« Femmes en sciences » : le SE-Unsa soutient le projet des étudiants en sciences

Le SE-Unsa a engagé un travail de collaboration avec les associations étudiantes qui couvrent des disciplines scolaires. Ces associations formulent régulièrement des propositions sur l’orientation et sur les programmes scolaires.
L’AFNEUS, qui couvre les disciplines scientifiques, a ainsi fait de nombreuses propositions sur les programmes de l’enseignement scientifique de tronc commun pour la réforme du lycée.
Cette association, qui fait partie de la FAGE, première organisation représentative chez les étudiants, s’investit aussi pour changer l’image des disciplines scientifiques. Le SE-Unsa donne la parole à Guillaume Hérrault, président de cette fédération pour présenter leur action « femmes en sciences » et vous propose de remplir l’enquête AFNEUS.

Pourquoi votre association s’est lancée dans ce projet ?

L’AFNEUS – Association Fédérative Nationale des Etudiant·e·s Universitaires Scientifiques – s’est lancée dans le développement du projet « Femmes En Sciences » afin de sensibiliser, la jeunesse principalement, sur la place des femmes dans les cursus et carrières scientifiques. En effet, encore aujourd’hui, les chiffres de la proportion des femmes dans les filières scientifiques restent très bas : 22,5% des étudiants dans des DUT scientifiques sont des étudiantes à titre d’exemple. Face à ce constat, l’AFNEUS et son réseau d’une trentaine d’associations étudiantes réparties sur le territoire métropolitain, a décidé de se saisir de cette problématique et d’être force de proposition afin de trouver des actions et des mesures concrètes pour permettre de lutter contre l’autocensure des jeunes filles et réduire les biais sexistes existants. Cela passera notamment par un travail de sensibilisation et de déconstruction de préjugés au contact des jeunes et via des campagnes de communication sur les réseaux sociaux très prisés par ce public.

En quoi les programmes scolaires ne laissent-ils pas assez de place aux femmes selon vous ?

Je répondrai à cette question par une autre : « Pourriez-vous citer le nom des trois femmes scientifiques ?« . Non ? Malheureusement, hormis Marie Curie, peu de femmes scientifiques scientifiques sont connues et reconnues pour leurs travaux. Pourtant elles sont nombreuses, à l’instar de Rosalind Franklin, Hedy Lamarr, Lise Meitner, Françoise Barré-Sinoussi ou encore Claudie Haigneré. La cause est simple, elles sont absentes des programmes scolaires ce qui entraînent une méconnaissance totale de ces figures scientifiques féminines au profit de leurs homologues masculins.

Concrètement, quel type d’actions voulez-vous mener à l’école ?

L’AFNEUS a lancé en janvier de cette année un projet se nommant « Femmes En Sciences ». Celui-ci comporte neuf actions, a pour but de déconstruire les préjugés et stéréotypes entourant les femmes et les sciences, et de sensibiliser sur la place de ces dernières dans le monde scientifique. Une des actions est d’ailleurs actuellement en cours, il s’agit d’une consultation citoyenne sur « La place des femmes dans les cursus et carrières scientifiques » disponible en ligne pour tout type de public, d’un public collégien à un public de professionnelles et de professionnels de tous horizons. Nous vous proposons par ailleurs d’y répondre et d’inviter vos élèves à participer également en répondant le plus honnêtement possible. Lien du sondage : https://urlz.fr/9ziD.

Le but de cette enquête est de pouvoir déterminer les bassins de vie et les publics cibles afin d’orienter les autres actions de ce projet comme des interventions en présentiel dans les établissements afin de démontrer l’apport des femmes dans les sciences et de les sensibiliser à ces questions par le biais d’un « serious game » par exemple.

De nombreuses autres actions sont également prévues comme la création d’expositions qui seront mises à disposition des écoles, des collèges, des lycées, des universités mais également des collectivités territoriales en faisant la demande. 

Un document de présentation globale du projet est en ligne et disponible ici.

Que doit-on faire au lycée pour assurer l’égalité femmes hommes dans l’accès aux filières scientifiques ?

Le lycée est une période importante de développement des élèves, ils et elles doivent réfléchir à leur avenir et réaliser des choix assez précoces dans leur orientation, au vu de la réforme du baccalauréat en cours et du choix des spécialités. 

Les actions à mener au sein des lycées sont donc principalement axées sur l’orientation, et ce dès l’entrée dans l’établissement. L’AFNEUS et son réseau pourront notamment participer à cela au travers des interventions prévues dans le cadre du projet « Femmes En Sciences » mais également de sa plateforme d’orientation dans les études scientifiques nommé « Etudiant En Sciences » qui sera mise à jour d’ici la rentrée 2019.

De plus, un travail de sensibilisation doit être effectué et être un travail sur la durée incluant les « prescripteurs et prescriptrices de l’orientation ». En effet, afin de ne pas (ou ne plus) biaiser les choix des élèves, il faut que les conseils ou recommandations ne contiennent pas des biais de « cursus genrés » encore bien ancrés dans la société. Il est enfin temps de dire que : « Oui, les femmes ont toute leur place dans l’ensemble des disciplines scientifiques, tant la biologie que la mécatronique ! »


La géographie à l’école et à l’université : interview de Maya de l’AFNEG

Maya Es, vice-présidente aux affaires académiques de l’AFNEG, qui fait partie de la Fédération des Associations Générales Etudiantes (FAGE) a répondu aux questions du SE-Unsa.

Peux-tu présenter votre association en quelques mots ?

L’AFNEG est l’Association Fédérative Nationale des Étudiants en Géographie et disciplines territoriales. Son principal rôle est de fédérer les associations étudiantes en géographie du territoire afin de former les associatifs, mais également de débattre sur les problématiques de la Géographie et d’y trouver des solutions.

À ce titre l’AFNEG travaille sur différentes thématiques :

  • Des projets d’orientation et de promotion de la filière : nous co-organisons la Nuit de la Géographie aux côtés du CNFG (Comité Nationale Français de Géographie) et nous intervenons dans les lycées pour faire connaître notre discipline. Pour les étudiants de licence et de master, nous avons mis au point des répertoires de formation sur notre site et nous publions toutes les deux semaines des fiches métiers qui résultent d’entretiens avec des professionnels.
  • Des projets de sensibilisations et d’innovation sociale. En effet, l’AFNEG dispose d’un important catalogue de formation sur le développement durable pour nos associations, nous réalisons également des campagnes de sensibilisation sur l’environnement sur les réseaux sociaux. Enfin nous travaillons avec les élus étudiants sur le développement durable dans les campus.
  • L’amélioration des conditions d’études, par le biais de la représentation étudiante mais également grâce au réseau de la FAGE. C’est à ce titre que nous travaillons notamment sur la réforme du baccalauréat et les programmes d’Histoire-Géographie, ou encore sur la question du Master MEEF. Nous travaillons également sur la modernisation pédagogique des formations en géographie et la mise en place de l’approche par compétences.
  • L’éducation populaire, lors de nos évènements nationaux par notre politique de formation des associatifs mais également par nos associations, qui organisent entre-autres de nombreux Café-géo.

Penses-tu que la matière histoire-géographie de l’École prépare suffisamment à la discipline universitaire « géographie »?

La Géographie est une discipline qui permet de façonner l’esprit critique. Elle permet d’analyser l’espace, les processus naturels et les sociétés à travers de nombreux facteurs. Elle permet de comprendre la relation des sociétés à leurs territoires au-delà des phénomènes que nous avons sous les yeux. Pour cela, il est essentiel de savoir traiter l’information et la synthétiser par différents outils, dont les fameuses cartes. C’est une discipline pratique, où l’étudiant est mis à contribution du savoir qu’il construit. Cette filière permet également de se saisir des enjeux du monde moderne, en travaillant par exemple sur les problématiques environnementales et la gestion des ressources naturelles, les flux humains et migratoires. La matière histoire-géographie du lycée est aujourd’hui assez déconnectée de sa consœur universitaire. Tout d’abord, elle est très orientée sur la connaissance et permet peu de développer les appétences attendues à l’université. D’autre part, la géographie du lycée ne permet pas d’anticiper la partie plus scientifique qui apparaît à l’Université. En effet, la géographie physique est plus proche de la matière Science et Vie de la Terre. De plus, les étudiants en géographie sont également amenés à faire du traitement de données statistiques ainsi que de la cartographie assistée par ordinateur. On assiste ainsi à une rupture entre le secondaire et le supérieur, qui entraîne des difficultés chez les néo-étudiants. Il y a donc un travail à faire sur le lien entre les disciplines au lycée, mais également un travail d’information auprès des lycéens.

Quel est ton avis sur les nouveaux programmes d’histoire-géographie du lycée?

Ces programmes d’histoire-géographie au lycée représentent une avancée mais celle-ci n’est pas assez aboutie à notre sens. Les grands axes choisis, même en restant vagues, intègrent les sujets de manière multiscalaire et répondent aux enjeux contemporains. Il était pour nous nécessaire de passer d’une approche régionale à une approche plus thématique, ce qui a été fait. Les exercices de restitution, comme le croquis, sont intéressants s’ils sont bien réalisés et ne se résument pas à un bachotage. Il était également essentiel pour nous de parler davantage du développement durable et de l’impact des Hommes sur l’environnement, ce qui y figure de manière trop timide à notre sens. Le lien entre l’espace et les territoires, le rôle des sociétés dans la construction de ces derniers ne semblent pas évidents et ne permettent pas de comprendre l’impact direct des Hommes sur leurs milieux.

L’AFNEG regrette cependant l’absence de géographie critique et de géographie politique dans ce programme. En effet, il nous semblait essentiel de faire figurer la géopolitique dans le tronc commun et non dans la spécialité, en axant sur des problématiques d’actualité, comme les conflits au Moyen-Orient. Cette thématique figurait au programme de l’option histoire-géographie de 2012 à 2014, et permettait une vraie compréhension de ces conflits et des héritages qui en sont la cause. La géographie est une discipline politique, elle permet en effet au lycéen de construire son esprit citoyen. Il est à ce titre essentiel pour nous qu’elle ne donne pas une vision lisse de la situation, mais permettent au contraire de situer les sociétés françaises et plus largement occidentales et leurs relations dans le monde avec un regard objectif. Le poids des décisions institutionnelles semble pourtant avoir été éludé des différents chapitres. Il est également à notre sens primordial de renforcer la vision de l’échelle européenne, enjeu d’avenir important dont il faut se saisir.

Le grand défaut des nouveaux programmes réside à notre sens dans le cloisonnement des disciplines, encore trop prononcé pour permettre un bon apprentissage de la géographie. En effet, si elle est étudiée en parallèle de l’histoire, les deux matières ne sont pour autant jamais mêlées. La Géographie emprunte également aux SVT et aux Sciences Economiques et Sociales. Le lien entre ces différentes disciplines doit être davantage mis en avant.

Et au sujet de la nouvelle spécialité « histoire-géographie-géopolitique et science politique ?

Notre avis est nettement plus négatif à l’égard de la spécialité Histoire-Géographie-Géopolitique et Science Politique. On constate une originalité dans l’articulation des différentes matières mais en aucun cas dans les thématiques traitées. Les études de cas devraient pourtant permettre un approfondissement, une ouverture sur une nouvelle société, et pas une énième étude des États-Unis.

Au delà des contenus, un grand défi s’impose pour nous dans la manière dont est enseignée la géographie. En effet, une écrasante majorité des enseignants en histoire-géographie sont aujourd’hui des historiens. Il est pour nous essentiel qu’ils puissent développer des compétences géographiques avant de les transmettre. La géographie ne peut en effet se résumer à réciter un cours, le lycéen doit mobiliser ce qui l’entoure pour comprendre les sujets qui lui sont présentés.

Selon toi, comment le lycée devrait évoluer, du point de vue pédagogique, pour mieux préparer les lycéens à réussir à l’université ?

D’un point de vue purement organisationnel, l’entrée à l’université demande une véritable autonomie et une prise d’initiative dans le travail et l’apprentissage, notamment en sciences humaines. Ce changement déstabilise un grand nombre de lycéens et entraîne des taux d’échec considérable à l’entrée. Il est impératif pour nous d’inciter davantage les lycéens à travailler en autonomie, par des travaux individuels ou de groupe.

La géographie au lycée est également une discipline que les étudiants doivent s’approprier, en choisissant une thématique et collectant eux même la donnée par de nombreux moyens : réalisation d’entretien, collecte statistique, recherche bibliographique… Cette manière de travailler permet aux étudiants de développer une compétence indispensable à nos études et notre insertion professionnelle : le traitement et la synthèse d’information. L’apprentissage au lycée s’ancre encore trop à notre sens dans un schéma linéaire, ou l’enseignant dispense un cours sans permettre à l’étudiant de se l’approprier. Il est pourtant important d’entrer dans un schéma de construction de compétences, au-delà du simple transfert de connaissances. Cette nouvelle manière de voir l’enseignement s’impose à notre sens, dans une société où l’accès à l’information est partout et l’enseignant n’est plus l’unique détenteur du savoir. À ce titre, l’accès au numérique doit également être renforcé et généralisé à toutes les disciplines au lycée, puisqu’il est omniprésent à l’université comme dans le monde du travail.