Enseignement « Sciences Numériques et Technologie » : l’expérience d’une professeure documentaliste

Alexia est en poste au lycée René Cassin à Arpajon depuis 2 ans. Le SE-Unsa lui a posé quelques questions sur l’enseignement des sciences numériques et technologie, apparu avec la réforme du lycée, dans lequel elle intervient pour la 2ème année.

Quel est ton parcours professionnel ?

Après avoir obtenu une licence en Sciences du Langage, Information et Communication et un premier master dans le domaine de l’Édition, j’ai eu le sentiment de ne pas aller au bout des choses. J’avais besoin de donner un sens à ce que j’avais appris, j’avais besoin de transmettre. Ainsi, je me suis dit « et pourquoi pas prof ? ». Lycéenne, j’admirais certaines de mes professeures : cette faculté qu’elles avaient à se passionner pour leurs métiers, les nombreux savoirs qu’elles possédaient… Tout cela me fascinait ! Alors j’ai commencé à m’intéresser au métier de professeur-documentaliste, qui est un parfait mélange de plusieurs missions, qui regroupe mes centres d’intérêts comme la lecture, le numérique, la culture sous toutes ses formes. 
Je me suis donc, relancée, dans un master MEEF Documentation à l’ESPÉ de Limoges. J’y ai reçu une formation de très bonne qualité, avec des formatrices bienveillantes et très professionnelles. Puis, une fois le CAPES en poche, j’ai enseigné au collège Jean Monnet, de Bénévent-l’Abbaye en Creuse et j’ai été mutée, en Île de France, dans l’Essonne.

Quelle place occupes-tu dans ton établissement ?

Le lycée René Cassin est  un lycée général et technologique qui profite d’une équipe pédagogique performante et attentive aux besoins de ses élèves. De nombreux projets voient le jour et perdurent, c’est un établissement très ouvert à la diversité des profils, très accueillant . En tant que professeure-documentaliste, je profite d’une liberté pédagogique certaine. Ainsi, j’ai pu me faire une véritable place au sein des équipes disciplinaires. Le CDI est un lieu central que les élèves et professeur.e.s fréquentent régulièrement. EMI, SNT, culture, compétences numériques, webradio… en tant que professeure-documentaliste, je suis impliquée dans de nombreux projets pédagogiques et éducatifs!

Comment t’es-tu positionnée pour enseigner les SNT dans ton établissement ?

Il a fallu batailler un peu l’année dernière… Le fait que les professeur.e.s-documentalistes doivent « négocier » pour enseigner n’est pas nouveau. Mais c’est épuisant, à la longue. Pour les Sciences Numériques et Technologie (SNT), ce sont les collègues de mathématiques, chargés de cet enseignement, qui nous ont sollicités, mon collègue M. Warin (professeur documentaliste dans l’académie de Lille maintenant) et moi-même, sur le chapitre des réseaux sociaux. Nous avons donc informé notre équipe de direction de ce projet, pour lequel ils étaient réticents au départ.
Nous nous sommes donc réunis, les professeurs de mathématiques/SNT, l’équipe de direction et nous. Cette réunion nous a permis de présenter, à nouveau, nos fonctions, nos missions, de manière institutionnelle, en nous appuyant sur le cadre réglementaire. Suite à quoi, nous avons obtenu la possibilité d’enseigner auprès de 4 classes de seconde.
Constatant la pertinence de la place du professeur documentaliste dans l’enseignement de SNT, notre chef d’établissement est d’accord pour doubler le nombre de classes cette année. C’est donc une petite victoire, qui révèle bien la nécessité de faire connaître ou reconnaître nos droits et nos missions.
Nous sommes, je pense, dans un flou institutionnel et réglementaire qui peut, dans le pire des cas, nous contraindre à ne faire que le travail de gestion que l’on veut bien nous reconnaître. Chaque année, nous sommes nombreux et nombreuses à nous indigner face à de nouvelles réticences, à de nouveaux obstacles qui nous empêchent de faire ce pourquoi nous sommes formés !

Une conclusion pour résumer ?

Enseigner la SNT, l’EMI, la fiabilité de l’information, développer l’esprit critique des élèves, leur faire acquérir des compétences numériques concrètes, les former au monde qui les attend… Ce sont des missions, c’est un métier à part entière. C’est une nécessité au sein d’un établissement.

Rentrée sanitaire : témoignage d’une professeure documentaliste

Bérengère est professeure documentaliste dans l’académie d’Orléans-Tours. Pour elle, la rentrée 2020 se fait sous le signe du Covid, et même si elle est déstabilisante pour tous les collègues, c’est aussi l’occasion de repenser la place du CDI dans les établissements.

Comment vis-tu cette rentrée 2020 en tant que prof doc ?

Les conditions sanitaires nous amènent à différencier notre métier du lieu dans lequel nous pouvons l’exercer. En effet, l’accueil des élèves dans les CDI, la circulation des ressources papiers ont dû être adaptées, mais cela ne doit pas nous empêcher de faire vivre notre métier en dehors de ces espaces. Je prévois de présenter les portails documentaires à nos collègues et aux parents d’élèves et j’envisage une formation à leurs usages dans le programme des premières rencontres avec nos élèves.

Penses-tu que les professeurs documentalistes sont assez pris en compte dans cette rentrée ?

On peut regretter que les CDI ne soient pas évoqués dans les mesures sanitaires prévues pour la rentrée, un protocole spécifique nous aurait rassuré, mais parfois, les règles sont mieux adaptées quand elles sont établies à l’échelle d’un établissement, en lien avec la direction, les enseignants, la vie scolaire, plutôt que de se voir imposer des règles nationales. Pour autant, en amont j’aurais apprécié d’être accompagné par nos IPR sur ces questions, tant pour l’accueil des élèves que pour la manipulation du matériel.

En revanche, la circulaire de rentrée ministérielle est intéressante, car dans les dispositifs évoqués il y en a beaucoup sur lesquels le prof doc peut s’appuyer.

Lesquels par exemple ?

La circulaire de rentrée évoque plusieurs sujets dans lesquels le prof doc peut trouver sa place : l’accompagnement des élèves avec « devoirs faits » en collège et des heures d’accompagnement en lycée, plus particulièrement pour les élèves de seconde, avec les moyens qui n’ont pas été utilisés pendant la fermeture des établissements. Ou encore le renforcement des compétences orales à travers le travail sur l’éloquence au collège, qui était expérimenté l’an dernier et la préparation de l’épreuve orale finale au lycée. Et évidemment, la certification des compétences numériques avec le programme PIX qui se met en place cette année. L’inclusion des élèves les plus fragiles dans les CDI, alors que la réduction des inégalités renforcée par le confinement est au cœur du débat éducatif, est aussi un sujet important. Je compte bien me saisir de ces leviers !

Justement, on demande beaucoup de choses aux professeurs documentalistes…

En effet, c’est le moment de faire avancer le sujet de la déduction du temps de service pour les professeurs documentalistes qui mènent des interventions pédagogiques. Et d’obtenir, comme le demande le SE-Unsa, que l’indemnité de sujétion spéciale des professeurs documentalistes soit portée au niveau de l’ISOE, notamment du fait de leur implication croissante dans l’orientation des élèves !