Vous avez obtenu un doctorat en sociologie et démographie. En quoi la transversalité de cette discipline rejoint la polyvalence du métier de CPE ? Votre thèse porte sur la place et le rôle du théâtre politique dans la société d’aujourd’hui. Quels grands enseignements en avez-vous tirés ?
Les méthodes de la sociologie se rapprochent énormément du métier de CPE, notamment au niveau du travail d’observation et de l’approche analytique. Comme le CPE, le sociologue a pour dynamique le mouvement et aussi la remise en question perpétuelle. À mon sens, une bonne connaissance et maîtrise de la sociologie des organisations sont nécessaires au bon fonctionnement d’un établissement et notamment pour être en mesure de coordonner un groupe. Collecter, analyser et coordonner pour être en mesure de faire bouger les lignes, c’est ainsi que je résume le lien entre le CPE et le sociologue.
Je ne vais pas parler des grands enseignements que j’ai pu tirer de ma propre thèse. Pour moi, il est plus important de se pencher sur la complexité de l’exercice sur le global. La thèse est à mon sens l’une des meilleures écoles de la persévérance. Quel thésard n’a jamais eu envie de tout arrêter ? Pour moi, le plus grand enseignement, c’est de toujours aller au bout des choses.
Dans le cadre d’un emploi auprès d’une mutuelle étudiante, vous avez animé des campagnes de prévention en direction d’un public étudiant. Sur quels thèmes portaient les formations ? Quelles compétences avez-vous acquises dans ce cadre ?
Les thématiques des campagnes de prévention étaient uniquement en relation avec les problématiques majeures de la population étudiante. Elles portaient par exemple sur les addictions (tabac, alcool, cannabis) ; la sexualité et notamment les infections sexuellement transmissibles, avec comme point d’orgue la journée d’action du 1er décembre ; la nutrition avec notamment un gros travail sur l’importance du petit-déjeuner ; les risques liés au son avec notamment la distribution de bouchons d’oreilles dans des salles de concert et festivals et enfin tout simplement l’accès aux soins.
Plus que des compétences, j’ai pu acquérir une meilleure connaissance des problématiques étudiantes en matière de santé et me rendre compte aussi de la nécessité de mettre en place une véritable éducation à la santé.
En tant qu’AED dans un lycée polyvalent, vous avez travaillé sur un projet intitulé « les cordées de la réussite ». En quoi consistait-il ? Quels étaient ces principaux objectifs ?
Ce projet permettait de mettre en lien un élève de BTS avec un collégien sous la forme d’un tutorat de deux ans. Le but était de choisir un collégien qui en règle générale avait de bons résultats scolaires, mais pas forcément la volonté (ou un entourage social favorable) de faire des études plus tard dans le supérieur.
Le but étant aussi de faire en quelque sorte une « éducation » à l’orientation afin de lever certains freins. Il reste parfois compliqué pour un élève (mais aussi pour la famille) de se projeter dans la perspective de faire des études alors qu’aucun membre de sa famille ne possède le bac. Il est aussi essentiel de confronter un élève de BTS à la possibilité de poursuivre ses études.
« Les cordées de la réussite », c’est aussi organiser concrètement des sorties, comme par exemple participer à un forum sur l’orientation ou (et) la visite d’une grande école, découvrir la vie étudiante (comme par exemple le logement, mais aussi restaurant universitaire, etc.). Ce projet, c’est aussi l’occasion d’ouvrir les élèves à des visites culturelles, mais aussi prendre le temps de « juste profiter » avec par exemple une journée dans un parc d’attractions. Concrètement, c’est un moyen de donner une ouverture sur le monde à des jeunes qui, souvent pour des raisons sociales, n’ont pas cette chance.
Candidate à un poste de CPE contractuelle, vous vous êtes vu confier au fur et à mesure des collèges de taille de plus en plus importante en effectifs. Quelles conséquences ces effets de taille ont-ils eu sur le fonctionnement même des vies scolaires ?
Chaque type d’établissement a ses avantages et ses inconvénients. Plus la structure est grande, plus il est nécessaire de déléguer et de faire confiance à son équipe d’assistants d’éducation. D’où la nécessité d’un bon travail de communication et d’un rapport de confiance. L’un des points très positif, c’est la présence plus fréquente d’infirmière scolaire, d’assistante sociale, de PsyEN, c’est-à-dire d’acteurs qui permettent au mieux d’accompagner des élèves en prenant plus en compte la complexité des problématiques.
Dans une structure plus petite avec moins de personnel nous pouvons nous rendre compte que chaque absence d’enseignant, mais aussi d’AED, est souvent très difficile à combler. Il est plus compliqué de faire face à des imprévus au sein d’une structure plus petite. Néanmoins, cette structure est souvent plus rassurante pour les élèves, une sorte de second cocon familial.
Vous êtes affectée dans un collège du Haut-Doubs dans lequel est mis en place un projet pédagogique relatif au soutien au comportement positif. Comment décririez-vous les points fort de ce dispositif ?
« Le soutien au comportement positif », c’est une manière un peu différente d’aborder les élèves et surtout une autre approche des notions « sanction » « punition ».
Ce dispositif apporte aussi des outils pour « mieux » comprendre et se faire comprendre. Il place la communication au cœur de notre travail. Ce type de projet nous met face à l’urgente nécessité de se réapproprier un vocabulaire adapté.
Le comportement positif, c’est aussi remettre la notion de « bienveillance » au cœur de notre travail et redonner du sens et de la valeur à ce terme si souvent moqué.
Comment imaginez-vous votre carrière dans l’Éducation Nationale ? Quelles perspectives à moyens termes avez-vous en tête ?
Actuellement, je suis contractuelle CPE et j’accumule des expériences afin de me préparer au mieux à cette profession. Cette pluralité d’expérience est, à mon sens, très bénéfique, c’est un excellent exercice d’adaptation.
Cette année, je souhaite passer le concours de CPE en externe. Si je réussis le concours, j’espère obtenir un poste dans un établissement où mes expériences apporteront réellement un plus. Si au contraire, j’ai cette douloureuse impression de ne pas être utile, je ferai tout simplement autre chose.
Céline Lachaud