décrochage, échec scolaire, mal-être, violence verbale et physique, addictions pavaient le quotidien de ma fonction ; je retiens principalement la qualité des liens tissés avec les élèves et leurs familles, la confiance mutuelle gagnée, le respect que nous avons entretenu malgré les épreuves et notre volonté d’avancer, coûte que coûte, ensemble.

Au cours d’une année de disponibilité, vous militez au sein de la Ligue de l’enseignement et devenez formateur au sein du mouvement. Quelles ont été vos motivations pour accepter un tel engagement ?

J’ai découvert le milieu de l’éducation populaire très jeune et ai grandi à l’ombre du militantisme familial et des mouvements laïcs Bretons. BAFA puis BAFD en poche, j’ai poursuivi mon adhésion aux valeurs des Francas, puis des CEMEA durant plus de dix ans avant de m’intéresser à l’existence des Maisons des Jeunes et de la Culture. Vraie révélation puisque je consacre mon année de maîtrise, en fac, à la rédaction d’un mémoire sur l’histoire de la FFMJC (Fédération Française des Maisons des Jeunes et de la Culture). La quasi-absence de bibliographie dédiée et/ou d’archives m’amène à devoir créer les sources par la recherche et la constitution d’entretiens avec les acteurs initiaux (responsables syndicaux, militants, cadres des mouvements, directeurs de structures, administrateurs, adhérents, universitaires…). C’est là que je rencontre les principes actifs de la Ligue de l’enseignement et que je me passionne pour le mouvement. Les identités se fondent, les réseaux se créent. Huit années plus tard, durant mon année de disponibilité et de retour en Bretagne, je fais la connaissance d’André Jouquand , alors secrétaire général de la fédération d’Ille-et-Vilaine : une figure tutélaire de la section que je n’avais pu interviewer auparavant. Au terme de notre échange, il m’invite à candidater. Un poste se libère dans sa structure suite à un congé maternité. Deux semaines plus tard, j’intègre la Ligue 35. Nouveau départ !

Entre 2008 et 2012, vous obtenez un poste de détaché à la Ligue de l’enseignement et vous devenez responsable du service Éducation Culture Jeunesse. Plus concrètement, quels sont les projets éducatifs que vous avez suivis ? Que vous ont-ils apportés ?

Détaché à Montpellier, je prends en charge une mission composée d’une quinzaine d’actions. J’anime (du moins j’essaie dans un premier temps…) le programme départemental qui s’étend de la maternelle au lycée : lutte contre l’illettrisme, programme d’apprentissage de la langue et de la lecture, ouverture culturelle par le cinéma et le théâtre, mise en place du service civil volontaire puis du service civique, lutte contre les discriminations, contre l’homophobie, lutte contre les inégalités : vaste entreprise ! Je me familiarise alors avec le Programme de Réussite Éducative, le Plan Éducatif Local de la municipalité, explore en profondeur le fonctionnement des collectivités territoriales et l’organisation des subventions, me rassure avec celui des collèges et des lycées partenaires avant d’aborder la question des fonds européens. J’ai appris, beaucoup, et me suis nourri, énormément.

Dans le même esprit, vous poursuivez votre activité professionnelle auprès de la ville de Rennes en tant que chargé des projets relatifs à la vie étudiante. Quels sont les axes prioritaires que vous avez développés ? Avez-vous le sentiment d’avoir atteint vos objectifs ?

J’intègre en 2012 un poste d’attaché territorial au sein de la DVAJ (Direction Vie Associative et Jeunesse) de la ville de Rennes. La mission principale que j’accompagne concerne la vie étudiante et l’occupation festive de l’espace public en milieu nocturne. L’objectif était d’assurer la prévention des risques et des addictions par la responsabilisation et la redéfinition des enjeux du vivre ensemble (selon les derniers recensements, un habitant sur deux a moins de 30 ans à Rennes et un habitant sur quatre est étudiant…). Nous avons mis ainsi en place une programmation annuelle festive et culturelle (la ND4J pour Nuit des 4 Jeudis) basée sur la co-construction, dont le portage est assuré par les associations et les collectifs étudiants en partenariat avec les acteurs locaux. Il s’agissait de créer des évènements réguliers favorisant l’appropriation des « sanctuaires » locaux par les jeunes (soirées électro dans les piscines municipales, battles hip hop à l’opéra, concerts rock en prison, courses de solex sur les campus, parcours street art et graff en centre-ville, etc)

L’autre dimension du poste consistait à suivre le fonctionnement des structures dédiées à la Jeunesse et la Vie Etudiante : Le CRIJ (Centre Régional Information et Jeunesse), l’AFEV (Association pour la Fondation Etudiante de la Ville) ou Animafac principalement.

Je travaillais enfin en lien étroit avec les universités (Rennes 1 et Rennes 2) pour l’accompagnement des dossiers de subvention et la réalisation des projets portés par les élèves (voyages linguistiques, création de revues, création de festivals, échanges culturels, …)

Au-delà de la question des objectifs, je pense que nous avons collectivement jeté les bases d’un véritable échange intergénérationnel, permis l’expression citoyenne, appuyé la question de la mixité culturelle et sociale et approché les questions, en termes éducatifs, du pré-politique, autrement dit du « faire société »

Délégué du Préfet de Rennes depuis 2015, vous vous trouvez en charge de la politique de la ville dans le cadre d’une coordination interministérielle. Quels sont les principaux domaines sur lesquels vous intervenez ? En quoi consiste votre rôle de coordinateur ?

Je m’inscris ici dans le cadre de la réforme des nouveaux « Contrats de Ville », succédant au CUCS (Contrat Urbain de Cohésion Sociale) qui prennent leur ancrage au sein des QPV (Quartiers Prioritaires de la Ville). Trois piliers ont été identifiés : La cohésion sociale, le développement économique et le renouvellement urbain. Trois thématiques transversales en ont été transcrites : la Jeunesse, l’égalité Femmes/Hommes et la mémoire des quartiers. C’est le fondement de ma mission : coordonner les services de l’État au plan local (Éducation Nationale, DDCSPP, DRJSCS, Direccte, Santé, DRAC, etc…) et servir d’interface aux collectivités territoriales (Ville, Métropole, Conseil Départemental, Région) pour l’accompagnement des projets et des programmes idoines. Tous concourent in fine à la lutte active contre les inégalités et la réduction des écarts sociaux, éducatifs et culturels. Si mon « rôle » signifie quelque chose, j’aimerais qu’il soit celui-là, qu’il s’en rapproche : s’engager pour plus de justice, d’égalité et d’intelligence collective. De la réussite éducative à l’amélioration du cadre de vie, de l’accès à la culture à l’insertion professionnelle, de la tranquillité publique à la santé, la politique de la ville est à la fois, pour moi, un monstre de complexité et la clé de voûte républicaine.

La succession de vos expériences montre la richesse de votre parcours professionnel et votre besoin de diversifier régulièrement vos lieux d’exercice. Comment envisagez-vous la suite de votre carrière ?

Sans plan de carrière par exemple !!! Je veux juste continuer à poser un regard curieux sur ce qui m’environne et suivre le rythme de mes pas. Je crois définitivement que je préfère le voyage à la destination.

CPE un jour, CPE toujours… Partagez-vous l’idée que l’on reste marqué, tout au long de son parcours professionnel, par l’identité professionnelle de son métier d’origine ? Si oui ou si non, pourquoi ?

Ce métier demeure ma matrice. Je me considère comme un CPE en apprentissage. En apprentissage de ses potentialités, en découverte de ses possibles. Un marqueur invisible et pourtant indélébile, inversement proportionnel : je ne sais toujours pas si c’est moi qui le porte ou l’inverse.

Morgan Chauvel, CPE détaché à la préfecture de Rennes

Animatrice, EAP, Prof, le riche parcours de Noémie

Lors de votre Licence de Lettres Modernes, vous participez au dispositif d’EAP (Emploi d’Avenir Professeur) dans l’académie de LYON et vous préparez le BAFA. En quoi ces 2 expériences ont conforté votre envie de devenir enseignante ?

J’ai toujours su que je voulais travailler avec des enfants ou des adolescents. C’est donc naturellement que j’ai décidé, à 16 ans, de passer le BAFA. Ce diplôme m’a permis de libérer toute ma créativité, m’a appris à faire preuve de patience et de souplesse. J’ai accompagné des tranches d’âges très différentes et j’ai alors ressenti le besoin de contribuer au développement de ces enfants et de leur découverte du monde.
J’ai ensuite eu l’opportunité de faire partie de la première vague de recrutement d’E.A.P. J’ai délaissé mon emploi dans l’animation pour découvrir réellement le milieu scolaire. Je voulais me confronter à cet environnement, ce public adolescent et avoir la confirmation que l’enseignement était fait pour moi. J’ai donné des cours de soutien à des petits groupes ce qui m’a permis de prendre la mesure des difficultés auxquelles sont confrontés les élèves mais aussi les professeurs dans la transmission du savoir. Malgré des moments difficiles, comme dans toute première expérience, j’ai compris que j’étais faite pour passer mes journées avec des élèves, dans des établissements scolaires. Ce genre d’expérience me semble indispensable pour tout étudiant voulant se destiner à l’enseignement. Il faut pouvoir prendre le temps d’être face à ce public, acquérir de l’expérience et bien réfléchir sur son orientation. Le dispositif E.A.P ou au moins des stages en établissement devraient selon moi être obligatoires et ouverts à tous (et pas seulement aux boursiers).

Après une licence, vous faites le choix de la préparation d’un Master de Littérature comparée. Dans ce cadre, vous bénéficier d’un programme Erasmus en Grèce. Quels ont été les points forts de votre séjour ?

Mon expérience en Grèce a été marquée par une grande ouverture culturelle. Les échanges entre nos pays m’ont permis de prendre du recul sur mon mode de vie et sur notre fonctionnement en France. J’ai eu la chance de participer à la mise en scène de l’Odyssée d’Homère entre étudiants Erasmus. Ce projet, comme ce semestre, m’ont apporté beaucoup de réponses sur la manière dont je voulais à la fois vivre avec les autres et transmettre mon goût pour l’échange culturel et la tolérance. Enfin, j’ai compris grâce à mon « Master Recherche » que je n’étais pas faite pour faire de la recherche seule en bibliothèque, loin des élèves, mais que ma place était bien dans l’enseignement à leur contact.

Vous avez également vécu, via le CIEP (Centre International d’Etudes Pédagogiques), l’expérience d’assistante à Atlanta. Quels souvenirs en gardez-vous ? Quel regard portez-vous sur le système éducatif aux Etats-Unis ?

Mon année en tant qu’assistante dans une « immersion school » (école d’immersion de langue) a été nécessaire dans ma construction personnelle et professionnelle pour me préparer au monde du travail et particulièrement à devenir professeur à part entière. En vivant aux Etats-Unis, j’ai appris à me débrouiller, à me confronter à un système éducatif très différent. En effet, l’école où je travaillais était une « charter school » c’est-à-dire qu’elle était semi-privée et dirigée par les parents d’élèves. Ce mode de fonctionnement avait ses avantages comme la possibilité de faire preuve de beaucoup de créativité en organisant des évènements grâce à un gros budget. D’un autre côté, la direction menée par les parents avait ses limites puisque ces derniers avaient une vision très subjective liée à la présence de leur enfant dans l’école. J’ai très vite perçu les limites du système éducatif américain. Tous les enfants n’ont pas accès à un enseignement correct et il faut souvent dépenser de l’argent pour avoir droit à un enseignement de qualité. J’ai compris la chance que nous avions, en France, d’avoir un enseignement public avec des moyens et des professeurs engagés et motivés pour la réussite de tous. C’est aussi pour cela que j’ai décidé d’enseigner dans le public en France et de ne pas rester vivre là-bas même si le niveau de vie des professeurs est bien supérieur aux Etats-Unis. Mais je préfère suivre mes valeurs et aider tous les élèves peu importe leur milieu.

Votre mémoire de stage de Master MEEF porte sur la déconstruction des stéréotypes de genre à travers la pratique du théâtre. Quels sont les objectifs visés et les premières conclusions ? Quels liens faites-vous avec le film « Marvin ou la belle éducation » ?

Dans mes premières expériences dans le monde du collège, j’ai été frappée par la pression que subissent les collégiens par rapport à leur identité, leur représentation auprès des autres et particulièrement leur identité sexuée. Ils se sentent obligés d’adapter un comportement adéquat avec leur sexe, garçon comme fille, et en viennent à avoir des attitudes stéréotypées. J’ai donc réfléchi à une manière d’aborder cette problématique avec mes élèves de 5ème dans le cadre du programme « Vivre avec autrui, amis, famille, réseau ». Il m’a semblé que l’étude et la pratique du théâtre pouvait être un levier intéressant pour ouvrir un véritable dialogue à la fois verbal et corporel entre eux et les aider à s’émanciper. J’ai découvert une pièce qui s’intitule « Mon frère, ma princesse » de Catherine Zambon que je vais étudier et jouer avec mes élèves. Il s’agit d’une pièce de théâtre jeunesse, un genre encore peu étudié et méconnu au collège. J’espère donc créer par ce biais des prises de conscience, une libération de mes élèves et une certaine cohésion grâce à la pratique collective du théâtre. J’ai découvert le film « Marvin ou la belle éducation » cette année qui reprend en partie la thématique du théâtre comme espace d’émancipation, de libération pour un jeune garçon qui se fait rejeter au collège parce qu’il ne correspond pas au stéréotype du jeune adolescent attendu par ses camarades.

Comment vivez-vous votre année de professeur-stagiaire ? Quels leviers d’améliorations voyez-vous dans l’organisation et le contenu de la formation offerte à l’ESPÉ et dans l’établissement ?

Cette année, je me sens parfaitement à ma place, sur une voie qui devait être la mienne depuis toujours. Évidemment c’est une année compliquée à gérer puisque nous sommes tiraillés entre notre statut d’étudiant de master 2 avec des cours à l’ESPÉ et d’un autre côté, celui d’enseignant avec les responsabilités, la posture et toutes ces choses nouvelles et ces difficultés que nous découvrons au quotidien avec nos élèves. Je m’épanouis davantage en classe, en pratiquant, en testant des choses, en apprenant de mes erreurs comme de mes réussites et en étant au contact de mes collègues et de ma tutrice. L’ESPÉ nous permet, professeurs stagiaires, de partager nos impressions, nos expériences et nos questions. Nous avons aussi la chance de recevoir des pistes pédagogiques (notamment avec l’utilisation du numérique) et des conseils de la part d’enseignants plus expérimentés. En revanche, il faudrait peut-être que notre formation nous propose des cours uniquement centrés sur notre pratique d’enseignement car les cours parfois trop théoriques et éloignés de notre pratique au quotidien ne semblent pas toujours répondre à nos besoins pour cette première année en tout cas.

Que nous diriez-vous de vos aspirations pour faire évoluer votre carrière d’enseignante ?

Je suis quelqu’un qui a besoin de sans cesse me renouveler, j’ai soif de nouvelles découvertes, d’apprendre, de me confronter à de nouvelles situations pour m’adapter et continuer à me construire. Je ne vois pas l’obtention du CAPES et l’entrée dans le monde professionnel comme une fin en soi mais plutôt comme une porte qui s’ouvre vers d’autres possibilités de formations, d’expériences et d’évolution. Je m’intéresse par exemple au dispositif relais présent dans mon collège. J’aimerais aussi partager mes idées, ma motivation et pourquoi pas en participant à des formations d’adulte. Je veux continuer à me nourrir de discussions avec d’autres collègues, d’échanges constructifs et de partage.

Derrière l’enseignante, il y a aussi une personne avec ses activités, ses passions, ses loisirs…Pourriez-vous nous parler de la dernière activité découverte et de ses atouts ?

Comme pour ma vie professionnelle, j’aime me diversifier dans ma vie personnelle et pratiquer toutes sortes d’activités. Je suis adepte des voyages, m’évader en avion mais aussi grâce au cinéma et à la lecture. Dernièrement, j’ai commencé à fréquenter une salle de sport. Je n’en avais jamais ressenti le besoin jusqu’à cette année mais il me fallait un espace de libération après les cours où je pouvais aussi me maintenir en forme. Un peu de sport pour se dépenser en fin de journée et pour se vider la tête me semble donc nécessaire.

Noémie DE SMEDT
Professeur Stagiaire de lettres modernes
Académie de BESANÇON

Le CPE et l’animation socio-éducative

Définie par la circulaire du 10/08/2015 comme l’une des responsabilités du CPE, l’animation socio-éducative au sein des établissements scolaires reste encore aujourd’hui reléguée au second plan. Pourquoi pouvons-nous faire ce constat ? Pourquoi est-il nécessaire que le CPE impulse des actions en matière d’animation socio-éducative dans les collèges et les lycées ?

Qu’est-ce que l’animation socio-éducative ?

Nous pouvons définir l’animation socio-éducative comme des temps de loisirs, des moments de vie collective qui permettent aux élèves d’échanger et de se socialiser. Elle encourage ces derniers à s’inscrire dans des projets favorisant l’autonomie et la prise d’initiatives […]

Quel est le rôle du CPE dans la mise en place d’animations socio-éducatives au sein des établissements scolaires ?

Si l’organisation des temps de loisirs doit mobiliser toute la communauté éducative, le conseiller principal d’éducation (CPE) reste un pilier indispensable dans cette action.
En effet, l’animation socio-éducative est une des responsabilités du CPE. Celle-ci doit le conduire à envisager des actions pour un « vivre ensemble démocratique » au sein de la vie scolaire. Pour cela, il doit tout mettre en œuvre afin d’entretenir des relations et des contacts directs avec les élèves sur le plan collectif et sur le plan individuel […]

Quels sont les effets bénéfiques de l’animation socio-éducative ?

Ils sont divers. Tout d’abord, l’animation socio-éducative favorise un climat scolaire plus serein et propice au travail car les élèves sont associés à la vie de l’établissement par l’intermédiaire, par exemple, de la prise en charge du foyer socio-éducatif ou de la maison des lycéens.
De plus, les actions éducatives renforcent la socialisation des individus en permettant de créer des contacts privilégiés entre élèves et personnels de la communauté éducative.
Par ailleurs, le système de représentation des élèves au sein des établissements initie les jeunes à la vie civique et démocratique, au sens des responsabilités et de la coopération.
Sur un plan pédagogique, les temps consacrés à l’animation éducative viennent en prolongement de la mission des professeurs et permettent de donner du sens aux enseignements.
Enfin, l’investissement des jeunes dans les actions éducatives permet un apprentissage différent de celui dans lequel ils sont parfois en échec et une valorisation des savoir-faire autres que purement disciplinaires […]

Pour terminer, quels peuvent être les obstacles à la mise en place d’animations socio-éducatives au collège et au lycée ?

Le premier obstacle concerne le manque de légitimité de l’animation socio-éducative au sein du système scolaire.
Celle-ci reste peu valorisée et entre en concurrence avec les temps d’enseignement.
Le second obstacle émane de l’investissement des acteurs de l’École, élèves comme adultes.
Pour terminer, le dernier obstacle fait référence au cadre spatial et temporel. L’absence d’espace et de salle, la journée continue et le fait de dépendre des transports scolaires pour certains élèves se révèlent être des freins à la mise en place d’actions éducatives […]

Pour aller plus loin, vous trouverez ici l’article détaillé. Bonne lecture !

Yoan DUFRENNE
Conseiller Principal d’Education
au collège Monsigny de Fauquembergues

Charlène, professeure d’espagnol stagiaire, témoigne…

Après le baccalauréat, vous décidez de vous orienter à la faculté de lettres de Besançon pour y suivre un parcours d’études universitaires en espagnol. Pourriez-vous nous dire ce qui est l’origine du choix de cette discipline ?

Mon choix pour l’espagnol était évident après le baccalauréat. Durant toute mon enfance, je me rendais très souvent en Espagne avec ma famille. J’ai donc été très tôt en lien avec le monde hispanique et d’années en années, j’ai découvert sa richesse culturelle. Je suis tombée sous le charme de ce pays et porte désormais un réel intérêt pour cette discipline. Par la suite, j’ai pensé à approfondir mes connaissances sur l’espagnol et à l’enseigner à des adolescents.

Durant la préparation de votre licence, vous vous impliquez dans un dispositif de tutorat en direction d’autres étudiants. Comment tout cela s’organisait-il ? Qu’est-ce que cette expérience vous a apporté ?

Pendant mon cursus universitaire (L3 et master 1), j’ai pu m’investir auprès des étudiants en tant que tutrice d’espagnol plusieurs fois par semaine. Ce dispositif que j’ai géré durant deux années consécutives, consistait à apporter de l’aide aux jeunes étudiants autant au niveau méthodologique que linguistique en lien avec l’apprentissage de l’espagnol.
Cet emploi à la faculté de langue m’a permis d’être confrontée pour la première fois à un public d’étudiants qui avait choisi d’approfondir leurs connaissances sur la culture hispanique et ayant un intérêt pour la matière. Pour cela, mon expérience en tant qu’ancienne étudiante les a d’abord beaucoup aidés dans leurs apprentissages puis ce premier contact professionnel a confirmé le fait que je voulais enseigner l’espagnol à des adolescents.

Après la licence, vous manifestez le désir de préparer le CAPES et de devenir enseignante. À quels facteurs attribuez-vous cette prise de décision ?

Oui, effectivement, j’ai décidé après la validation de ma licence d’espagnol de m’inscrire dans un master MEEF d’espagnol avec pour but l’obtention du CAPES et celui de devenir professeur d’espagnol. Un des facteurs de cette décision a été celui d’apprendre aux autres ce que j’avais appris pendant toutes ces années d’études universitaires très enrichissantes. La préparation au CAPES a été une épreuve très intense et pour cela je me devais de l’obtenir rapidement pour pouvoir pratiquer l’espagnol dans le secondaire, langue pour laquelle je porte un grand intérêt.

En tant qu’étudiante, vous avez été embauchée en tant que serveuse dans un restaurent. Quels souvenirs en gardez-vous ? Quelles sont les compétences développées pendant ce travail saisonnier ?

Oui, j’ai aussi travaillé en tant que serveuse dans un restaurant de Besançon à la fin de mes années d’études car il fallait bien gagner un peu d’argent !! Je garde en mémoire une expérience enrichissante dans un domaine qui était pour moi inconnu. En tant que serveuse, j’ai particulièrement apprécié le contact avec les clients, un contact qui me rappelle celui du professeur avec ses élèves c’est-à-dire une relation de bienveillance et de partage principalement. C’est un métier où l’on doit s’occuper de plusieurs choses à la fois comme le professeur qui doit gérer sa classe. Il s’agit de deux métiers complètement différents mais qui se rejoignent dans certaines compétences.

Fonctionnaire-stagiaire cette année, quel regard portez-vous sur la formation suivie à l’ESPÉ ? Quelles sont, selon vous, les points d’amélioration prioritaires à envisager ?

Exactement, je suis fonctionnaire-stagiaire depuis la rentrée 2017 dans un lycée polyvalent, ce qui signifie que je suis mi-enseignante et mi-étudiante, un rôle compliqué à endosser puisqu’il faut concilier travail à l’ESPÉ et préparation des cours pour le lycée. Une double fonction dans laquelle il me semble difficile de se donner à 100% puisqu’il faut sans cesse s’organiser pour gérer au mieux les obligations des deux parties. Mais, si les conseils de l’ESPÉ sont très précieux lors de cette première année d’enseignement, ce que nous apprenons lors des nombreuses formations n’est pas si facile à appliquer sur le terrain et un écart peut apparaître entre la théorie et la pratique.
L’ESPÉ est aussi le lieu où nous nous retrouvons pour échanger avec les collègues sur des questions diverses auxquelles nous pouvons apporter des réponses. C’est donc un espace d’échange et d’accompagnement dont un professeur stagiaire a particulièrement besoin lorsqu’il débute dans l’enseignement, c’est une grande aide.
Si je devais évoquer une amélioration, ce serait celle des nombreuses formations communes transversales que suivent les fonctionnaires stagiaires et qui sont difficiles à appliquer en réalité en classe d’espagnol (comme le parcours artistique et culturel).

Votre exercez à mi-temps dans un lycée polyvalent depuis le mois de septembre. Quels points communs et quelles différences imaginez-vous entre l’exercice du métier en lycée et en collège ?

J’enseigne à mi-temps dans un lycée général et technologique cette année mais durant mon année de master 1, j’ai découvert l’enseignement au collège à travers des stages d’observation et de pratique. J’ai constaté certaines différences. La première est celle de l’accompagnement des élèves qui est plus important au collège car nous devons préparer les élèves à devenir des êtres autonomes, l’autonomie étant une compétence nécessaire au lycée. De plus, la préparation des cours au collège doit être plus ludique pour intéresser davantage les élèves, ce qui demande en amont plus de temps pour préparer les activités adéquates. En ce qui concerne le lycée, ce qui est de plus en plus demandé en langue vivante est l’argumentation des élèves et l’approfondissement des connaissances puisqu’au collège, nous insistons davantage sur la mémorisation.
Mais que ce soit au collège ou au lycée, il est important d’intéresser les élèves et de toujours les surprendre lorsque nous faisons cours en variant les activités. Enfin, être face à un public d’adolescents nécessite d’être très attentif et de guider au mieux les élèves.

Parmi vos centres d’intérêt, il y a…la zumba ! Le choix de cette activité est-il lié à votre passion pour la langue hispanique ? Envisagez-vous un jour d’animer un club zumba dans l’un de vos futurs établissements ?

Depuis plusieurs années, je pratique une activité sportive qui est la zumba. La décision de ce sport est surtout un moyen de se détendre et de se défouler une fois par semaine après le travail au lycée ou à l’ESPÉ. Il s’agit aussi d’un moment d’épanouissement personnel dans lequel je peux oublier mes obligations quotidiennes et ainsi penser à autre chose.
Concernant un possible projet d’animation d’un cours de zumba dans mon parcours à venir est une excellente idée puisqu’il s’agira d’une activité mêlant culture latine et pratique sportive. Un travail interdisciplinaire pourrait être alors effectué par exemple au collège.

Charlène Bourgeois
Fonctionnaire-Stagiaire d’espagnol
Académie de Besançon

CPE et propriétaire d’une galerie d’art, Lisa nous raconte…

Parlez-nous de ce projet original qui a consisté à ouvrir une galerie d’art dans une commune de Haute-Saône : comment est-il né ? Depuis combien de temps ? Comment le nom de votre galerie a-t-il été trouvé ?

Je suis passionnée par l’art et en particulier par la photographie. J’ai pratiqué cette activité et fait fonctionner des ateliers de pratiques artistiques avec des élèves afin de les amener à réfléchir sur l’art en visitant des expositions et des musées.

J’ai acheté une maison, un ancien relais de poste. Il y avait une ancienne pharmacie que j’ai transformé en galerie ART CADUCÉE en 2014. Le nom vient du caducée qui est inclu dans le carrelage de la devanture. Pour moi, l’art est un remède et l’idée d’utiliser la symbolique d’Hermès vers la concorde me plait.

Quelles sont vos motivations principales pour vous investir dans un tel projet ?

L’art en milieu rural est un challenge : il faut le proposer dans nos villages car les habitants ne se déplacent pas toujours vers les lieux de culture urbains par manque d’habitude ou par réserve. Je tenais à participer à cet accès à la culture pour tous dans le monde rural.

Comment choisissez-vous les œuvres d’art que vous exposez ? Suivez-vous une thématique particulière, des critères définis ou fonctionnez-vous plutôt « au fil des rencontres d’artistes  » ?

Les artistes qui souhaitent exposer proposent leurs créations, expliquent leur travail et leur passion. C’est une rencontre artistique, qui prend ou pas, et ainsi une aventure qui commence, un partenariat, un défi. Nous sommes partenaires avec l’artiste et décidons du projet à mener, pour une période donnée, ensemble. La convention-bail pour le dépôt des œuvres est peu chère pour une période de 6 semaines et l’esprit de la galerie est plus solidaire que lucratif. Ma démarche s’inscrit dans une volonté de démocratisation culturelle.

Votre projet s’inscrit-il dans un dispositif culturel en lien avec d’autres partenaires ou associations ou bien s’agit-il davantage d’une initiative individuelle ?

Mon initiative individuelle est soutenue par la commune, l’office de tourisme et la presse locale. Je m’associe à d’autres espaces culturels locaux ou extérieurs. Internet est également un moyen très performant pour développer mon activité.

Comment articulez-vous votre passion et votre vie de CPE ? Est-ce 2 domaines bien distincts ou faites-vous des ponts entre les deux ? lesquels ?

Je m’occupe de ma galerie sur mes temps libres et suis CPE dans ma vie professionnelle, les deux sont indissociables car ils sont en moi. « L’art-chéologie », mon jeu de mots, signifie que c’est ma formation et la photographie qui m’ont amenée à appréhender l’homme à travers ses témoignages. Parallèlement, mon métier de CPE me fait entrevoir dans la jeunesse une promesse d’avenir et la possibilité de partager mon regard sur l’environnement.

Éveiller, avec l’Art, la curiosité pour susciter l’intérêt est mon cheminement éducatif et culturel. Notre métier y participe, notamment dans les projets d’établissements et l’animation socio-culturelle.

Qu’est-ce que l’art vous apporte et peut apporter dans un métier relationnel comme le vôtre ? Diriez-vous que l’approche artistique vous a ouvert à d’autres dimensions dans la relation à vos élèves ? aux autres adultes de l’établissement ?

L’art apporte un dépaysement, un autre regard, une capacité d’analyse et de tolérance. La relation aux autres est fatalement développée par des confrontations. L’art permet de regarder le monde au-delà des apparences et des idées reçues, de s’ouvrir à l’autre et d’accepter les différences.

Lisa Boussakhane,
CPE dans un Lycée Professionnel Hôtelier de Haute-Saône

Jeanne prof de lettres-anglais en lycée pro est devenue coordonnatrice de classe-relais

Vous avez débuté votre carrière en tant qu’enseignante de la discipline lettres-anglais en lycée professionnel. Comment avez-vous réussi, pendant une douzaine d’années, à susciter l’intérêt et la participation des élèves et à lutter contre le décrochage scolaire ?

Je n’ai pas toujours réussi à susciter l’intérêt des élèves, loin de là ! J’ai parfois réussi, d’autres fois, pas du tout. Je pense qu’il faut rester humble à ce sujet. Il a fallu aussi que j’apprenne à connaître mon propre mode de fonctionnement en tant qu’enseignante : tous les enseignants n’enseignent pas de la même manière, n’ont pas la même posture, et ne sont pas « touchés » par les mêmes choses. Il est important d’en prendre conscience. J’ai beaucoup appris tout au long de ces années passées dans l’Éducation Nationale. Par contre, malgré certains moments de doutes ou de fatigue, j’ai fait de mon mieux pour encourager les élèves à se remettre dans une dynamique de travail, à avoir confiance en leurs capacités, et surtout à repenser leur futur d’un œil plus optimiste et bienveillant. J’ai également essayé de leur faire comprendre que si la réussite pouvait être à portée de main, il fallait se démener un peu pour atteindre certains objectifs.
Il est vrai que les élèves qui nous arrivent en Lycée Professionnel ont trop souvent une opinion très négative d’eux-mêmes et rencontrent parfois des problématiques personnelles difficiles et palpables ; il me semble que l’enseignant qui se trouve devant eux se doit de les encourager de manière à la fois positive et réaliste : si on veut réussir, on s’en donne la peine, au risque de se tromper ou d’échouer, mais pas toujours ! Donc mon enseignement de l’anglais et du français a eu pour objectif de remobiliser les élèves sur leurs apprentissages, sur les programmes officiels (en variant les supports et en proposant des outils de remédiation afin de ne pas les noyer dans de nouvelles difficultés et de les faire progresser) ; il s’est en parallèle appuyé sur un travail autour de l’estime de soi. Mais il me semble que beaucoup de mes collègues de LP (ou travaillant en éducation prioritaire) travaillent dans ce sens.
Il a également été nécessaire d’instaurer un climat de confiance entre les élèves et moi, d’instaurer un respect mutuel. Pour que les élèves ne « bloquent » pas sur mes matières, il a fallu leur faire comprendre que je n’étais pas là pour les juger de manière hautaine. Que j’étais là pour les aider à apprendre et à progresser. Qu’aucune question n’était idiote. Cela peut paraitre évident pour certains, mais sur le terrain, on se rend vite compte qu’à un moment donné de leur vie « d’élève », la confiance en l’adulte a été quelque peu remise en question.
Dès le début de ma carrière, j’ai repensé à ce que mon grand-père disait parfois : « Entreprends sans crainte, tu réussiras. » C’est peut-être une chance.

Recrutée ensuite sur un poste à profil, vous vous lancez le défi d’exercer dans un collège de l’éducation prioritaire. Vous faites le choix d’adapter votre enseignement à la diversité des élèves et de concevoir les outils pédagogiques innovants. Quelles ont été vos motivations pour postuler sur ce poste ? Pouvez-vous nous en dire plus sur l’approche pédagogique que vous défendez ?

J’ai été TZR plus d’une dizaine d’années, et bien qu’aimant énormément mon travail, je me suis rendu compte qu’obtenir un poste fixe non loin de chez moi relevait un peu du rêve lointain et inaccessible… et c’est difficile de proposer des projets lorsque l’on ne sait pas dans quel établissement l’on sera l’année suivante. J’ai également ressenti le besoin de changer de public, de changer tout simplement. J’ai donc rencontré à deux reprises un conseiller mobilité carrière qui m’a parlé de ces fameux postes ECLAIR. Et j’ai postulé. Nouveau challenge : un collège ECLAIR (devenu REP+), avec des élèves plus jeunes, et peut-être plus remuants. La première année a été une année de test : donc assez difficile, je ne le cache pas. Et comme je l’ai dit précédemment, j’ai une manière d’enseigner qui m’est propre (beaucoup d’oral notamment, et j’ai, par exemple, besoin de dynamisme dès le matin à 8h00, je n’y peux rien !). Il a donc fallu que les élèves s’adaptent à moi, retravailler sur ce climat de confiance et de respect mutuel dont je vous parlais tout à l’heure, et montrer à ces élèves ce qu’ils pouvaient accomplir avec un peu de travail et de sérieux… et d’envie.
En ce qui concerne les outils pédagogiques utilisés, n’arrivant absolument pas à travailler en anglais avec un manuel et un workbook tout au long de l’année (si l’on doit stimuler les élèves, il faut se stimuler soi-même ! ), j’ai expérimenté diverses choses : projets eTwinning avec des collèges d’Italie, de Norvège, d’Angleterre et ouverture de twin spaces pour les échanges. Là aussi, il y a eu quelques couacs mais aussi de belles réussites : et finalement, les élèves ont à ces moments-là su faire preuve de bienveillance envers leur professeur !
J’ai également proposé à tous mes élèves, quelles que soient leurs compétences en anglais (donc même à mes élèves de SEGPA que j’aimais particulièrement) d’écrire à des correspondants en Europe. Quand les collègues partenaires parvenaient à jouer le jeu, cela motivait mes élèves doublement. Ils ont de plus compris que l’anglais leur permettrait d’échanger avec des personnes provenant de toute l’Europe.
Avec mes collègues enseignants de SEGPA, nous avons proposé un voyage scolaire de quelques jours en Écosse à nos élèves de 3è générale de REP + et aux élèves de 3è SEGPA : ce projet « inclusif » a été, à mes yeux, une merveille. Pas grâce à nous, enseignants, mais grâce à l’implication et la maturité dont ont fait preuve nos élèves. Chacun a su trouver sa place dans le groupe, même les plus timides, les moins débrouillards, les moins impliqués lors des cours « en classe ».
L’ouverture sur l’extérieur et l’inclusion de tous les élèves me semblent être indispensables : cela permet de donner un sens à certains apprentissages, cela permet de vivre ensemble, dans le respect. Il me semble que ce sont des valeurs défendues par la République, et je crois en ces valeurs, même si je sais qu’elles sont trop souvent bafouées ou méprisées.
Le dynamisme et l’expérimentation me paraissent également primordiaux dans notre métier, même lorsque l’on se trompe : si cela est bénéfique pour les élèves, ça l’est pour l’enseignant.

La richesse de votre parcours témoigne de votre attachement à une conception transversale de l’enseignement et à une vision systémique de l’École. Quel regard portez-vous sur la réforme du collège qui a accouché de la loi de refondation ? En quoi le travail au sein d’équipes pluridisciplinaires vous semble-t-il aller dans le bon sens ?

L’École doit avoir un sens pour les élèves, pour les parents et les enseignants (et CPE, etc) aussi. Si les apprentissages sont systématiquement cloisonnés, quel sens peuvent-ils réellement avoir ? La pédagogie de projet, le socle commun de compétences vont dans ce sens : il est bon d’expliquer aux élèves quelles compétences sont mobilisées selon les objectifs visés, afin qu’ils puissent réellement visualiser ce qu’ils savent faire et qu’ils puissent remobiliser toutes ces compétences par la suite, pour de nouvelles tâches. Le travail au sein d’équipes pluridisciplinaires peut tout à fait être enrichissant, à la fois pour les adultes et les élèves. Il me semble cependant que ce travail ne peut fonctionner que si chaque intervenant est convaincu des bienfaits et de la pertinence de tels projets. Pour ma part, et notamment au sein du dispositif relais, je pense que l’échange entre les différents intervenants permet de mettre en place des projets stimulants, et permet davantage de dynamisme.

Depuis la rentrée 2017, vous êtes coordinatrice d’une classe-relais qui accueille des élèves en phase de décrochage. Quels sont les principaux partenaires avec lesquels vous êtes en contact au quotidien ? Quelles sont vos impressions après deux mois dans cette nouvelle « peau » professionnelle ?

Nous avons un partenariat avec la PJJ. L’intervention en dispositif relais de l’éducatrice et de L’AS PJJ consiste notamment à :
assurer le lien avec les familles (par des visites à domicile, des rencontres avec les parents au collège d’origine du jeune) afin de les (re)mobiliser autour de la scolarité de leur enfant, dans un climat de bienveillance ; rencontrer le jeune sur des temps individuels, ce qui n’exclut pas ponctuellement des interventions en petits groupes ou autre, afin d’identifier et évaluer les éléments relatifs à sa personnalité, à sa situation familiale, scolaire et environnementale. Leur champ de compétence est l’accompagnement éducatif auprès du jeune et de sa famille.

Ce partenariat permet un échange d’informations des plus intéressants. Nous pouvons croiser les regards des membres de l’équipe du DR (une équipe pluridisciplinaire !) afin d’élaborer des stratégies éducatives adaptées à la situation de chaque jeune pour lui permettre de reprendre goût à sa scolarité et d’éviter le décrochage.

Avec votre personnalité positive et inventive, tout porte à croire que le poste que vous occupez actuellement ne sera pas le dernier de votre carrière. Quelles sont vos envies, vos projets, vos aspirations à moyens termes ?

Mes projets ? Je souhaiterais me former à la médiation par l’animal afin de pouvoir aborder certaines problématiques de manière différente. Ce projet correspond tout à fait à ma vision de ce que peut offrir le système éducatif : une approche différente, mais toujours bienveillante. Et aller travailler avec son animal, quel bonheur, n’est-ce pas ?
Les problèmes présentés par les élèves concernés par le dispositif relais sont les suivants : absentéisme non justifié, problèmes de comportement, refus de travail, non respect des règles de vie de l’école, extrême passivité dans les apprentissages instaurant un processus d’échec et d’abandon ; les dispositifs relais contribuent donc à la prévention et à la lutte contre le décrochage scolaire.
Les objectifs du dispositif sont notamment d’aider les élèves inscrits à reprendre confiance en eux ; recréer des liens positifs avec le système scolaire (à la fois pour le jeune et pour sa famille); apprendre à mieux vivre en société. La médiation par l’animal pourrait nous être d’une aide précieuse. J’en suis convaincue.

Je souhaiterais également me rendre dans différents pays afin d’apprendre de nouvelles approches éducatives. Échanger, se questionner quand on fait un tel métier : cela me semble important, et stimulant !

Jeanne Antczak – Coordonnatrice de classe-relais

Manon, ex AED maintenant prof stagiaire en éco-gestion, nous raconte son parcours…

Trois ans avant de réussir le concours, vous avez exercé la fonction d’assistante d’éducation dans un lycée de Metz. Comment définiriez-vous les compétences acquises au sein du service de vie scolaire ?

Cette première expérience au sein de l’Éducation Nationale m’a permis d’acquérir de nombreuses compétences.
J’ai pu apprendre comment assurer l’encadrement des élèves, et particulièrement des élèves en difficulté, pendant les heures d’études proposées le soir en chambre ou en salle d’étude. J’ai pu accompagner les élèves dans leur comportement scolaire et personnel. En effet, de nombreux élèves avaient besoin de s’exprimer, et bien évidemment qu’on les aide et qu’on les écoute. J’ai également appris à utiliser le logiciel Pronote et à veiller aux absences de certains élèves.
J’ai également pu donner de nombreux conseils aux différents élèves de l’internat, notamment au niveau scolaire mais aussi personnel. Apprendre à se maitriser (niveau comportemental et émotionnel), apprendre à être organisé, apprendre à parler en public, apprendre à s’exprimer dans un langage adapté.
C’est le métier d’assistante d’éducation pendant mon master de droit qui m’a poussé vers la voie du professorat. C’est pendant notamment les heures d’études que j’ai pu aider de nombreux élèves en section STMG, ES et c’est ce qui m’a conforté dans ce choix de métier. Les élèves me disaient « vous arrivez à bien nous expliquer et vous prenez le temps, et surtout vous trouvez des mots simples pour expliquer des choses difficiles qu’on n’arrive pas forcément comprendre en cours ». C’est donc grâce à ces interventions en étude mais également au BVS par le biais des différents échanges avec les professeurs et les élèves que je me suis dirigée vers cette profession.

Les débouchés après des études de droit sont particulièrement nombreux (magistrat, greffier, avocat, huissier…). Pouvez-vous nous dire quelles ont été vos profondes motivations pour avoir choisi la discipline d’éco-gestion en particulier ?

C’est vrai qu’après des études de droit de nombreuses voies et possibilités sont offertes. Cependant, mon choix s’est tourné vers le professorat puisque dans le passé j’ai eu la chance d’avoir des professeurs qui m’ont apporté beaucoup d’aide et de soutien et qui m’ont poussée vers la réussite et le dépassement de moi-même. Notamment une de mes professeurs d’économie-droit que j’ai eu l’occasion de revoir durant mon stage de M1 MEEF au sein du lycée Robert Schuman à Metz qui m’a fait apprécier tout particulièrement cette matière. Pour moi, être professeur d’économie-gestion ne signifie pas seulement la maîtrise d’une seule matière comme la plupart des autres professeurs. Notre discipline est large, c’est pour cette raison que je l’ai choisie. Nous pouvons enseigner diverses matières, c’est pour moi un privilège que seuls les professeurs de cette discipline possèdent. Enseigner l’économie, le droit, la gestion, l’accueil, la vente, le commerce, le marketing et le management sont pour moi des disciplines essentielles que tous les citoyens français devraient connaitre a minima pour avancer dans leur carrière professionnelle. Toutes ces matières reprennent des choses essentielles que le citoyen français, et même étranger, est amené à rencontrer.

Fonctionnaire stagiaire depuis quelques semaines, vous êtes déjà largement investie dans la vie de l’établissement mais également dans le dispositif national « les cordées de la réussite ». Quels sont les objectifs de ce dispositif ? Quelles actions concrètes envisagez-vous localement ?

Pour mon projet universitaire en DU cette année, je dois mettre en place un projet tutoré. Pour ma part, lors de l’intervention de présentation « les cordées de la réussite », mon choix a tout de suite été celui d’y entrer. Aider ces élèves de REP et REP+ est l’un de mes objectifs. En effet, lors de mon parcours scolaire de nombreux camarades de classe étaient issus de quartiers défavorisés, ils n’étaient pas toujours tous motivés à travailler pourtant tous les professeurs leur disaient « vous avez du potentiel ne le gâchez pas ! ». Et c’est pour cette raison que je me suis inscrite pour intégrer cette cordée. En tant que professeur, je souhaite que les élèves qui ont le moins de chances de réussir puissent réussir comme les autres. Comme en témoigne mon parcours scolaire, je suis énormément attachée à l’égalité des chances et la justice.

Vous avez impliqué une classe de première à la remise des trophées sportifs de la ville de Vesoul. Quelles sont les raisons qui vous ont amenée à faire ce choix ? Quelles ont été les missions confiées aux élèves ? Quels effets a eu cette participation dans le fonctionnement du groupe-classe ?

Une prof en économie gestion m’a signalée qu’elle organiserait comme chaque année avec ses classes de premières et terminales l’accueil de nombreux évènements tout au long de l’année. C’est avec beaucoup de volonté et de plaisir que je lui ai demandé de pouvoir y participer avec elle. Mettre en pratique les enseignements faits en classe me semble important, et aussi de pouvoir partager des moments « professionnels » avec les élèves afin de les découvrir d’une autre manière et de pouvoir me rendre compte que ce que j’enseigne leur sert dans la vie de tous les jours.
Les élèves ont dû accueillir 350 personnes conviées à la cérémonie en surlignant sur une liste d’émargement les personnes entrant au sein de la salle Parisot à Vesoul. Ensuite les élèves ont préparé, avec mon aide les verrines, brochettes, mauricettes et mignardises et les ont amenés en salle en les plaçant sur les assiettes des invités.
Le métier d’hôtesse d’accueil et les enseignements ont pu être mis en œuvre lors de cette cérémonie.

Comment voyez-vous la suite de votre carrière ? Quelles sont vos aspirations à moyens termes ?

Je souhaiterais réellement m’investir dans l’Éducation Nationale. Je vous fais partager mes aspirations à moyen et long termes :  intervenir auprès de jeunes adultes, au sein de la faculté avec des élèves en poursuite d’études supérieures (BTS et DUT) et également  former de futurs professeurs en leur apportant tous les conseils et aides que je pourrais leur fournir. J’aimerais également intervenir auprès de l’inspecteur pour lui apporter mon aide notamment au niveau des stages des élèves en lycée professionnel.

Manon Konieczny – Professeur stagiaire d’Eco-Gestion
LP Pontarcher – VESOUL (70)

La vie trépidante d’une Enseignante Référente !

J’assume depuis plus de 10 ans les fonctions d’Enseignante Référente pour les Elèves en Situation de Handicap. J’ai vu les missions évoluer, la charge de travail augmenter, les incompréhensions accroître … et je souhaite contribuer à mieux faire connaître cet être étrange qu’on nomme ER.

Décrire une « journée type » … Exercice Refusé … ça n’existe pas !

Enseignant Référent, ER, rime au quotidien avec :

  • Engagement Reconduit chaque jour … au service des élèves en situation de handicap, de leurs parents, de leurs enseignants.
  • Echanges Rencontres, Ecoute Réflexion … avec les équipes pédagogiques, les partenaires, les familles, la direction académique, la MDPH.
  • Enthousiasme Renouvelé … chaque fois qu’une situation se « débloque », qu’un élève voit son parcours scolaire adapté à ses besoins spécifiques, qu’une famille se trouve soulagée, que des collègues se sentent soutenus et que notre société avance en matière de prise en compte du handicap.
  • Emploi du temps Remanié … au hasard des sollicitations, imprévus, urgences qui supposent chamboulement, ajout, report.
  • Energie Ressources … indispensable pour anticiper les attentes, programmer, préparer, mener les réunions d’ESS, répondre aux questions, rédiger les comptes-rendus, rassembler les éléments des professionnels pour transmettre à la MDPH … faire face.
  • Ethique Respectée … dans toutes les actions et interventions.
  • Excellente Routière … se déplace d’école en collège, de collège en lycée, de lycée en établissement spécialisé souvent contrainte à des Ecarts Rocambolesques d’une situation à l’autre : à 9h00 en collège pour un jeune dyslexique, à 11h00 en école maternelle pour un petit autiste, l’après-midi en lycée pour une autre problématique … Evacuer toute Routine.
  • Equilibre du Régime … sandwich dans la voiture entre deux établissements, salade vite faite pendant une synthèse avec les psychologues, fruit devant l’ordinateur et parfois, quand-même, repas complet au self du collège.

L’ER a un bureau ou plutôt une salle de transit. Il n’use pas son fauteuil … pas le temps de s’éterniser. Il y passe, de bonne heure le matin, écoute les messages téléphoniques, lit les mails, établit la liste des choses à faire qui en découlent, prépare la pile de dossiers du jour, commence un compte-rendu, s’aperçoit qu’il est en retard pour sa tournée d’ESS … laisse tout en plan, court, roule … revient, reprend où il en était … mais doit repartir … finit par y revenir, en fin de journée, souvent tard, dépose les dossiers du jour, prépare ceux du lendemain … et prend un peu de boulot pour la maison, histoire de ne pas perdre l’Entrainement et le Rythme.

Quand l’ER peut se poser dans son bureau, c’est le champion de la multitâche ! 2 choses à la fois …. Même pas peur ! … au risque d’Entraver le Résultat.

L’ER partage avec ses collègues une Envie Refoulée : celle de pouvoir travailler sereinement, effectuer une tâche après l’autre, prendre le temps de se rendre plus disponible … sans être Envahi de Remords parce qu’il ne peut pas tout faire.

Si bien que l’ER c’est aussi l’Epuisement Récurrent … physique, moral…. S’arrêter ? … difficile. Toute absence potentielle est synonyme d’Enervement au Retour car pendant qu’il se repose, tout s’accumule !

Malgré tout, l’ER reste un Enseignant Rassuré par la confiance qu’on lui accorde et la reconnaissance qu’on lui montre.

Alors l’ER, en Eternelle Recherche de perspectives meilleures – charge de travail supportable permettant la satisfaction professionnelle du devoir accompli pour chacun des élèves dont il est en charge du suivi de la scolarité et auprès de chacun des collègues concernés – montre son Entêtement Réaffirmé à faire entendre l’urgence de la prise en compte de ses conditions de travail par l’administration.

Je garde mes Espoirs et mes Rêves … même si je semble parfois Enragée et en Révolution.

Sandrine HURPIN, Côtes d’Armor

 

Collègues référents, n’hésitez plus ! Vous aussi témoignez de votre quotidien.
À envoyer à cette adresse, votre témoignage sera publié après acceptation de la rédaction. 

Transformer des collégiens « décrocheurs » en « raccrocheurs » c’est le défi relevé par Alexandra

Alexandra Piton-Ducher, CPE dans l’académie de Rouen est en charge des élèves décrocheurs dans son collège, elle témoigne…

On estime à environ 10% le nombre d’élèves en situation de décrochage scolaire avéré dans notre pays. Quelle est votre définition de l’élève décrocheur ? Quelles sont les causes majeures qui sont à l’origine du décrochage ?

L’élève décrocheur est un élève en rupture avec le système scolaire et qui n’y trouve plus sa place ; cela peut se traduire par de l’absentéisme, de multiples exclusions de cours, allant jusqu’à un ou plusieurs conseils de disciplines. Il y a aussi l’élève décrocheur passif, présent physiquement en classe mais absent des apprentissages.

Quant aux causes du décrochage, elles sont multiples ; elles peuvent être liées au jeune lui-même, au contexte familial et social, à la précarité, aux difficultés scolaires accumulées. Le décrochage est un phénomène complexe qui appelle une diversité de réponses.

Considérez-vous que ce soit à l’élève de s’adapter à l’École ou bien à l’institution scolaire de s’adapter aux besoins des jeunes en difficultés ?

S’agissant des jeunes en situation de décrochage, il me paraît primordial de construire avec chaque jeune un parcours, un projet personnalisé. L’institution ne peut plus apporter la même réponse à tous les élèves. Des aménagements sont indispensables et des partenariats sont à développer.

Quels sont les leviers mis en œuvre dans votre établissement pour prévenir et remédier aux situations de décrochage ? Comment transformer un décrocheur en « raccrocheur » ?

Nous avons renforcé le maillage pour repérer les premiers signes de décrochage (absentéisme perlé, nombreux passages à l’infirmerie, exclusions de cours, passivité en classe) ; les enseignants et les assistants d’éducation sont bien sûr associés à tout ce repérage.
De plus, la commission de suivi des élèves réunit chaque semaine la CPE, l’APS (assistant prévention sécurité), l’infirmière scolaire, l’assistante sociale, la psychologue de l’éducation nationale, le directeur de SEGPA, les chefs d’établissement et un éducateur de prévention. Elle permet de croiser les informations et d’améliorer la réactivité des différents professionnels.
Nous avons ainsi pu proposer, l’année dernière, aux familles de certains élèves de 6ème et de 5ème un dispositif expérimental pour leur permettre de reprendre de l’assurance, de travailler sur l’estime de soi.

Pour remédier aux situations de décrochage, il ne suffit pas de signaler aux autorités académiques les élèves absentéistes. Le travail entrepris avec le jeune, sa famille, les éducateurs est essentiel pour restaurer la confiance et l’envie de revenir au collège. Les parents eux-mêmes peuvent avoir eu un passé difficile avec l’école. Aussi, il importe de bien les accueillir, de prendre le temps de travailler ensemble le projet du jeune. Nous devons tous travailler dans le même sens ; cela peut prendre du temps, beaucoup d’énergie, mais cela en vaut la peine. Lorsqu’un élève décrocheur nous fait confiance, reprend confiance en lui, réussit à se remotiver, à revenir dans les apprentissages, à préparer un diplôme et à investir un projet d’orientation, cela constitue une vraie réussite non seulement pour le jeune et sa famille mais aussi pour l’institution.

Avez-vous été confrontée à des obstacles ? Lesquels ? Comment les avez-vous dépassés ?

Le jeune lui-même, son contexte familial peut être un obstacle.
Pour un élève décrocheur, il est très difficile de respecter un emploi du temps, de se lever le matin, d’être confronté à ses difficultés scolaires. Les éducateurs sont des alliés essentiels pour accompagner le jeune dans ce processus ; ils peuvent se rendre au domicile et le ramener au collège par exemple.

S’agissant de la remédiation scolaire, nous avons eu la chance de recruter une assistant pédagogique, qui a travaillé au SISP (service d’insertion socio professionnelle) ; elle a un contact facile avec les jeunes, et ce, toujours dans la bienveillance. Elle les réconcilie avec les apprentissages, le français notamment et leur permet de préparer le CFG (certificat de formation générale).

Rien n’est jamais gagné d’avance, l’important n’est pas l’objectif mais davantage le chemin parcouru pour y arriver.

Le Ministère a mis en place en 2010 un système d’informations partagées entre les acteurs de la formation initiale et de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes en situation de décrochage. Qu’en pensez-vous ? Comment pourrait-on l’améliorer ?

Les outils mis à disposition pour faciliter les échanges d’informations concernant les élèves décrocheurs voire décrochés me paraissent essentiels pour améliorer la réactivité et optimiser l’accompagnement de ces jeunes.

Malheureusement dans notre BEF (bassin éducation formation), les référents FOQUALE (Réseaux Formation Qualification Emploi) de collège (majoritairement des CPE) ne sont plus réunis. Ils n’ont plus accès à la liste des élèves décrochés et n’ont donc plus à la renseigner. L’accent est désormais mis sur les référents FOQUALE de lycée. Je trouve cela regrettable de se priver des informations en provenance des collèges, surtout lorsque que l’on connaît tout le travail effectué par les équipes dans le cadre de la liaison école/collège.

En quoi l’identité professionnelle du CPE le rend légitime pour occuper la fonction de « référent décrochage » ?

Véritable interface au sein des établissements scolaires, le CPE apparaît plus que légitime pour assurer la mission particulière de référent décrochage. Il est effectivement le plus à même de coordonner l’action des différents professionnels, dispositifs, partenaires qui contribuent à cette mission. Cela a cependant un effet pervers : le manque de reconnaissance de cette mission particulière lorsqu’elle est assurée par un CPE. L’IMP correspondante est très régulièrement source de négociations dans les établissements scolaires, la dite indemnité servant de variable d’ajustement à la répartition.