Formation des professeurs documentalistes en Espé, où en est-on ? Le SE-Unsa a interviewé un formateur pour faire le point sur les contenus de formation et les évolutions à venir.
Peux-tu te présenter en quelques mots et nous décrire ton activité de formateur ?
Je suis professeur-documentaliste certifié et après un parcours en établissement scolaire et dans le réseau Canopé, je suis en poste à l’Université Rennes 2 où je suis co-responsable du Master Meef Documentation et du Deust « Métiers des bibliothèques et de la documentation ». Ces formations dépendent du département Lettres qui propose plusieurs formations professionnalisantes dans le domaine des bibliothèques et de la documentation (DU, Deust, Licence professionnelle, Master). S’agissant du Master Meef, outre la co-responsabilité du parcours Documentation, j’interviens essentiellement au niveau de la première année pour la préparation de l’épreuve écrite de maîtrise des savoirs académiques et de l’épreuve orale sur dossier.
Les sciences de l’information et de la communication sont au coeur de la formation des professeurs documentalistes , que penses-tu de leur prise en compte dans l’enseignement secondaire et du rôle qu’elles pourraient jouer dans la formation des élèves ?
Les SIC constituent une science jeune (1975) si on les compare avec les autres disciplines universitaires. Elles sont nées du croisement avec d’autres disciplines (bibliothéconomie, sociologie, économie, informatique…). Cet aspect transdisciplinaire montre bien leur richesse et il me semble que l’apport des SIC dans la formation des élèves est essentiel pour aborder les grands bouleversements liés à l’utilisation massive et quotidienne de l’information, qui mobilise de nombreuses compétences, qui ont trop souvent été considérées comme « allant de soi » et ne nécessitant pas de véritable formation.
Tu es responsable du master Meef Documentation sur Rennes 2, quel regard portes-tu sur la formation actuelle des profs-docs et sur leur profil ?
Nos étudiants ont des profils très variés, même s’ils sont souvent issus des sciences humaines et sociales. Nous avons aussi des personnes en reconversion avec des parcours professionnels différents. Globalement tous arrivent en M1 avec peu de connaissances en SIC, sauf parfois quelques étudiants, issus de filières telles que «Bibliothèque et documentation » mais ils ne sont pas majoritaires. Nous avons, entre le début du Master et les écrits du Capes, environ six mois pour leur transmettre une culture info-documentaire, sans parler du travail sur la méthodologie des épreuves, ce qui est court et rend l’année de M1 particulièrement lourde, pour ce qui est de la charge de travail avec des connaissances qui, parfois, peuvent être fragiles.
Avec l’évolution des formations initiales, quelles vont être les principaux changements que vous prévoyez dans l’organisation du parcours des futurs profs-docs ?
Nous attendons d’en savoir un peu plus, à la fois sur l’organisation du concours et la place des écrits dans le master et sur le contenu des épreuves. L’année prochaine sera une année de transition et de préparation de ces évolutions et notamment des nouvelles maquettes.
Dans un monde idéal, si tu pouvais redessiner la formation des profs-docs, que changerais-tu ?
Je pense que la variété des profils est une richesse et qu’il faut la garder, mais qu’il est essentiel de renforcer le socle de connaissances communes aux futurs professeurs-documentalistes, en ayant plus de temps avant le concours pour stabiliser l’acquisition des savoirs fondamentaux, dont le champ s’élargit et se complexifie en permanence. Il y a quelques années, par exemple, nous abordions très rapidement la question de l’économie de l’information. Cette question est devenue fondamentale et ne peut pas se traiter en deux heures. L’Université met en place des parcours de pré-professionnalisation qui peuvent être une des solutions. Par ailleurs, au-delà du travail didactique sur les objets de l’info-documentation, le travail en collaboration avec les autres disciplines doit être renforcé, au niveau la formation initiale. Des initiatives sont prises en ce sens à l’Espé. C’est important si l’on veut que de bonnes habitudes soient prises par les jeunes enseignants et qu’elles se répercutent pas la suite sur le terrain. Je pense également qu’il est fondamental de renforcer cette approche réflexive sur sa pratique qu’est le mémoire dans une logique de recherche-action.
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