3 questions à Valérie, AESH

Je suis AESH en CDI depuis 2007, et depuis 2 ans en ULIS École. J’accompagne plusieurs élèves qui utilisent le numérique au quotidien : 
– Un enfant trisomique qui utilise quotidiennement le logiciel JOCATOP en numération, reconstitution d’image, algorithme
– et une enfant dyslexique/dysorthographique qui utilise le traitement de texte pour tout ce qui concerne la production d’écrits.

1- Quels sont les avantages de l’utilisation du numérique dans l’exercice de ton métier ?

C’est le côté « ludique » de l’outil, le travail de motricité avec la souris et l’autonomie par rapport à l’adulte (nécessaire auprès de lui pour le support papier). L’utilisation permet à mon élève dyslexique de produire un texte plus facilement : plus spontané, plus riche en vocabulaire lorsqu’elle n’a pas la double-consigne (produire un récit sans faire de faute). Elle utilise le correcteur d’orthographe, elle sait couper son texte, et ainsi elle sait se relire. Lorsque le correcteur lui offre plusieurs choix pour la correction, elle est capable de se poser les bonnes questions pour trouver la réponse juste.

2- Quels en sont les limites ?

L’an prochain, l’une de mes élèves partira au collège. La MDPH va-t-elle lui accorder un PC ? (inconvénient d’ordre financier je le concède)

3- Et toi te sers-tu du numérique ?

Pour ma part, l’ordinateur me permet de grossir des caractères, aérer des textes,… pour les TDAH.

3 questions à Audrey, certifiée en collège

Audrey, tu es enseignante certifiée en collège, responsable du numérique dans ton établissement et tu as également une décharge pour travailler au service DAN au rectorat de Nantes.

Tu as eu ton concours en 2005, tu as donc toujours utilisé le numérique dans ton métier. En quoi le numérique facilite ton travail ?

  • Dans le maintien de mon expertise dans ma discipline : J’ai accès à des livres en anglais, à des radios en ligne, à des vidéos  et des documentaires en anglais que je peux consulter à tout moment et facilement. Mon bagage linguistique et les compétences culturelles sous-jacentes ou associées peuvent  alors se maintenir plus facilement que si je n’avais pas le réseau internet.
  • Dans l’enrichissement de mes pratiques pédagogiques : en consultant d’autres projets provenant de d’autres enseignants ou de d’autres disciplines proposés sur les sites institutionnels ou dans des blogs ou pages Web de collègues français ou de pays étrangers, cela me permet d’explorer de nouvelles pistes de travail, de nouvelles façons de faire, d’envisager les choses autrement c’est-à-dire de faire évoluer mes pratiques et d’enrichir mes compétences professionnelles. C’est une base inépuisable pour être créative et pour essayer de répondre aux besoins pédagogiques du moment. L’ennui peut difficilement s’installer. L’envie de créer aurait été là sans le numérique mais le numérique rend les choses possibles immédiatement et il contribue à me rendre de plus en plus créative.
  • Dans la recherche de ressources authentiques pour créer des supports pédagogiques de tous types : textes, images, extraits vidéos, extraits de journaux, émissions radios , exercices en ligne sur des sites d’éducation anglophones destinées à des élèves étudiant l’anglais comme seconde langue etc. Sans internet et les outils numériques pour exploiter ces ressources brutes, je serais contrainte d’utiliser les manuels scolaires et la didactisation des supports serait moins aboutie et rapide à réaliser
  • Dans la mutualisation de pistes de projets, de documents ou autres avec mes collègues ou pairs : Les listes de diffusion, les réseaux sociaux, les mails etc facilitent ces échanges mais ne les créent pas. Il faut avoir envie de mutualiser pour ensuite le faire et avoir recours au numérique pour le faire. Le numérique ici facilite le transfert d’informations. C’est un outil.
  • Dans la différenciation et la personnalisation de l’accompagnement des élèves : Grâce au numérique et surtout à l’espace numérique de travail de l’établissement, le suivi des élèves, autour d’un projet avec production finale par exemple, est possible par des échanges de mails. Les élèves m’envoient leur production que je corrige et leur réenvoie. Ils complètent leur production, la corrigent, la font évoluer en fonction de ce que je leur ai suggéré. Et ainsi de suite. Le numérique me permet d’être plus précise et d’écrire des remarques plus longues. Les mails échangés constituent une base de conseils sur laquelle les élèves peuvent revenir quand ils veulent. Sans le numérique ce travail serait très fastidieux et très chronophage pour moi.
  • Dans la communication avec les familles/ avec l’extérieur de l’établissement : Les parents demandent des rendez-vous par mails facilement. Sans le numérique, cela pouvait prendre un temps fou.
  • Dans la communication des projets de la classe grâce à des articles publiés dans l’espace numérique de travail de l’établissement soit dans la partie « actualités » de l’établissement quand cela s’y prête, soit dans le blog anglais de la classe. Sans le numérique, cette communication serait restreinte aux murs de l’établissement.
  • Dans la mise en place d’une pédagogie active/par projets : Le numérique et l’espace numérique de travail de l’établissement  m’ont permis de mettre à disposition des élèves et des familles le développement de chaque projet au fur et à mesure qu’il se fait dans les classes et de mettre à disposition des élèves tous les documents utilisés en cours dans le blog anglais de leur classe. Les élèves peuvent revoir, réécouter, relire, refaire, ce qui a été vu en classe et ceux qui ont été absents peuvent avoir accès aux documents directement. C’est une mémoire digitale du cours et une extension du cahier de classe, c’est comme le cahier augmenté de la classe.

Quelles en sont les limites ?

  • Les limites sont d’ordre juridique : Ces limites concernent la question des données personnelles, la question des droits d’auteurs, des droits à l’image et du droit à la voix qui contraignent terriblement les usages du numérique. Ces points peuvent me bloquer dans mes pratiques. La création d’une charte numérique de l’éducation nationale serait un vrai plus.
  • La limite du matériel : Je ne parle pas de la distribution de tablettes ou de PC portable pour tous, qui serait pour moi une grosse erreur pédagogique, financière et politique. Si déjà chaque EPLE était équipé d’un réseau suffisamment puissant pour faire tourner tous les ordinateurs des classes, les VPI/TBI et autres périphériques ça serait positif et surtout rassurant pour les enseignants qui n’auraient pas toujours cette crainte de se dire « faites que ça marche demain car pas eu le temps de préparer un plan B ». Le renouvellement et la maintenance du matériel est à considérer comme un frein également car dépendant des collectivités départementales donc de très grandes inégalités selon les départements et les académies.
  • La formation des enseignants à la culture numérique et au numérique : Quand je parle de formation, je parle d’une vraie formation professionnelle en présentiel avec des objectifs, des compétences professionnelles à valider et une validation finale et qui se déroulerait en 3 ou 4 jours pleins et non pas en une journée de 9h30 à 16h30 ou en formation distancielle (ce qui est franchement ridicule surtout quand on doit manipuler des logiciels etc). La formation professionnelle au sein de l’EN est une arlésienne. Pour moi, le PAF est constitué de journées d’INformation et pas de formation.

Imagine que tu n’aies plus d’ordinateur, plus Internet. Qu’est ce qui te manquerait le plus pour travailler ?

  • L’accès aux supports pédagogiques authentiques et variés
  • La communication, le suivi individuel des élèves
  • La communication avec mes pairs
  • Les possibles infinis de créations pédagogiques