Les devoirs, une question professionnelle

Donner des devoirs ou non, de quelle nature, avec quelle organisation et pour quelle efficacité ?

Voilà une question professionnelle majeure qui préoccupe tous les enseignants…

Dans l’Enseignant de septembre 2017 vous trouverez un dossier sur cette thématique complété ici par une série de témoignages de collègues qui seront publié fin août…

Crédit photo : Pixabay CCO Public Domain

Pour Laurent ce qui est essentiel c’est la question du travail personnel

Laurent Fillion est prof d’histoire géographie EMC en collège dans le Pas de Calais, il pratique l’évaluation sans notes et encadre une mini entreprise dans le cadre de la DP3 puis des EPI.
Il co-anime le site de partage de tâches complexes « Les tacos de Thucydide » et tient le blog « Peut mieux faire« . Adhérent au CRAP – Cahiers Pédagogiques il a coordonné plusieurs numéros “ et le livre “Éduquer à la citoyenneté : construire des compétences sociales et civiques”. Il est également coauteur des manuels lelivrescolaire.

La question des devoirs est elle une problématique professionnelle importante pour vous ? Pourquoi ?

Oui et non.

  • Oui parce que donner des devoirs reste une pratique largement répandue et c’est donc difficile de ne pas s’y intéresser.
  • Oui parce que ces devoirs à la maison créent de profondes inégalités entre les élèves et créent aussi assez souvent (et on a tendance à l’oublier) des tensions entre les élèves et les parents.
  • Non parce que la problématique essentielle à mes yeux est celle du travail personnel des élèves qui ne se cantonne pas aux seuls devoirs à la maison, bien au contraire.

Quelles réponses apportez-vous aux questions qu’elle suscite ?

Limiter le travail à la maison à la mémorisation des leçons, aux exercices d’application et à quelques recherches complémentaires.

Votre regard sur les devoirs a-t-il évolué au cours de votre carrière ?

Oui. Quand on débute, on est formaté à ce qui nous paraît être des incontournables du métier. Donner des devoirs, comme mettre des notes et des moyennes, en fait partie. Dans mes premières années d’enseignement, j’ai donc donné des exercices de préparation aux leçons comme je l’avais connu moi-même en temps qu’élève et comme on me l’avait appris à l’IUFM.
Assez vite, je me suis aperçu de l’inutilité voire la nocivité de ces devoirs pour plusieurs raisons :

  •  certains élèves ne les faisaient pas ou mal et étaient donc grandement pénalisés
  • la perte de temps pour vérifier voire corriger
  • et surtout l’activité essentielle de l’apprentissage était renvoyée à la maison sans l’accompagnement du professeur.

J’ai donc décidé assez vite que ces exercices d’apprentissage seraient faits en classe, avec mon aide et avec une différenciation bien plus facile à mettre en oeuvre que quand on les externalise.
Ce qui était devoir est devenu travail personnel, réalisé en classe, avec mon aide, en cooppérant, parfois différencié, parfois intégré à un plan de travail.

Ce temps ainsi dégagé à la maison, les élèves peuvent le consacrer à la mémorisation, à des exercices d’entraînements, d’application. (qui peuvent d’ailleurs être effectués ou commencés aussi dans la classe)

Le nouveau ministre a fait des annonces sur le dispositif « Devoirs faits ». Quelle mise en œuvre vous paraîtrait la plus pertinente dans votre établissement ?

Il faudrait réunir plusieurs conditions pour que cette mesure qui vise juste ne fasse pas au final pire que mieux :

  • ne pas nécessairement placer ces heures en fin de journée
  • placer ces heures dans l’emploi du temps de la classe et les rendre obligatoires à tous. Si c’est aux professeurs de désigner les élèves, ils risquent de prendre cela comme une sanction et rendre la mesure contre productive. Si c’est sur la base du volontariat ( cela semble être le choix retenu par le ministre) les élèves présents risquent de ne pas être ceux qui en ont le plus besoin (ce qui au final continuer à creuser les inégalités). De plus, on risque alors de faire reposer la faute de l’échec sur les seuls élèves dans des discours du type « et il ne va même pas aux heures devoirs faits ».
  • penser au cadre : comment permettre les travaux de groupe, les échanges entre élèves …
  • veiller à ce que ce dispositif ne traduise pas par une inflation du nombre des devoirs et une diminution des travaux personnels réalisés en classe. Ce serait vraiment dommage au regard des progrès réalisés ces derniers temps dans ce domaine, notamment dans le cadre de l’AP.
  • et surtout être accompagnée d’une véritable réflexion sur le bien fondé et la nature des devoirs

Pour Céline les devoirs sont utiles

La question des devoirs est elle une problématique professionnelle importante pour toi ? Pourquoi ?

Oui parce que les devoirs écrits sont interdits et à mon sens ce n’est pas une « faute » de donner des devoirs. Nous n’avons pas de liberté de ce côté là (les parents disent c’est interdit) mais si les devoirs sont réfléchis de la part de l’enseignant, je les trouve utiles.

Quelles réponses apportes-tu aux questions qu’elle suscite ?

Les mots clés :

  • Temps court
  • Entrainement
  • Devoirs individualisés (selon le niveau et la possibilité des parents à suivre leur enfant)
  • Lien avec les parents qui peuvent suivre les progrès de leur enfant

Votre regard sur les devoirs a-t-il évolué au cours de votre carrière ?

Oui au départ je donnais des devoirs avec moins de réflexion (sur le temps, la différenciation…) mais dans l’idée globale non. J’ai toujours considéré les devoirs comme des entrainements et une continuité de l’école à la maison. L’élève ne doit pas être en difficulté face aux devoirs et doit pouvoir les faire seul (ex: lire un peu chaque soir, réviser des tables de multiplications, poser des additions, réviser différentes leçons vues en classe, apprendre les mots de la dictée…)

Au fur et à mesure je me suis aperçue que les élèves étaient demandeurs et j’ai testé plusieurs supports pour le soir à la maison: cahier de leçon, porte-vue avec fiches, cahier de révision, de devoirs… À creuser encore !

Le nouveau ministre a fait des annonces sur le dispositif « Devoirs faits ». Quelle mise en œuvre te paraîtrait la plus pertinente dans ton établissement ?

Proposer un lieu (étude) pour faire ses devoirs.

Dernière remarque !!

Les assistants de vie scolaire peuvent aider et la question de la formation se pose « ils ne sont pas enseignants ils peuvent expliquer mal » mais c’est la même chose pour les parents ! C’est pour cela qu’à mon sens les devoirs ne doivent être que de l’entrainement/révision/mémorisation. Si le parent doit expliquer c’est qu’il y a un problème dans l’enseignement au départ.

Céline enseignante en ULIS collège

Photo en Une : Pixabay CCO Public Domain

Comment Frédéric a changé de regard à propos des devoirs

Frédéric Davignon, professeur d’anglais en internat, a raconté sur son excellent blog « J’adore mon job » comment il a changé de regard à propos des devoirs et ce qu’il a mis en place pour accompagner ses élèves dans leur travail personnel. Il nous a semblé que ces réflexions éclairent bien le sujet de notre dossier « Les devoirs, une question professionnelle » et c’est avec son autorisation que nous republions ici ces 2 billets : 

J’adore… l’aide aux devoirs (publié le 3 décembre 2011 sur le blog « J’adore mon job »)

Et je suis même fan de la chose.

Il y a plus d’un an et demi, j’ai découvert l’aide aux devoirs. Un peu par hasard, il est vrai. Au départ, je faisais déjà des heures supplémentaires, j’avais beaucoup de trajets, donc en faire plus et finir encore plus tard, non merci.

Et puis un jour, j’ai eu l’occasion d’en faire. Et j’ai découvert à quel point cela, si bien mené, avec les moyens nécessaires, pouvait être utile à l’élève et à sa réussite.

Comme beaucoup de professeurs, je ne me suis que peu intéressé à la partie non visible mais essentielle de l’élève: l’élève en dehors du cours, face à ses devoirs. J’ai tenté d’ignorer ce que nous savons pour la plupart tous: faute de temps, de lieu adapté parfois, faute de soutien à la maison disponible pour diverses raisons, une grande partie des élèves des établissements que j’ai fréquentés, ne font pas leurs devoirs, tout simplement. Ils ne travaillent que pour les évaluations, et encore. J’ai tenté d’ignorer que les élèves n’avaient pas les méthodes pour apprendre, même si on en parlait parfois en classe, que c’est au moment de travailler qu’il faut être là avec eux. J’ai tenté d’ignorer que l’école publique républicaine que j’aime tant et à laquelle je suis si attaché, celle qui fait réussir tout le monde, y compris les plus fragiles, les plus pauvres et qui les aide à grimper l’échelle sociale ou tout simplement à atteindre leur plein potentiel, ne le fait finalement que très mal. Je faisais mon job, en classe, avec enthousiasme, essayant de leur faire aimer la matière, après à eux de faire le leur chez eux, apprendre, comprendre.

Sauf que ça ne marche pas.

Apprendre, ce n’est pas un jeu d’enfant.

Apprendre, comprendre, ce n’est pas la chose simple et rapide que je pensais que c’était.

Et c’est lors de l’aide aux devoirs que je l’ai découvert. J’ai découvert à quel point je pouvais être vraiment utile là aussi. Rien qu’en étant là. En donnant des conseils pour mémoriser, et aider à répéter et réciter une leçon, et travaillant l’accent (bah oui, enfin, si vu en classe le mot était su et mémorisé et bien prononcé…). J’ai découvert à quel point cela changeait mes relations aux élèves, y compris ceux avec qui il y avait des tensions en classe. J’ai découvert à quel point ils appréciaient qu’on les aide, même si certains n’étant là que contraints et forcés car inscrits par les parents. Ne serait-ce qu’un instant, être là et les aider. J’ai découvert aussi le temps qu’il faut à certains élèves pour apprendre et mémoriser. J’ai découvert à quel point cela était synonyme de travail dur. J’ai découvert qu’en fait moi, j’étais à l’époque un bon élève et que je ne savais pas du tout ce qu’être un élève moyen ou en difficulté voulait dire. J’ai découvert que je pensais que tous les élèves étaient comme moi, moi élève… Et je n’en suis pas fier de cette découverte.

Je suis pleinement leur professeur depuis l’aide aux devoirs, à mon sens. Je les accompagne sur tout le processus, suivant les besoins, en classe mais aussi après, quand ils apprennent et travaillent.

Alors oui, il y a sans doute à améliorer là dedans, il faudrait pérenniser les moyens, faire que ça ne soit pas encore en plus dans l’emploi du temps des professeurs mais dedans mais il faut vraiment que l’aide aux devoirs demeure dans l’école.

J’ai la chance que cela soit inclus dans mon emploi du temps et dans celui des élèves (internes). En échange, je reste souvent tard, jusqu’à 19h, pour les aider. Mais je me sens utile. Et ils progressent.

Ca ne donne pas une solution à tout, mais on avance dans le bon sens.

Donc oui, j’adore l’aide aux devoirs. Les élèves aussi !

J’adore…réussir ma rentrée (ou l’aide aux devoirs) (Publié le 1er novembre 2014 sur le blog « J’adore mon job »)

Les prochains billets vont vous parler de ma rentrée. Tout n’a pas été rose, mais c’est une des (la ?) plus belles et plus intéressantes que j’ai vécues, j’ai beaucoup à partager.

Mon établissement est un internat. Les élèves ont donc du temps pour travailler dans l’établissement puisqu’ils ne le font pas chez eux.

Plutôt que de mettre ce temps de façon classique de 5 à 6 voire 7, le parti-pris a toujours été de l’intégrer à l’emploi du temps, qui du coup s’élargit au-delà de 5h de l’après-midi.

Cette année, notre Proviseur a décidé d’intégrer une demi-heure de « travail », permanence, étude dirigée – peu importe le nom – à l’horaire de certaines matières dont la mienne, l’anglais.

Je me retrouve donc avec mes 3h classiques, plus une demi-heure. J’ai concrètement 2 fois une heure, et une fois une heure et demie. L’engagement pris par les enseignants était d’utiliser au moins une demi-heure de ces 3h30 pour faire de « l’aide aux devoirs ». J’ai choisi pour ma part de diviser cet horaire en 2, 45 minutes de cours, 45 minutes « autres ».

Au départ, cela m’inquiétait un peu d’avoir une heure trente. Est-ce que cela n’allait pas être trop long ? Nos élèves en difficulté allaient-ils adhérer ?

J’ai choisi de faire cours sur la première partie, et d’accompagner leur apprentissage du cours (en anglais, il faut pratiquer, mais aussi apprendre). Tout le monde doit apprendre, puis chacun utilise le temps comme il le souhaite : pour pratiquer, pour finir quelque chose, recopier un cours manquant, lire en anglais, écouter des ressources, créer des ressources, créer des fiches mémos. Les élèves ont d’emblée adhéré. J’ai pu travailler avec eux sur ce que ça veut dire « d’apprendre son cours ». J’ai donné diverses méthodes pour mémoriser. Certains, les plus petits, ont beaucoup aimé aussi venir me réciter ce qui était à apprendre, ou me montrer leur cahier.

En seconde, après une première interrogation de cours, une élève m’a dit : « Mais en fait, c’est facile d’apprendre ! Ca marche votre truc ! Pendant des années, je m’y suis mal prise ! » Cet aveu m’a beaucoup touché, et en même temps énormément chagriné. N’avons-nous là pas raté l’essentiel si une élève de 2nde découvre seulement cette année-là comment apprendre ? L’arrivée dans le projet de socle commun d’une section là-dessus me fait très plaisir, je dois dire.

Mes petits 6e, mais aussi les 4e ont bien peu d’idées sur ce que veut dire apprendre un cours, et surtout comment on fait. Ils pensent aussi qu’ils sont « nuls », pas adaptés à l’école et ont une très médiocre image d’eux-mêmes. S’ils n’arrivent pas à apprendre alors que d’autres savent faire, c’est forcément que quelque chose ne va pas chez eux. Ce sont bien souvent des élèves qui pour diverses raisons ne sont pas aidés à la maison. On touche là pour moi un point essentiel. En donnant des devoirs à la maison, des exercices, on favorise certains élèves : ceux qui réussissent déjà à l’école, ceux qui peuvent être aidés par leurs parents, et on laisse de côté ceux qui n’y arrivent pas et pour qui on devrait être là. Ceux-là mêmes pour qui l’école telle que je la conçois doit être là.

Attention, je ne dis pas que les élèves ne doivent rien faire en dehors du cours. Mais à mon sens ce qui est donné en dehors du cours doit être très réfléchi et ne doit pas placer les élèves dans une situation qui amène de l’inégalité et qui les met en difficulté si personne n’est là pour les aider.

La classe inversée m’a aussi beaucoup apporté, je donne à faire hors du cours des choses simples, regarder une vidéo portant sur un point dont ils auront besoin, quelque chose à lire, puis on fait le point en classe et on utilise ces connaissances pour pratiquer la règle. Je donne à faire quelque chose qui aidera l’élève pendant le cours, qui lui permettra d’avancer. Parfois, mes 45 minutes servent aussi à cela pour ceux qui ne peuvent pas le faire hors de la classe (pas d’accès à Internet par exemple). Mais je reviendrai dans un autre billet sur la classe inversée.

Je perdrai sans doute un jour cette demi-heure en plus, mais je pense que je militerai alors pour 2 créneaux de 1h30 durant lesquels j’aiderais les élèves à faire le travail que l’on donne à faire normalement « à la maison ».

On a donc beaucoup travaillé sur comment apprendre et quoi. Qu’est-ce que ça veut dire savoir un cours ? Savoir un mot, c’est savoir ce qu’il veut dire, savoir le dire, savoir l’écrire ? Les 3 ? Ah bon, Monsieur ? Les évaluations orale ou écrites de cours sont vécues différemment depuis aussi. Ce moment commun de « travail » est devenu un vrai moment de plaisir. On fait cours, et après on apprend. Est-ce que je perds du temps? Je ne crois pas. Et puis cela pacifie énormément le déroulement du cours. Les élèves savent que je serai là, pour aider, pour expliquer à nouveau, pour clarifier, même après le cours classique. Bref, que je serai leur professeur. Pleinement.

Céline ne donne pas de « devoirs » mais propose des activités

Tout d’abord peux-tu te présenter en quelques mots ainsi que ton contexte de travail ?

J’ai commencé ma carrière en 2002. Je suis depuis 7 ans directrice d’une école de 6 classes en région parisienne et j’enseigne en classe de cycle 3. Le public est dit « socialement mixte », la grande majorité des parents travaille, souvent jusque tard le soir.

Concrètement que donnes-tu en devoirs à tes élèves ? (type, quantité, fréquence, organisation…)

Je ne donne à mes élèves aucun devoir : quel mot péjoratif, je trouve… un devoir, après 8h voire 11h de collectivité dont 6h d’apprentissage… dans ce cadre, ce mot s’apparente à corvée, non ?
En revanche je leur propose des activités, celles-ci pouvant se faire sur le temps de classe (sur les 15 premières et 15 dernières minutes de la journée).
Proposer est un terme choisi : si les activités ne sont pas faites, les élèves savent que je ne les blâmerais pas.
Je leur exprime mon souhait en début d’année :
– lire tous les jours 20 minutes, le choix du support étant libre : roman, album, bande-dessinée, etc. Je les aide si besoin dans le choix, je leur prête les livres s’ils n’ont pas la possibilité d’aller à la médiathèque, etc.
– je leur propose aussi une liste de sites et/ou d’applications gratuites via notre Espace Numérique de Travail permettant de travailler en calcul mental de manière ludique.
– régulièrement, ils relisent les leçons apprises en classe, et peuvent visionner les capsules vidéos associées.

Quels moyens mets-tu en œuvre pour que ces devoirs soient faisables par tous ? Comment gères-tu ceux qui ne les font pas ?

Ces activités sont accessibles à tous : il serait paradoxal pour moi de différencier ma pédagogie sur le temps scolaire et de proposer à tous la même chose alors que je ne suis plus aux côtés des élèves pour les aider. La différenciation en lecture se fait en variant le support, et les différents jeux de calcul mental prennent en compte les progrès de l’élève pour les faire évoluer à leur rythme.

Si tous, dans un premier temps, ne font pas les activités, le moment de mise en commun les y incite : nous prenons 5 minutes le matin pour partager nos progrès, notre avancée dans l’intrigue du livre en cours, ou notre avis sur la capsule vue la veille au soir. C’est ce temps qui est aussi formateur, si ce n’est plus, que celui de l’activité.

Comment présentes-tu cela à tes élèves ? À leurs parents ?

Je ne rencontre aucune difficulté à partager cette vision avec les élèves, c’est en revanche beaucoup plus délicat avec les parents : ne pas donner de devoir est un acte de résistance ! J’expose mon fonctionnement lors de ma réunion de rentrée en tentant de convaincre les irréductibles mais je ne me fais pas trop d’illusions : certains investissent sans doute dans de célèbres cahiers de révisions quotidiennes… peu importe, je propose aux parents qui voient les devoirs comme un « moment de partage » (déjà entendu !) de profiter de ces 15 ou 30 minutes gagnées pour faire un jeu de société en famille. Autant dire, s’il fallait le préciser, que peu de mes élèves ont eu la chance de jouer en famille…
Pour beaucoup les devoirs sont synonymes d’efficacité et de réussite en classe. Une enseignante ne donnant pas de devoir est vue comme laxiste, peu exigeante voire cataloguée « mauvaise maitresse ».

Quels effets observes-tu sur les élèves (et éventuellement sur les parents) dans ta façon de gérer les devoirs ?

Le rythme scolaire est perpétuellement source de débat. En l’occurrence ma gestion des devoirs fait que l’élève retrouve après l’école un temps à la maison calme et sans tension. Il se réapproprie ses loisirs sans avoir la contrainte d’un travail attendu par l’enseignante pour le lendemain.
Les devoirs sont devenus le lien entre l’école et les familles. Ce lien ne peut-il donc pas se créer autrement ?
En début d’année j’invite tous les parents qui le souhaitent à passer avec nous 1h, 2h voire une demi-journée pour ceux qui le peuvent. Depuis 4 ans que je propose cela, environ 1 ou 2 familles/an seulement sont venues en classe, et ce n’est malheureusement pas mes irréductibles qui estiment que « je couve trop les élèves ».

Tes collègues font-ils comme toi ? Quel est leur regard sur ta façon de faire ?

Il a fallu plusieurs années pour que la quantité de devoirs des collègues diminuent. Nous n’avons pas la même manière de fonctionner. Des pratiques perdurent , et pour certaines collègues, l’association « devoirs = maîtresse sérieuse » est tout aussi ancrée que pour certaines familles.

Comment ta vision des devoirs à la maison a-t-elle évoluée au cours de ta carrière ?

Au début de ma carrière, je reproduisais ce que j’avais pu voir lors de mes stages. Je donnais à mes élèves quelques opérations, de la lecture avec questionnaire à l’appui, voire (« halte-là, malheureuse ! » ) un exercice de grammaire.
Puis, comme tout le monde, je me suis construite en tant qu’enseignante, je fais évoluer mes pratiques.
Le plus difficile est d’assumer ce choix vis-à-vis des parents.

Qu’est-ce-que tu souhaiterais encore améliorer dans ton dispositif ?

Je me nourris des échanges de pratiques et des témoignages de collègues, il me reste énormément à apprendre, rien n’est figé !

Qu’est-ce-que tu conseillerais à un jeune collègue débutant pour aborder cette question ?

Ne pas confondre « devoirs à la maison » et apprentissages, c’est la clé !

Céline Martinage, École Pablo Picasso à St Michel sur orge

Pas de devoirs en lycée pro, Marie Anne nous explique son choix

Enseignante en économie gestion en lycée professionnel au Lycée des Métiers Jean Caillaud à Ruelle sur Touvre depuis 10 ans, j’ai débuté ma carrière (14 ans à ce jour) en MFR (Maisons Familiales et Rurales) puis suis passée par un centre de formation des apprentis. J’ai aussi enseigné l’anglais en collège pendant deux ans avant de choisir d’enseigner l’économie gestion.

Je n’ai jamais donné de devoirs à la maison à mes élèves, qu’il s’agisse des apprentis, des collégiens ou bien maintenant de mes lycéens. Ne pas donner de devoirs à mes apprentis me semblait une évidence car leur semaine de travail est déjà assez chargée. Même si leur temps de formation est moins conséquent qu’en lycée, je ne voyais pas vraiment comment ils auraient pu s’organiser pour travailler en plus à la maison !

Quand j’ai commencé à enseigner en collège, je n’ai pas non plus voulu donner de devoirs à la maison. Surprenant peut-être ! En fait, j’ai le souvenir ému du premier professeur pendant ma scolarité qui nous avait dit : « vous n’aurez pas de devoir à la maison ! » Non seulement ça avait été une énorme surprise mais en plus une vraie libération ! Je suis la première bachelière de ma famille. Faire les devoirs à la maison relevait parfois du cauchemar car il n’était pas facile de trouver quelqu’un pour m’aider. Dans certaines matières, je sentais un peu la détresse de mes parents qui ne savaient comment m’aider, n’en avaient d’ailleurs pas toujours le temps ou bien exprimaient le regret de ne pas avoir pu poursuivre des études car, à l’époque… (un certificat d’études pour mon père et un apprentissage de couturière pour ma mère). Cela m’a-t-il marqué au point que je me dise qu’il y avait quelque chose d’un peu injuste dans le fait de donner des devoirs à la maison ? Très certainement !

Au-delà de cette injustice (qui peut aider l’enfant, l’adolescent quand il a des devoirs parfois un peu complexes à faire ?), il me semble que nos adolescents ont des semaines chargées. J’enseigne dans un lycée avec une population défavorisée. Il n’est pas rare qu’à la sortie des cours, les premières préoccupations soient d’aller chercher petits frères ou sœurs, de faire les courses, d’aider à la maison, etc. et qu’à tout ceci s’ajoute le fait de gérer le manque d’espace dans la maison ou l’appartement familial. Dans ces conditions et compte tenu du fait que nos lycéens en voie professionnelle cumulent parfois jusqu’à 32 heures de cours par semaine (grand choc quand ils débutent en seconde), il est, pour moi, impensable de leur rajouter une charge de travail.

Qui plus est, j’ai en face de moi des élèves qui arrivent avec un sentiment d’échec (le discours : « tu ne travailles pas assez, tu n’as pas assez de capacités… donc tu iras en lycée professionnel » a la vie dure). De ce fait, mon premier travail est de leur redonner confiance mais aussi de leur redonner de l’envie, du goût, du plaisir même à aller à l’école ! Cela ne passe certainement pas par un travail à la maison, souvent peu ludique, voire rébarbatif, mais plutôt par des activités en classe qui leur redonneront confiance en eux et les valoriseront.

Alors effectivement, je suis souvent pour ne pas dire toujours en porte-à-faux avec de nombreux collègues pour ne pas dire tous !

Mais qu’il m’est pénible de voir sur un bulletin : « la moyenne est mauvaise car plusieurs devoirs maison n’ont pas été remis » ou encore pire : « zéro car devoir non rendu » ! Mais le problème des appréciations sur le bulletin est aussi un vaste et autre sujet ! Pour moi, ce genre de comportement relève de la double peine ! Le jeune a un devoir à faire à la maison, ce qui, bien sûr, ne l’enchante guère dès le départ (je le comprends !) mais en plus il se voit attribuer un beau zéro en guise de notation pour un trimestre voire un semestre ! Concrètement, j’ai du mal à voir le bénéfice !

J’avoue m’être battue un peu au début pour tenter de faire comprendre à des collègues que je trouvais ça particulièrement injuste. Mais j’ai honte d’avouer que j’ai baissé les bras au nom de la sacro-sainte liberté pédagogique ! En même temps, je peux aussi comprendre que, pour certains collègues qui ont une heure seulement par semaine les élèves, il n’est pas toujours évident de gérer un programme, des évaluations en classe et donc très certainement existe-t-il une quasi obligation d’avoir recours aux devoirs à la maison. Mais, à ce moment-là, pourquoi ne pas essayer d’y apporter un peu plus de souplesse ou du moins un peu plus de « fun » ?

Il existe maintenant des solutions plus « sympathiques » pour évaluer non ? J’utilise plutôt Plickers par exemple pour une petite évaluation ponctuelle plutôt que de leur donner quelque chose à la maison.

Depuis presque deux ans, je me suis lancée dans l’aventure de la classe inversée, ce qui sous-entend de travailler un peu à la maison. Mais, comme le dit si justement Marcel Lebrun (notre référence à tous) il existe plusieurs classes inversées !

Me lancer dans la classe inversée remettait donc en cause tout ce que j’avais mis en place depuis que j’enseigne puisque pour moi c’était zéro travail à la maison. Mais la réaction de mes élèves a été absolument géniale et très encourageante ! En effet, le travail en amont dans ma classe inversée consiste à visionner une capsule puis à répondre à un quiz réalisé sur Google form. Ce qui, au pire, leur prendra une dizaine de minutes (3 à 5 minutes pour visualiser la capsule, 3 à 5 minutes pour répondre au quiz). Mais là encore, pas d’obligation de faire ça à la maison (puisque tout le monde ne dispose pas de moyen d’accès à Internet chez lui) et donc on peut prendre 10 minutes en début de cours pour que tout le monde en soit au même point. En fait, les élèves trouvent ça plus sympathique à faire qu’un devoir maison « classique » et ont vite pris le pli de visionner la capsule et de compléter le quiz. C’est même moi qui avais plus de réticence qu’eux au début. Ce à quoi, l’un d’entre eux a répondu : « mais Madame, vous rigolez, 10 minutes, on peut quand même faire ça pour vous ! ». Mais c’est surtout qu’ils peuvent le faire avec leur smartphone, avec leur tablette, dans le bus, à la maison, dans la cour… Il y a un côté « pratique » à ce type de devoirs à faire à la maison. Mais non ! Rien que le nom « devoirs » me gêne toujours autant ! On crée l’obligation alors que moi je recherche le fait que le travail à faire se fasse par choix. C’est aussi cela que m’apporte la classe inversée.

Donc, si je devais démarrer ma carrière aujourd’hui, j’essaierais d’abord de voir ce qui se fait, ce que le numérique peut m’apporter comme avantage. Je testerais, je tenterais mais surtout, surtout, je ferais en fonction du ressenti de mes élèves et de l’envie que je décèlerais chez eux.

Car, oui, cette année, et pour la première fois depuis que j’enseigne en lycée professionnel, j’ai eu une petite Laurine, élève de seconde, qui me demandait et me redemandait du travail. Heureusement, elle avait accès à des missions que j’avais préparées dans le cadre de ma classe inversée en économie droit. Elle a réalisé beaucoup plus de missions que la plupart de ses camarades de classe mais en tout cas, elle les a réalisées parce qu’elle en avait envie et que cela lui faisait plaisir. Après, la question de la notation se pose mais en l’occurrence j’ai valorisé son travail.

Donc concrètement, le travail en dehors de la classe, cela passe par une véritable envie de l’élève et aussi une possibilité de le valoriser plutôt que de le rabaisser. Cela reste ma ligne de conduite et ce que j’ai envie d’améliorer encore et encore : voir mes élèves arriver avec de l’envie en cours d’économie gestion et pas avec la peur au ventre parce que les devoirs maison n’ont pas pu être faits. Enfin, tel est mon sentiment mais compte tenu du retour que je peux observer chez mes élèves, je pense être dans le vrai !

Marie Anne Dupuis, Professeur Economie Gestion, Académie de Poitiers

Delphine ne donne pas de devoirs à ses élèves d’ULIS, témoignage

­Tout d’abord peux-tu te présenter en quelques mots ainsi que ton contexte de travail ?

Je suis coordonnatrice d’ULIS en collège depuis cinq ans. Auparavant j’étais en CLIS dans une école très hétérogène où je m’occupais aussi de la cantine et de l’étude du soir. Enfin, j’ai commencé en IME (Institut Médico Éducatif) auprès d’élèves souffrant de troubles cognitifs importants avec souvent des troubles associés.
Dans ce contexte particulier, je suis au plus près les besoins et le rythme des élèves en m’appuyant sur une évaluation diagnostique en début d’année scolaire et une observation fine. Et je ne donne pas de devoirs : parce que mes élèves et leurs parents ont souvent un vécu difficile avec l’école et entre eux à cause de l’école, parce que j’aime voir comment ils entrent dans la tâche, comment ils se débrouillent devant l’exercice pour utiliser aussi ce levier là afin de leur permettre d’avancer dans leurs apprentissages.

­Concrètement que donnes-tu en devoirs à tes élèves ?

Donc : pas de devoirs du tout ! Juste la consigne de lire un peu et de participer à la vie de leur famille pendant les vacances.

Apprendre et progresser sans avoir de devoirs à faire, est-ce possible selon toi ?

Et bien, malgré toutes leurs difficultés et malgré le fait de ne pas avoir de devoirs, ils progressent plutôt bien ! À leur rythme !

Comment présentes-tu cela à tes élèves ? À leurs parents ?

Je leur évite les conflits qu’ils connaissent par cœur et qu’ils appréhendent (et je permets même à mes élèves de ne pas ramener leur cahier à la maison )! Ils ont besoin qu’on leur « foute la paix » et qu’on leur fasse confiance, je leur permet de cloisonner. Les parents savent qu’ils peuvent me joindre facilement pour discuter s’ils en ont besoin.
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Quels effets observes-tu sur les élèves (et éventuellement sur les parents) avec ton choix de ne pas donner de devoirs ? Quels autres liens école-famille proposes-tu ?

Le problème des devoirs avec mes élèves, c’est que cela confronte les parents à tout ce que leur enfant ne sait pas faire. Par contre, c’est assez simple en fait de transférer les compétences que je vise dans le quotidien familial et d’en faire des « devoirs » (prise d’initiative, autonomie, être attentif à une consigne, la garder en mémoire, planifier les tâches). Pour les connaissances pures, nous avons les affichages, les aides mémoire et les applis pour palier aux difficultés. Mais encore une fois, je travaille dans un contexte particulier.
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Tes collègues font-ils comme toi ? Quel est leur regard sur ta façon de faire ?

Mes collègues connaissent mon fonctionnement et le respectent notamment lors des inclusions : je leur explique les difficultés de mémoire de mes élèves et surtout mes objectifs : l’important n’est pas de connaître la leçon par cœur mais de comprendre les questions et de trouver la bonne réponse dans le cours. Du coup, ils travaillent de plus en plus de cette manière là avec les élèves en difficulté. Surtout, il faut d’abord proposer ce fonctionnement aux parents qui en général sont plutôt contents que l’on prenne en compte les difficultés de leur enfant. Pour le travail écrit, la plupart du temps, mes collègues le débutent en classe, pour aider les élèves les plus en difficulté.
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Comment ta vision des devoirs à la maison a-t-elle évoluée au cours de ta carrière ?

Au début, ces devoirs ne servaient que de rituels afin de faire du lien avec le « hors-école », notamment les éducateurs. Mais j’ai vite vu les problèmes auxquels chaque enseignant est confronté : Quelle aide apportée ? Combien de temps ? Quelle « ambiance » ? Et puis l’observation de mes élèves est très importante pour moi, et les remédiations que je leur propose sont souvent transposables dans le quotidien (attention, planification, gestion de la mémoire court et moyen terme, accompagnement pour l’entrée dans la tâche). C’est alors ça que je donne comme « devoirs » !
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Qu’est-ce-que tu souhaiterais encore améliorer dans ton dispositif ?

À la rentrée, je souhaite développer l’utilisation des outils numériques pour palier aux difficultés afin que mes élèves acquièrent le plus d’autonomie possible. J’aimerais qu’ils transfèrent cette utilisation sur leurs téléphones portables afin de les utiliser au quotidien. Le but étant qu’ils puissent vraiment se concentrer sur le plus important : comprendre, analyser, développer leur esprit critique, prendre des initiatives, avoir confiance en eux.
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­Qu’est-ce-que tu conseillerais à un jeune collègue débutant pour aborder cette question ?

Les premières questions à se poser sont : À quoi ça sert ? Quel est l’objectif de ces devoirs ? Les conditions nécessaires pour atteindre cet objectif sont-elles remplies ?

 

Delphine SAULNIER, coordonnatrice de l’ULIS du collège Ledoux à Dole

Le numérique au service de l’accompagnement des devoirs par Julien

Tout d’abord peux-tu te présenter en quelques mots ainsi que ton contexte de travail ?

Je suis Julien Crémoux, enseignant en CM1-CM2 depuis 2 ans, ayant essentiellement fait du cycle 3 depuis mon arrivée dans le métier en 2005. Je suis aussi directeur de l’école H Challand de Nuits-Saint-Georges en Côte d’Or qui compte 6 classes. Depuis mon arrivée dans le métier, j’ai toujours essayé de faire évoluer mes pratiques pour aider au mieux tous les élèves et notamment ceux en difficulté. Ainsi, depuis 2011, j’ai conçu des outils numériques sur notre site d’école. Puis grâce aux discussions sur internet je me suis lancé il y a 5 ans dans les ceintures de compétences. Je me suis mis dès lors à partager mon travail en créant un blog supermaitre.eklablog.fr. De fil en aiguille, je me suis aussi lancé dans une pédagogie plus coopérative, avec aussi un système de classe inversée. Enfin depuis 1 an, j’ai aussi lancé mes élèves dans l’aventure d’une twittclasse.

Concrètement que donnes-tu en devoirs à tes élèves ? (type, quantité, fréquence, organisation…)

Je donne concrètement quasiment les mêmes devoirs tous les soirs. Il y a systématiquement 2 à 3 fois par semaine une nouvelle leçon à apprendre (français maths + histoire ou sciences…) et aussi une vidéo de classe inversée à visionner. Je donne aussi tous les jours à revoir les leçons faites depuis une dizaine de jours et les mots du cahier de mots à revoir (ce cahier complété par l’élève recense tous les mots à connaitre mais aussi tous les mots mal orthographiés par l’élève au cours de ses travaux). Ensuite, il y a pour la semaine la ou les ceintures à passer qui impliquent que les élèves revoient une leçon connue (et au programme du plan de travail individuel de l’élève). Enfin, et ce sera la nouveauté de cette année, je ferai noter la lecture de 5 pages d’un livre tous les soirs (le livre sera choisi par l’élève dans le cadre d’un rallye lecture sur un semestre).
Sinon occasionnellement, les élèves pourront avoir à préparer des travaux à l’oral qui auront été travaillés en classe (exposé, rituel en histoire des arts).

Quels moyens mets-tu en œuvre pour que ces devoirs soient faisables par tous ? Comment gères-tu ceux qui ne les font pas ?

Pour que ces devoirs soient faisables et faits, j’ai choisi de :
– noter sur le site de la classe les devoirs chaque jour afin que tous, élèves et parents, puissent savoir ce qui est prévu. Cela implique que je ne vérifie pas les agendas des élèves (sauf gros souci) et que les parents savent qu’ils peuvent trouver les devoirs à un endroit.
– proposer pour chaque leçon à apprendre des outils sur le site internet de classe qui doivent permettre aux élèves de savoir ce qu’ils doivent retenir et de vérifier s’ils ont bien compris. Pour ce faire, chaque leçon donnée renvoie vers ce site (généralement 100% des élèves de ma classe ont les moyens de se connecter).
– informer en début d’année les familles de mon fonctionnement, de mes exigences mais aussi des moyens d’aider ou d’accompagner leur enfant (je fais de même avec l’accompagnement à la scolarité de la ville).
– me tenir à disposition des familles qui peuvent avoir besoin d’aide en répondant à leurs questions au sujet des devoirs.
– d’informer les parents par un petit mot à signer quand un travail n’est pas fait.

Comment présentes-tu cela à tes élèves ? À leurs parents ?

C’est expliqué au-dessus mais j’essaie surtout d’expliciter aux élèves et parents le pourquoi de mes demandes. Concernant les leçons, je leur explique qu’il est important que les élèves puissent expliquer en quelques mots (les leurs) le contenu de la leçon, puissent répondre à 2 ou 3 questions ou faire un exemple. Pour les aider, je mets sur le site de la classe ces différents éléments.

Quels effets observes-tu sur les élèves (et éventuellement sur les parents) dans ta façon de gérer les devoirs ?

Je n’ai pas de retour particulier des familles sur ce fonctionnement. Par contre, les, élèves ont l’impression qu’ils n’ont pas grand chose à faire mais se rendent vite compte que si des choses ne sont pas faites, cela crée un décalage sur ce qu’ils maitrisent et ils ont tendance à se rattraper. Par contre, c’est compliqué pour des élèves qui fonctionnent seuls à la maison car ceux qui sont en difficulté ont l’impression de connaitre leur leçon mais ne savent pas au retour en classe faire une seule phrase ou même donner le titre de la leçon.

Tes collègues font-ils comme toi ? Quel est leur regard sur ta façon de faire ?

Mes collègues de cycle 3 ne fonctionnent pas toujours comme moi, notamment en ne donnant la leçon à apprendre qu’une fois ou en donnant des exercices à faire à la maison qui seront corrigés en classe. Nos pratiques sont variées, nous n’avons pas su ou pu harmoniser nos pratiques mais il n’y a pas de regard négatif les uns envers les autres.

Comment ta vision des devoirs à la maison a-t-elle évoluée au cours de ta carrière ?

Au début je donnais les leçons à apprendre une fois et je donnais des travaux écrits régulièrement. Et puis, je me suis rendu compte que je perdais déjà 5 minutes le matin à savoir qui avait ou n’avait pas fait pour telle ou telle raison. En outre, je ne pensais pas à informer les familles de mon fonctionnement et de mes exigences. Quand j’ai commencé à évoluer, je me suis dit qu’il fallait aussi permettre à tous de faire ce qui est demandé comme si j’étais là.

Qu’est-ce-que tu souhaiterais encore améliorer dans ton dispositif ?

Les améliorations sont en cours pour cette rentrée avec la volonté de faire lire plus les élèves en instaurant une lecture de 5 pages à la maison mais aussi 10 minutes en classe chaque jour.

Qu’est-ce-que tu conseillerais à un jeune collègue débutant pour aborder cette question ?

Je conseillerais de se mettre à la place d’un élève en difficultés qui doit faire seul son travail à la maison. S’il ne peut pas faire une des choses demandées, ce n’est pas la peine de l’inscrire sur l’agenda mais cela demande de réfléchir à ce qu’on fait en classe pour s’assurer de la présence d’un certain nombre d’éléments quant aux travaux des élèves.

 

Julien Crémoux, directeur de l’école H Challand de Nuits-Saint-Georges en Côte d’Or