3 questions à Franck, CPE

1. Quels sont les avantages et les limites de l’utilisation du numérique dans l’exercice du métier de CPE ?

Les avantages sont de pouvoir communiquer de façon propre et “moderne”. La maitrise des outils permet de réaliser des présentations, des documents, des médias, des vidéos… de qualité.

Les différentes applications créent un lien plus étroit avec les familles. Celles-ci sont informées en temps réel des évènements de la vie scolaire, des notes et elles sont beaucoup plus facilement joignables par un email… Bref la coéducation s’en trouve facilitée, mais bien sûr tout dépend du rapport à l’école de la famille. En effet, ces modes de communication favorisent la réaction à chaud, une implication qui peut parfois être ressentie comme une intrusion.

Le CPE améliore sa connaissance de la globalité de l’élève en particulier au niveau pédagogique. Lors d’un entretien,  il dispose en quelques secondes d’un bilan Vie scolaire, d’un accès aux bulletins trimestriels, d’une vue sur le cahier de texte… etc.

Les limites : tout d’abord les compétences face à l’outil informatique et l’utilisation des différentes applications. Ce sont des limites qui ne devraient plus exister mais… la formation est largement déficitaire. Les nouveaux outils peuvent être vecteurs de dérives :

– le téléphone portable sert de plus en plus « à tout » (téléphone, appareil photo, appareil sonore, enregistreur, calculatrice, montre…)

– les applications ou les  réseaux sociaux sont souvent utilisés de façon inappropriée et peuvent être source de phénomènes de harcèlement, d’agressivité, d’insultes. Ils induisent une distance par rapport à l’acte, une « virtualisation » de l’acte qui pose le problème de la prise de conscience, de la réaction, de l’insécurité permanente et il est difficile pour le CPE d’intervenir dans ce monde qu’il ne connait pas, qu’il ne vit pas.

Juste pour le citer, la non constance des décisions politiques (ex : les tablettes dans le Jura) ne sont pas pour faciliter l’entrée de l’école dans le numérique.

2. L’environnement numérique de travail a-t-il changé le métier de CPE ?

Je ne suis pas sûr qu’il ait changé le métier de CPE . Il en change les modes opératoires mais ce n’est pas l’environnement numérique qui modifie le cœur du métier à savoir la relation humaine. Notre métier est un métier de communication. Certes les outils changent les habitudes, rendent certains comportements paradoxalement plus visibles (le harcèlement moral par exemple), peuvent distancier la relation aux familles. Cependant, il y a un moment où la rencontre physique s’impose, car le métier de CPE a besoin de moments solennels et réels, de moments passés ensemble, en groupe.

L’utilisation de la messagerie pour communiquer permet de multiplier les échanges, de différer sa prise en charge et ainsi d’être peut-être moins soumis à l’urgence. En revanche, étant au cœur de l’établissement, le CPE se voit littéralement envahir de messages de toutes sortes et d’une utilité quelquefois bien relative. Là non plus rien ne change, le CPE a toujours dû prioriser son action.

3. La fonction de référent numérique dans ton établissement t’a-t-elle permis de développer de nouvelles compétences professionnelles ?

Oui et non. La fonction de Référent Numérique, et plus largement la gestion du numérique, est un travail à part entière. La non prise en compte de cette nécessité explique aussi la lente mise en place du numérique au sein de nos établissements. Il suffit d’observer, après le départ d’un personnel, la difficile continuité de l’utilisation complète d’un logiciel comme Pronote (et je n’ose même pas parler d’Énoé, Siècle notes et Absences beaucoup moins faciles d’accès) ou l’actualisation du site de l’établissement. Il n’est pas exceptionnel de constater, sur certains sites, des actualités datant de plusieurs années. Le Référent Numérique est censé être centré sur le pédagogique. Mais qui s’occupe de la gestion administrative des logiciels utilisés, de la communication externe, ce n’est pas le rôle de l’AMI, donc de qui ? Du chef d’établissement ou de son adjoint ? Encore faut-il qu’il en ait les compétences et l’envie.

Les collègues sont souvent volontaires pour découvrir, conscients du manque de connaissances qu’ils ont, du fossé qui les séparent de leurs élèves. Mais qui pour les former, pour effectuer la veille numérique demandée ? et quand ? Le temps passé par le Référent Numérique à se former tout seul peut déjà largement remplir le montant de l’IMP voté en CA. La bonne volonté, oui bien sûr, on s’adresse à des « passionnés »…

Oui j’ai développé de nouvelles compétences mais loin de ce que j’aurais souhaité. En même temps ce n’est pas un métier, c’est une fonction. Les tâches quotidiennes du métier de CPE me prennent largement « tout mon temps »… mais les candidats ne se bousculent pas pour reprendre la mission de Référent Numérique.
 

Franck Lecoultre

 

4 questions à Marie-Paule, conseillère pédagogique

Quels sont les avantages de l’utilisation du numérique pour l’exercice de ton métier ?

Le numérique constitue une grande part de mon quotidien professionnel. Il est devenu incontournable. Il permet une grande souplesse, de différer et s’articule autour de trois axes :

Les échanges professionnels : Ainsi, en arrivant au travail, le matin, mon premier geste est d’ouvrir ma messagerie et de consulter mes mails. En effet, quasi 100% des échanges avec les collègues enseignants dans les écoles se font par mail. De même, le mail est devenu vecteur principal d’échanges avec des partenaires extra-scolaires ou  administratifs. L’usage du téléphone est quant à lui, marginal. De plus, l’usage de Viaeduc devient par la constitution de groupes avec thématiques un puissant moyen de communication, d’échanges de données en lien avec la nature des thématiques choisies par les groupes.

Mais paradoxalement, alors que les échanges sont grandement facilités, ils sont plus « invasifs » et parfois très débordants sur la vie personnelle. En effet, le réflexe est grand de solliciter un interlocuteur avant parfois d’essayer de trouver une réponse tant l’instantanéité des exigences de réponse devient prégnante.

La formation : Les temps de formation en présentiel (que ce soit des animations pédagogiques traditionnelles ou dans les présentiels s’inscrivant dans les temps de formation hybride) se font toujours via un support numérique (Powerpoint support, présentation de sites, de ressources didactiques, d’outils numériques permettant des pratiques renouvelées…)

Concernant les formations hybrides notamment M@gistère, elles sont sans doute encore perfectibles eu égard aux attentes des enseignants qui peu à peu s’emparent de l’outil mais au-delà du strict usage du numérique dans ce cadre, c’est plutôt toute la question de la formation (et de sa personnalisation) qui se pose et mérite d’être nouvellement interrogée.


Quelles en sont les limites ?

Toutefois, trop d’échanges tuent l’échange et il est important de cibler et synthétiser les contenus, afin de ne pas noyer mutuellement nos boîtes sous un flux de messages dont les contenus peuvent parfois être regroupés en un seul message. Mais, la demande de réponses rapides voire instantanées (cf ci-dessus) passe souvent avant l’efficacité. Une circonscription est le hub où convergent toutes les demandes et le conseiller pédagogique de circonscription est un interlocuteur privilégié qui reçoit un très grand nombre de courriels chaque jour. De plus, la qualité des ressources « libres d’accès » sur Internet et de fait le tri à réaliser nécessite aussi des formations à « la vigilance ». Enfin, comme dit précédemment, les activités liées au numérique deviennent vite chronophage et nécessitent d’être attentif….

En dehors de l’utilisation du numérique avec les élèves, quelles autres utilisations en fais-tu ?

La consultation des ressources institutionnelles et actualisées de manière régulière, les mises en réseau avec d’autres personnels (réseaux) évoluant dans les mêmes sphères ou non (extension à d’autres domaines de l’Education Nationale), l’inscription à des Moocs…

 
Pourrais-tu professionnellement  te passer des outils numériques ? Qu’est ce qui te manquerait le plus pour travailler ?

Il me serait impossible de me passer des outils numériques dans mon quotidien professionnel, tant le numérique est une révolution au même titre que l’imprimerie et la découverte de l’écriture… Toutefois, son évolution constante requiert pour un usage optimisé une adaptation et une formation permanentes et sans cesse actualisées…

Marie-Paule LAPAQUETTE
Conseillère pédagogique
Limoges

Comment le numérique a changé ma vie, le témoignage de Laurence

Au niveau professionnel, j’ai toujours essayé d’utiliser les nouveaux outils numériques même si au début, il fallait avoir de la volonté car les problèmes techniques étaient bien nombreux et empêchaient souvent que notre progression aille aussi vite que nous l’espérions…

En effet, les salles média-langues des lycées sont, certes équipées, mais malgré tout, en tant que professeur d’anglais, je ne suis pas spécialiste d’informatique et souvent je prévoyais 3 groupes d’élèves :

1) en autonomie à écouter des documents authentiques ou à s’enregistrer,
2) en discussion entre eux sur un sujet,
3) avec moi à travailler sur un support vidéo.

Et bien, le groupe prévu avec moi ne me voyait pas beaucoup car les élèves travaillant sur les ordinateurs avaient toujours besoin d’être aidés voire débloqués ! Cependant, je n’ai jamais baissé les bras et j’ai fait partie du groupe pionnier à utiliser la plateforme numérique mise à disposition par le Conseil Général : mes élèves déposaient leurs documents, allaient faire un exercice, etc. Le numérique donne beaucoup de possibilité en langues vivantes car non seulement, cela nous donne accès à de nombreux documents authentiques et sites pédagogiques mais cela permet à nos élèves de travailler de manière différenciée et à leur rythme. Il est vrai que le travail en amont est important mais le bénéfice pour nos classes est réel et palpable.

Mais ce qui a réellement bouleversé ma vie, c’est que grâce au numérique, j’ai pu accepter une opportunité professionnelle qui me permette de travailler une partie du temps en télétravail. Si les moyens de communication actuels n’existaient pas, je n’aurais sans doute pas accepté le poste que j’occupe actuellement et qui me permet de m’épanouir professionnellement.

Laurence Naumot

Wilfrid, professeur en BTS, a suivi le MOOC « Classe inversée »

Wilfrid Grossin, professeur agrégé de Biochimie Génie Biologique enseigne à des étudiants de BTS Bioanalyses et Contrôles au Lycée Valin à La Rochelle, il a suivi le MOOC « Classe inversée », témoignage : 

Pourquoi as-tu choisi de suivre ce MOOC ?

J’ai déjà suivi plusieurs MOOCs sur FUN des thèmes de Biotechnologies et de numérique : culture cellulaire, bioinformatique, identité numérique etc… Ce MOOC à thème pédagogique est arrivé au bon moment car j’enseigne quelques heures à des enseignants en Master MEEF  en Master MEEF « culture numérique » à l’université de la Rochelle. Je voulais aussi tester dans le même temps la classe inversée avec mes élèves de BTS sachant que j’utilise déjà beaucoup avec eux le numérique.

Qu’est-ce-que tu en attendais ?

J’en attendais des idées via le partage des expériences réussies de classe inversée et la découverte d’autres plateformes (pour ma part j’administre et utilise Moodle depuis 6 ans)… je suis Référent à l’Usage Pédagogique du Numérique  (RUPN) dans mon lycée.

Qu’est-ce qui t’a plu ? Qu’est-ce qui a été difficile ?

J’ai apprécié les groupes et sous groupes à constituer sur Viaéduc à l’origine des échanges et les petites capsules vidéo de canope très bien faites. Je n’ai rien trouvé de particulièrement difficile car je suis déjà familiarisé avec FUN et Viaéduc.

Concrètement comment s’organisait ton travail dans le cadre du MOOC ?

J’ai consacré environ 1 à  2 heures par semaine pour le MOOC. Mon inscription à plusieurs groupes au départ était relativement chronophage… puis je me suis focalisé sur un groupe suite à une coopération efficace avec des collègues (autres disciplines que la mienne) que je n’ai d’ailleurs jamais rencontrés physiquement .

As-tu changé des choses dans ta pratique pédagogique suite à ce MOOC ?

Oui et  d’ailleurs « la semaine de la classe inversée Clise 2106 » est arrivé parfaitement au bon moment pour accueillir des collègues dans ma classe (voir vidéo ci dessous)

Conseillerais-tu à d’autres collègues de tenter cette expérience ? Pourquoi ?

Oui, il faut à mon avis expérimenter des méthodes pédagogiques alternatives, pas forcément de façon systématique, mais quand les sujets et les promotions d’élèves s’y prêtent.
Je suis pour la pluralité des méthodes pédagogiques pour s’adapter aux élèves, faire de la différenciation, etc… pour ma part, je pense que l’usage du numérique permet de travailler sur ces points et en est facilitateur.

Wilfrid Grossin

Ce que les MOOC ont apporté à Caroline, prof de langues en collège

J’ai suivi mon premier MOOC suite à la suggestion de mon inspecteur dans la lettre de rentrée. J’étais curieuse de découvrir ce nouveau type de formation. Le sujet était vraiment bien choisi pour développer de nouvelles compétences : “Enseigner et former en langues avec le numérique”.

J’ai découvert beaucoup de choses et surtout de nouvelles pistes de travail. Puis seule, je me suis inscrite à plusieurs autres formations et j’ai même obtenu une certification officielle en juillet dernier. J’ai préparé avec le MOOC et passé la certification à la fac. D’ailleurs je prépare avec le PAF la certification de 2° niveau.

J’ai aimé la possibilité de m’organiser dans le travail. Je me connecte souvent à la pause repas et le soir à la maison, ou le matin avant ou entre les cours au collège. Selon les thématiques la durée de travail effectif est assez aléatoire : jamais moins que le temps prévu, souvent le temps indiqué et rarement beaucoup plus. Mais peut-être est-ce dû aux pré requis que je maîtrise plus ou moins… Le plus difficile est de ne pas se décourager la première fois et d’oser demander de l’aide dans les forums. Il faut aussi être bien organisé pour ne pas laisser passer la date ou l’heure de retour des devoirs demandés. Il n’est pas toujours facile de travailler seul mais les interactions en ligne avec les autres apprenants sont facilités. Et aujourd’hui j’ai des “connaissances de travail en ligne” en Amérique du sud, en Afrique et en France !

Après une quinzaine de MOOC, mon expérience est très positive. Bien sûr je n’ai pas toujours réussi. J’ai abandonné 3 fois : par manque de temps disponible sur la période demandée (enfants malades, réunions en soirée, conseils de classe…) ou désintérêt pour le sujet quand le titre de la formation n’avait pas assez de rapport avec mes attendus. Cependant j’ai obtenu une certification, et j’en prépare une autre pour ce printemps. Je ne pensais pas à 40 ans revenir à la fac et réussir !

J’ai intégré un grand nombre de conseils : je suis plus efficace et responsable dans mon usage du net. Cette aisance nouvelle me manquait pour modifier certaines de mes pratiques. Je voulais intégrer plus de numérique en classe mais j’avais des craintes quant à la sécurité avec les élèves. Maintenant j’utilise des services en ligne pour le travail collaboratif avec les élèves ou entre collègues. Grâce aux veilles je continue à découvrir de nouveaux outils. Et mes élèves sont plus motivés. Ils sont souvent surpris par les outils que j’utilise et rassurés de savoir qu’ils ne sont pas les seuls à apprendre.

J’ai déjà conseillé certaines de ces formations à des collègues curieux. Certains se sont inscrits et ont obtenu l’attestation de suivi, d’autres ont juste suivi les cours en même temps que les autres ou pendant les grandes vacances sans chercher à valider l’attestation. Comme les cours restent en ligne on peut se former quand on veut.

Caroline Maylin

3 questions à Florian, CPE

1. Quels sont les avantages et les limites de l’utilisation du numérique dans l’exercice du métier de CPE ?

Avantages:
La rapidité de l’information. Les échanges mails permettent de mettre au courant plus rapidement les professeurs et collègues des situations d’élèves. (Exclusion temporaire, rencontre avec la famille, connaissance de situations particulières…)
Cela permet aussi de garder des traces de ce qui a été échangé et également d’avoir une discussion avec un groupe de personnes (les profs d’une classe par exemple) ou/et l’ensemble de la communauté éducative.
Via Pronote, on peut mieux mettre en avant les absences, les raisons, les « stratégies » d’évitement de certains élèves et les parents ont un meilleur suivi de la scolarité de leur enfant.

La plupart des parents et des élèves peuvent être prévenus à l’avance des professeurs absents.

Limites:
La froideur principalement, l’utilisation de l’informatique pour les échanges réduit les contacts humains malheureusement. Les échanges ne sont pas directs et frontaux, ce qui peut entrainer des incompréhensions parfois.
Les erreurs sont parfois mal comprises, mal acceptées (par exemple, l’oubli d’un prof absent…).
Nous n’utilisons pas l’envoi des SMS pour prévenir des absences. Nous préférons téléphoner car nous sommes dans un collège et nous préférons avoir les parents en ligne pour savoir les raisons des absences. De plus, nous travaillons dans un collège en REP+, les parents changent fréquemment de numéro de téléphone. Cela nous permet de savoir quand nous devons avoir de nouveaux numéros.

2. En quoi l’environnement numérique de travail a t-il professionnalisé le fonctionnement de la vie scolaire dans les EPLE ?

Je ne sais pas si on peut dire que l’ENT a professionnalisé le fonctionnement de la vie scolaire. Il l’a simplement amélioré en simplifiant les tâches.
Peut être que l’ENT permet de faire comprendre au corps enseignant que la fonction de la vie scolaire ne se limite pas à récupérer les élèves exclus de cours, à gérer des salles de permanences et à enregistrer les élèves absents à leur cours.
Le numérique via les logiciels et leurs fonctions permet une analyse plus fine du suivi des élèves.
La gestion des emplois du temps personnalisés des élèves via les logiciels permet, au jour le jour, de prendre en compte les modifications et de renseigner plus efficacement parents et élèves des changement éventuels.
Le travail de la vie scolaire est plus concret, plus visible.
Il en est de même pour les actions pédagogiques qu’on peut mener en tant que CPE. L’utilisation des outils du numériques induit  une approche plus ludique parfois et moins solennelle qu’une intervention de type magistral.

3. Considères-tu le numérique comme un levier de développement professionnel pour les personnels d’éducation ?

Oui. Après, il m’est difficile de répondre vraiment à cette question car je l’utilise depuis mes débuts en tant que CPE.  Le « numérique » au sens large  fait partie de mon quotidien autant professionnellement que personnellement.
Quoiqu’il en soit, le numérique prend une place importante dans les tâches à accomplir. Pour la gestion des grands domaines liés aux missions des CPE, les bilans,  l’environnement numérique est d’une grande aide et permet de mieux approfondir les tâches, faire de meilleurs comparatifs ( pour les motifs des absences par exemple, les périodes des absences…).
L’ accès des parents à une partie de cet espace numérique change aussi les relations avec les familles. Cela demande une plus grande rigueur de notre part et une méthodologie de travail différente du fait de la rapidité de la communication de l’info.
Le métier CPE évolue. Si on se réfère à la nouvelle circulaire, on peut se rendre compte que les missions sont différentes sur certains points et le numérique fait partie des évolutions de notre métier.

Les 3 grandes parties de la circulaire du 10 août 2015 (la politique éducative de l’établissement, le suivi des élèves et l’organisation de la vie scolaire) impliquent selon les domaines une utilisation plus ou moins accrue du numérique pour une meilleure réalisation des tâches.

Florian Crespy

Carole, prof de SVT au Liban a suivi le MOOC « Classe inversée »

Pourquoi ai-je choisi de suivre ce MOOC ?

Je suis une femme qui cherche les nouveautés pédagogiques, et surtout le numérique qui fascine les jeunes de nos jours -et ça on ne peut pas le nier- pour une meilleure réussite des élèves surtout ceux étiquetés « faibles ».

Toutes mes recherches sur les méthodes actives « UTILES » et « INNOVANTES » je les ai toujours faites sur internet, à titre personnel, (USA, Canada, France, etc…). Alors je me suis retrouvée comme une « Martienne » parmi mes collègues qui suivaient des formations classiques, auxquelles j’ai assisté pour un certain temps, puis après j’ai renoncé vu qu’elles ne respectaient pas toujours mon intelligence ainsi que celle d’autres collègues : mêmes sujets plusieurs fois sur plusieurs années, même cadre, informations que je maitrisais à l’avance grâce à mes recherches sur le net etc, alors je m’ennuyais et je perdais mon temps…

En cherchant toujours les nouveautés, je suis tombée sur le MOOC « Classe Inversée », très intéressant puisqu’il est formateur, en ligne, pour ceux qui veulent, donc accessible à mon rythme, innovant, motivant, non redondant ni ennuyeux, respectant mon intelligence. Je pratiquais déjà les « flipped classes » depuis 2009 avec mes élèves du collège, et en 2012-2013, avec le nouveau programme SVT Terminale S (j’ai « osé » l’appliquer avec mes élèves de terminales…) et pour consolider cette méthode, et être au courant des nouveautés, j’ai donc décidé de suivre le MOOC « Classe Inversée au 2nd degré », et je l’ai suivi jusqu’au bout !

Qu’est-ce-que j’en attendais ?

Je m’attendais à découvrir si ma façon de faire allait dans le bon sens ou non, si d’autres collègues la pratiquaient ou non et leurs avis. Surtout je m’attendais à avoir de l’aide dans ma pratique en cas de besoin, aide que j’ai trouvée avec « MONSIEUR » MOOC à tout moment !

 

Qu’est-ce qui m’a plu ? Qu’est-ce qui a été difficile ?

Ce qui m’a plu c’est cette opportunité de discuter, de communiquer, d’échanger avec des collègues jamais vus, en ligne, de chez moi, et de me sentir impliquée dans un travail collaboratif, stimulant, encourageant, me permettant de me remettre en question, à partir des expériences des autres, de me corriger là où il fallait et de guider aussi les autres, avec un esprit ouvert à toutes les remarques.
NB : La fiche projet était très bien construite, ce qui a facilité notre tâche.

Ce que j’ai trouvé difficile, parce-que j’étais inscrite à plusieurs MOOCs à la même période, c’est le temps que je devais consacrer à ce MOOC !!! Cet obstacle m’a obligé à laisser tomber les autres malheureusement !
Une autre difficulté a été les problèmes techniques surtout l’envoi et la réception des messages qui étaient la plupart du temps très décalés. Mais c’était au début… après ça s’est réglé.

Concrètement comment s’organisait mon travail dans le cadre du MOOC ?

  • Le temps passé était supérieur à ce que l’on nous a annoncé.
  • Les tâches n’étaient pas difficiles, mais longues à réaliser par rapport aux échéances.
  • Les échanges étaient vraiment fructueux, et nous continuons à échanger entre nous encore maintenant (ressources, démarches, avis, conseils etc…)

Ai-je changé des choses dans ma pratique pédagogique suite à ce MOOC ?

Oui… la construction de la séance surtout. Maintenant elle est plus structurée.

Conseillerais-je à d’autres collègues de tenter cette expérience ? Pourquoi ?

Certainement !!!!! D’après mon expérience de 22 ans dans l’enseignement en collège/lycée au Liban (même au primaire en étant coordonnatrice), et suite à mes constatations des comportements variés mais plutôt négatifs des collègues, vis-à-vis des élèves « en difficulté », je trouve que cette pratique ouvre l’opportunité de comprendre l’esprit de la différenciation pédagogique et de son intérêt au niveau de la remédiation donc de l’apprentissage et non pas de l’enseignement. Chose à laquelle la plupart des collègues, n’accordent pas assez d’importance ni dans leur enseignement, ni dans leurs évaluations, la plupart du temps par ignorance ou par manque de motivation ou de volonté. Je trouve impératif de leur expliquer la plasticité cérébrale et son importance dans le cadre de l’apprentissage !!!!

Pour l’élève en difficulté, c’est une opportunité de tester et de montrer ses capacités en se formant en suivant son propre rythme, chez lui sans être pressé par le temps en classe, sans être dépassé par la vitesse de l’explication du professeur, ni par les termes qu’il n’arrive pas à déchiffrer, ni par le stress de vouloir suivre malgré sa lenteur qui l’empêche, ni par la panique de ne pas être à la hauteur des autres, ni par la honte de s’exprimer, ni par la peur de montrer ses lacunes accumulées qui n’ont jamais été l’objet d’une remise à niveau, ni par ses parents qui le menacent peut être !

Toutes ces contraintes mènent ces élèves à baisser les bras, et à devenir ce que la majorité des collègues appellent : faibles, paresseux, bavards, hyperactifs, nonchalants, étourdis, manquant de concentration, rêveurs en classe, inattentifs, etc… Et ces adjectifs vont les suivre d’un niveau à un autre sous forme d’« étiquettes », dont peu de professeurs vont chercher à comprendre la cause, le pourquoi, le comment faire pour « l’effacer »!

Enfin, et à mon avis, je ne peux pas dire que la Classe inversée est « LA » méthode « solution magique » ; nooon, elle a ses limites !!!! Mais c’en est une parmi d’autres méthodes actives à essayer, à pratiquer, dans le but d’améliorer l’implication et la motivation des élèves, pour effacer les «étiquetages », pour une meilleure réussite scolaire et là je précise que cette réussite ne doit pas « toujours » être évaluée par une note chiffrée même sur le bulletin !

Pour moi personnellement, c’est une grande porte qui s’ouvre entre le professeur « donneur » et l’élève « receveur » d’informations (au moment où toute information est facilement accessible sur le net en un simple clic, sans être obligé  d’écouter deux heures de cours, dans une salle, devant une personne qui parle et qui répète souvent la même chose). La classe inversée fait de l’élève « un chercheur actif » et constructeur de ses connaissances, et du professeur « un guide et conseiller actif » évaluant positivement et valorisant en remédiant, ces connaissances, en dehors de tout « étiquetage », dans une ambiance plutôt ouverte au plaisir de l’apprentissage, et non pas bloquante ! La Classe inversée réduit la distance prof/élèves, en augmentant la communication entre eux, elle valorise le travail collaboratif (et non pas individuel) en classe, et surtout l’entraide, au moment de la remédiation.

Je continue à suivre toutes les activités formatives du MOOC : ça vaut mille formations classiques malgré aussi ses limites et ses contraintes.

C’est un outil de formation « intercontinental », traversant tous les pays pour arriver devant chaque apprenant en toute souplesse, lui transmettant les informations « autrement », en respectant son intelligence et en suivant l’innovation dans toutes ses ampleurs.

Pour suivre le MOOC, il faut avoir des capacités : être connaisseur des outils informatiques et numériques avant !!!! Être volontaire pour tenter le changement, casser la routine, le conformisme en matière d’éducation, sans avoir peur de l’échec : l’apprentissage est le fruit de l’échec.

Mais si nous ne possédons pas ces capacités, ne jetons pas nos pierres sur le MOOC, essayons de travailler sur NOS propres capacités, de nous construire, pour y arriver… Soyons constructifs et non pas destructifs en étant victimes de nos ignorances !!!!

Carole Chamoun El Bared
Professeure SVT/ Formatrice – Liban

 

Agnès, prof de lettres en collège, a suivi le MOOC « Classe inversée »

Pourquoi as-tu choisi de suivre ce MOOC* ?

Je suis professeure au Collège International à Noisy-le-Grand, dans un collège expérimental et numérique qui vient d’ouvrir, la classe inversée est au cœur du projet d’établissement. Or, renouveler ses pratiques n’est jamais facile et nécessite d’apprendre et d’échanger.

Déjà inscrite sur la plate-forme de « France université numérique » où j’avais participé à d’autres MOOC, je me suis naturellement inscrite au MOOC « Classe inversée ».

Qu’est-ce que tu en attendais ?

En m’y inscrivant, j’attendais de comprendre davantage le fonctionnement de cette pratique, d’avoir des ressources, de pouvoir échanger et de co-construire un projet.

Qu’est-ce qui t’a plu ? Qu’est-ce qui a été difficile ?

J’ai beaucoup aimé ce MOOC. J’ai apprécié la découverte de nouvelles pratiques et de nouvelles ressources. J’ai énormément apprécié le travail pratique réalisé avec mes collègues professeurs de Lettres. Je pense que la mutualisation est importante dans ce genre de pratique, voire nécessaire puisque nous passons beaucoup de temps à réaliser les capsules.

En revanche le temps nous a manqué pour compléter la séquence complètement.

Dans ce MOOC, la partie quizz ne m’a pas vraiment plu. Les questions trop détaillées nous incitaient à morceler l’observation.

Concrètement comment s’organisait ton travail dans le MOOC ?

Au cours des semaines deux parties sont apparues assez distinctement. L’une consistait en une phase de cours : observation des capsules vidéos, des ressources et la réalisation des quizz. L’autre, beaucoup plus longue, a été la mise en place d’un groupe par l’intermédiaire de la plateforme « Viaéduc » et du choix d’un projet. Le groupe auquel j’appartenais a choisi de travailler sur « la chevalerie en classe de 5ème ». Nous nous sommes donc coordonnés par l’intermédiaire de Viaéduc et avons presque construit une séquence entière.

Je me suis occupée de l’entrée dans la séquence sur les valeurs et les qualités des chevaliers en partant de Luke Skywalker et d’Indiana Jones.

Dans le groupe nous avons passé beaucoup de temps à réaliser nos capsules vidéos. Le travail a été long, parfois fastidieux. Mais je crois que le résultat est très intéressant. Le regard porté par nos pairs a été riche, constructif et a permis de mieux s’interroger sur nos pratiques.

Nous avons même continué à échanger pour expliquer comment nos élèves avaient perçu nos différents travaux.

As-tu changé des choses dans ta pratique pédagogique suite à ce MOOC ?

Je pratique davantage cette pédagogie maintenant. J’ai mieux compris grâce à ce MOOC que cette pédagogie ne consistait pas simplement en la réalisation de capsules vidéos que les élèves observaient chez eux puis à la réalisation d’exercices en classe. C’est aussi une autre façon de penser l’enseignement : mettre l’élève au cœur de son propre apprentissage. C’est parce qu’il crée et parce qu’il conçoit, qu’il comprend et apprend.

J’ai également compris que s’il était important de travailler en groupe avec les professeurs. Il est aussi évident que les élèves doivent travailler en équipe. Les classes en îlots répondent ainsi clairement aux objectifs matériels nécessaires de cette pédagogie.

Conseilleras-tu à d’autres collègues de tenter cette expérience ? Pourquoi ?

Je conseille aux professeurs de suivre des MOOCs régulièrement parce qu’il faut continuer à apprendre, nous aussi. Il faut savoir se remettre en cause, se bousculer, oser pour mieux créer. Je pense que l’échange par l’intermédiaire de cette plateforme permet de poser des questions, d’obtenir des réponses et de travailler ensemble. Elle ouvre ainsi  de nouveaux horizons.

Les MOOCs offrent la possibilité de travailler à son rythme. Ils demandent un investissement important si l’ont veut le réaliser complètement mais les documents réalisés ou les pratiques apprises peuvent resservir et s’avèrent utiles dans nos usages.

À terme, il est possible que nous soyons nous-mêmes des créateurs de MOOC et que nos élèves suivent nos cours ainsi de façon distanciée mais interactive.

Agnès Constant

*MOOC : Massive Open Online Course, un MOOC est un court ouvert et massif accessible gratuitement en ligne

Se former avec M@gistère, le témoignage de Béatrice

Au premier abord, bénéficier à domicile d’une formation ciblée sur un sujet qui m’intéresse est une expérience enrichissante. Pouvoir gérer mon temps et m’organiser comme je l’entends est assez « vendeur » mais me retrouver seule face à mon ordinateur peut rapidement devenir un pensum d’autant plus que naviguer dans le parcours lui-même relève souvent du tâtonnement tant il est peu ergonomique. Chaque page est composée d’un très grand nombre d’informations et du déroulé de la formation étape par étape. Des vidéos de collègues en situation, d’universitaires, de chercheurs, des questionnaires, des quizz, des diaporamas, des liens ouvrant d’autres liens, des sites à consulter… comment mettre ces informations en pratique dans ma classe de maternelle ? Je suis régulièrement obligée de revenir en arrière pour retrouver l’information initiale. Certes, on nous propose des ressources à explorer mais ai-je vraiment besoin de M@gistère pour les trouver ? Les formateurs qui ont élaboré le parcours proposent de consulter des sites comme Éduscol, nous redirigent vers des adresses académiques, des sites d’universités, d’IUFM… Par ailleurs, je trouve insupportable cette barre de progression à la fin d’un visionnage ou d’un questionnaire pour attester ou non de notre assiduité. Cela s’apparente surtout à un contrôle du travail fait, alors qu’à mon sens, l’évaluation de la formation à distance devrait surtout reposer sur son efficacité pour mon travail avec mes élèves. Et pour l’instant, je suis dubitative.

Pour l’anecdote, l’année dernière, j’ai complètement oublié de cliquer sur la barre d’avancement pendant toute la formation : je me suis donc retrouvée lors du présentiel à afficher un magnifique 0% effectué (on m’en a bien sur fait la remarque…) alors que j’avais terminé le parcours.

Le moment de présentiel (3 h) en milieu de parcours doit être un moment de mutualisation, de débats, d’échanges. C’est un moment trop court qui ne tient pas ses promesses et qui tourne au listing de sites à consulter ou de vidéos à regarder.

La dernière partie de la formation consiste à déposer des documents pour les faire partager. Certes l’idée de partage est intéressante mais encore une fois, faut-il passer par M@gistère pour mutualiser nos travaux ? À ce jour, notre forum de discussion reste vide.

En fait, je trouve que ce que l’on nous propose tient plus de l’information que de la formation. Je suis capable de trouver des sites qui répondent efficacement à des questions pratiques que je me pose. Je dois renouveler ma pratique car l’expérience ne suffit pas. J’ai alors besoin d’être « nourrie » pour relancer la machine ! M@gistère, pour moi, n’est pas dans cette optique puisqu’à chaque fois on nous demande de produire quelque chose, de réaliser des séquences. Si je me suis inscrite dans le parcours « Des situations pour compter et calculer à l’école maternelle », c’est parce que j’attends de la nouveauté, des exemples de situations concrètes à mener en classe avec de nouveaux outils.

La réussite d’un parcours de formation à distance réside peut-être dans une démarche plus libre. Peut-être aussi faudrait-il nous demander nos besoins réels ? Pour éviter de choisir un parcours par défaut (3 parcours spécifiquement « maternelle » sur 12), nous pourrions les lister en équipe enseignante, les faire remonter à l’IEN et bénéficier ainsi d’un parcours réellement ciblé sur nos attentes.

 

Béatrice, enseignante de MS/GS

3 questions à Frédéric, CPE

 

1. Quels sont les avantages et les limites de l’utilisation du numérique dans l’exercice du métier de CPE ?

Je vois plusieurs avantages à l’utilisation du numérique dans l’exercice de nos missions de CPE.
Tout d’abord, le gain de temps par l’accès rapide à des informations, et la possibilité de partager ces informations. Par exemple  les infos internes ou institutionnelles par mails, des bilans ou statistiques d’absences, le stockage d’infos particulières par thèmes sur un espace dédié du réseau (suivi d’une classe, sanctions…).
En fait, c’est un moyen de communication et de recherche d’informations très rapide.

Ensuite, la possibilité de créer des outils (diaporama) pour animer des réunions avec les élèves notamment les délégués mais aussi en conseil d’administration ou auprès de partenaires extérieurs.

L’usage du numérique est indispensable. Toutefois, il faut savoir l’utiliser en posant des limites. Ces limites, propres à chacun, sont nécessaires pour ne pas se faire happer par ce « numérique ». Car le numérique créé des besoins, des « commandes », des sollicitations de nos collègues, de nos partenaires, de la direction. Du coup, il s’avère chronophage ! Ne pas être « connecté » en permanence est absolument nécessaire pour continuer à  remplir certaines de nos missions. Un CPE ne peut passer la majorité de son temps de travail à son bureau derrière son ordinateur. À lui de réguler son temps « numérique » en faisant parfois comprendre à ses partenaires qu’il a d’autres missions ou d’autres  priorités.

2. En quoi l’environnement numérique de travail a-t-il professionnalisé le fonctionnement de la vie scolaire dans les EPLE ?

Le numérique est un outil incontournable de la Vie Scolaire. Que ce soit pour les CPE mais aussi les autres personnels. Aujourd’hui, l’usage de logiciels pour la gestion des absences est sans doute présent dans tous les EPLE. Les personnels de Vie Scolaire doivent savoir les utiliser. Ils doivent parfois savoir s’adapter à différents logiciels selon les établissements d’exercice. Ces logiciels évoluent presque chaque année et deviennent de plus en plus pointus, proposent toujours plus de possibilités au prix d’une maîtrise du logiciel à acquérir sur le tas ou avec des livrets papiers ou en ligne de plusieurs centaines de pages…

Le numérique est un outil quotidien de communication en interne mais aussi de plus en plus avec les parents d’élèves. Maîtriser l’outil numérique est une compétence indispensable pour les CPE et les personnels de Vie Scolaire. Nous devons faire remonter cet état de fait à nos inspecteurs pour qu’ils  veillent à proposer régulièrement des offres de formation adaptées aux différents niveaux de compétence.

 

3. Considères-tu le numérique comme un levier de développement professionnel pour les personnels d’éducation ?

La maîtrise du numérique est, effectivement pour moi, un levier de développement professionnel pour le CPE. Son savoir-faire lui permet d’être plus efficace, de gagner du temps et participe à la reconnaissance de ses  compétences professionnelles. Ces compétences favorisent  une « diversification » ou une évolution de carrière des personnels d’éducation :

– Préparer des interventions à l’ESPE ou auprès de partenaires locaux lors de colloques ou réunions diverses (collectivité, association).

– Devenir PFA ou formateur occasionnel

– Envisager une évolution de carrière dans d’autres corps de la fonction publique ou dans le privé.

Frédéric Zmarzly, CPE académie de Grenoble

Jean-Pierre, CPE, témoigne de la mise en place du parcours citoyen dans son collège

1) Pourriez-vous présenter les principaux enjeux du Parcours Citoyen et décrire comment le projet est né dans votre collège ?

Les enjeux du parcours citoyen sont multiples. L’objectif dominant est de faire connaitre aux élèves les valeurs de la république. Mais à mon sens c’est aussi les amener à exercer une citoyenneté participative. Le parcours citoyen est au cœur du domaine 3 du socle commun de connaissances, de compétences et de cultures dénommé : la formation de la personne et du citoyen.
C’est une réflexion collégiale des différentes équipes de l’établissement pour rendre plus lisible les nombreuses actions qui étaient menées au sein du collège. Cela s’est finalisé par la réalisation d’un livret de 6 pages qui recense mensuellement les actions qui vont se dérouler. Chaque mois possède une thématique propre. Par exemple pour mars, c’est le mois de l’information et de la prévention (semaine de la presse, théâtre forum sur le harcèlement, la violence, les addictions…).

2) Quelle est la place du CPE dans ce dispositif et quels sont ses partenaires privilégiés ?

Le CPE est présent tout au long du déroulement du parcours citoyen avec des moments forts dans l’année (octobre mois de la démocratie, juin mois du vivre ensemble) et des actions où il se positionne plutôt dans l’élaboration en amont. De nombreuses actions sont déroulent en classe avec les enseignants et des partenaires extérieurs (associations, artistes, écoles primaires du secteur, autres services de l’état). De ce fait cela recoupe notre mission de mise en œuvre de la politique éducative de l’établissement.

3) En quoi la mise en place du conseil de vie collégienne est-elle un atout supplémentaire dans la formation des délégués-élèves ?

Le CVC est une instance toute nouvelle au collège Les Villanelles, il fonctionne depuis janvier, il est composé du chef d’établissement, du CPE, d’adultes volontaires du collège, des délégués élèves et du conseiller départemental junior et son suppléant. C’est avant tout un lieu d’échanges et de travail, où les élèves peuvent proposer des améliorations à apporter à leur quotidien. Cette instance est consultative pour impliquer les élèves et privilégier des actions concrètes. Il s’agit aussi d’un lieu d’apprentissage de la démocratie puisque les élèves réunis en 4 commissions, sont confrontés à la réalité du fonctionnement du collège. Il y a été décidé de mener une action éco-solidaire avec une ONG de collecte des piles et batteries usagées pendant un trimestre.

4) Trouves-tu que la démarche du Parcours Citoyen a un impact positif sur les relations entre les élèves et les personnels de l’établissement ?

Le parcours citoyen est distribué aux élèves et affiché en vie scolaire, il est donc connu. C’est à mon sens aussi un outil de communication de ce qui se fait au collège. Il permet de repérer et connaitre facilement les temps forts de la vie de l’établissement. Son rôle aussi est d’être évolutif, c’est un parcours ; il ne doit pas être figé. Par exemple, l’action éco-solidaire décidée et menée par le CVC s’y rajoute et vient l’enrichir. Le collège Les Villanelles est inscrit dans l’expérimentation d’une démarche de soutien au comportement positif (expérimentation menée à Ottawa au Canada). La démarche du parcours citoyen vient s’inscrire dans la construction et la maintien d’un climat scolaire serein.

Jean-Pierre Vaillet

Témoignage de Martial, professeur d’EPS en collège et développeur

  • Quels sont les avantages de l’utilisation du numérique pour l’exercice de ton métier ?

L’utilisation du numérique en éducation physique et sportive s’est imposée de fait. La question de son intérêt se pose plutôt en imaginant devoir faire sans. Et pour aider à bien se plonger dans le sujet, l’idée est de permettre, avant, pendant ou après une action motrice, de mettre en relation le résultat avec les conditions dans lesquels il a été obtenu, et je pense tout particulièrement aux actions effectuées.

Pour répondre au mieux à l’idée sous tendue par cette question, je transformerai le terme « avantage » en « plus-value ». Les débats actuels, les frilosités permanentes quant aux politiques d’équipements, qu’elles soient collectives ou individuelles, se nourrissent de ces notions d’avantages, peut-être moins que de celles d’inconvénients. C’est pourquoi, pour être le plus juste possible, je vais m’attacher aux « plus-values », car elles bénéficient à ceux qui en sont l’objet, les élèves, plutôt qu’aux commanditaires.

Partant de ce principe, il existe deux aspects qui me semblent fondamentaux :

  1. le traîtement rapide de l’information
  2. le retour immédiat (feed-back)

Je laisse volontairement de côté d’autres aspects (motivation, technologie adaptée aux évolutions actuelles, ou d’autres qui ne me viennent pas à l’esprit), car s’il existe, l’effet « whouaouh !» s’estompera très vite si on n’y met rien de concret derrière. Je renvoie chacun à sa propre expérience de vie personnelle « gadgétisante »  pour cela.

Donc, à l’usage, la combinaison des deux points privilégiés conduit à des constats cruciaux dans la démarche pédagogique, en permettant d’avoir des élèves informés de manière plus (pour ne pas dire « très ») complète dans un premier temps, et devenant autonomes, car très vite manipulateurs des outils, jusqu’à opérer le transfert de certaines des compétences de l’enseignant au sein de leurs groupes de travail ou individuellement (un niveau plus élevé, et qui s’atteint très vite en fonction des activités physiques supports).

Ma stratégie repose sur ce transfert.

Le savoir de l’enseignant est une réponse aux problèmes qui se posent aux élèves en fonction de la tâche à accomplir. Les élèves sont confrontés de différentes manières à ces problèmes. Les premières années de l’exercice de mon métier, j’ai opté pour une posture dirigiste, gestionnaire, accaparé par la nécessité de finir mon cours en respectant le rythme imaginé de ma séance.

Le temps aidant, mon activité s’est modifiée me permettant des sorties partielles de ce rôle et de constater mes erreurs (que j’attribuais alors à mes élèves (!)). En fait, mon premier vrai outil numérique d’observation a été un outil construit pour évaluer les progrès de mes élèves ainsi que le niveau d’atteinte des objectifs que je me fixais à chaque cycle et pour chaque classe… et le constat fut dramatique. Si moi j’avançais, eux pas autant que moi. Et au final, il y avait un taux trop faible d’atteinte globale des objectifs.

J’ai repris tout cela. J’ai changé de stratégie. J’y ai été beaucoup aidé par mon rôle de conseiller pédagogique. J’avais à travers mes bilans, l’image de moi-même en activité, un retour pertinent sur mon analyse grâce à une relation de confiance avec mes stagiaires, et ainsi du temps pour imaginer ce qu’il y a à produire. C’est de cette manière qu’est née l’application « BingoMatch », avec comme objectif de traiter très vite les résultats de l’observation (tout en la rendant plus simple, voire en y ajoutant un côté ludique), et surtout de la rendre disponible aux élèves. C’était il y a plus de quinze ans maintenant, et ce fut pour moi un vrai révélateur du changement de posture de l’enseignant au sein de la classe.

En quelques semaines, le passage d’un outil papier à un support numérique mobile (Palm m105 à l’époque) donnait au sein d’une leçon d’EPS, plus de résultats que 2 séances consécutives avec des retours décontextualisés de l’action. Et cela avec une stratégie impliquant l’élève dans l’observation, mais également dans l’analyse des résultats, ce qui me permettait de me positionner différemment dans les lieux et le temps. Naissance d’un véritable changement de posture qui aujourd’hui place les enseignants dans une interaction très différente avec leurs élèves, valorisant le savoir des premiers et impliquant les seconds de manière plus pertinente car plus constante. C’est un confort pédagogique conséquent.

  • Quelles en sont les limites ?

Existe-t-il réellement des limites ? Si je posais cette question à quelqu’un de l’institution, à un politique, à un collègue sceptique, à un parent d’élève suspicieux, il y en aurait pour chacun dont certaines communes. En réalité, je n’en connais qu’une pour l’avoir éprouvée : la tentation de ne pouvoir s’en détacher.

Et donc, celle où cela ne sert plus à rien ou pas du tout. Le numérique est devenu un outil de travail au même titre que mon sifflet ou mon chronomètre qui, d’ailleurs, très vite, sont devenus les outils de l’élève. Quand les réponses à apporter ne peuvent se trouver dans l’utilisation de cet outil, il ne sert à rien d’insister. Plus que tout, à l’usage, je me suis aperçu des objectifs annexes que l’on pouvait y adjoindre et des étapes franchies une fois ces objectifs atteints. Je souris toujours quand je rencontre un grand connaisseur TICE, numérique ou informatique, et qu’il énonce dans sa démonstration: « on voit des choses formidables en EPS, où les élèves se filment […] ». J’ai toujours très envie de dire « lol » !

Il y a beaucoup de complexité dans une situation pédagogique. Le choix des contenus et les objectifs d’aujourd’hui en terme d’éducation et de formation, s’ils n’ont pas réellement changé, se sont vus complétés par des occurrences très nombreuses, et très diversifiées.

D’un point de vue plus philosophique, je dirais que les limites s’imposeront également quand la source des envies, et donc des idées, viendra à se tarir. Ce sont celles qu’on nous oppose très (trop) souvent. Dans un monde en évolution constante, certains sont déjà passés à autre chose. Étape supérieure de l’évolution ou abandon des problématiques existantes par la fuite ?

Un peu des deux en réalité. Sauf qu’à agir de la sorte on éparpille des actions jamais abouties, ce qui pourrait décourager les plus investis, et qui, en tous cas, n’incite pas les plus prudents à s’engager réellement dans l’ère du changement. L’idée n’étant pas de mettre les gens en difficulté, mais bien de proposer à nos élèves un ensemble de choses validées sur le terrain et pouvant se diffuser de manière assez large.

Le numérique est un sujet de controverses où l’on dépense beaucoup d’énergie dans l’hyper-sécurisation et le contrôle alors même que peu de solutions fiables sont proposées pour accompagner le travail et l’apprentissage. Il n’y a qu’à se pencher sur le dossier des ENT, ou les politiques de choix de mode de déploiement des tablettes pour comprendre le fond du problème. Dans le premier cas, je serais surpris que la «  dérive administrative » des ENT puisse valoriser le développement d’une pédagogie qui utilise efficacement le numérique. Dans le second, on en est encore à débattre de la manière de procéder alors que partout se développent des usages qui sont autant de moyens de mieux penser les équipements et leur gestion.

Or, à contraindre sans cesse, on stérilise beaucoup des idées qui se font jour. Je ne compte plus les questions qui m’ont été posées sur les possibilités de faire (médiation, actions dans la classe, incitation à produire) avec les élèves, pour lesquelles les réponses des circuits classiques sont toujours attendues, pour cause de réflexion hors-sujet ! Et pourtant ce sont toujours les mêmes sujets qui reviennent : système inadapté, sécurisation, communication et charge des réseaux,…

Un fait important aussi, est de ne pas arriver à franchir le pas du « différemment ». J’ai trop souvent pu constater que la vraie transformation de posture ne s’effectuait pas, et que le numérique s’employait comme les outils d’avant. Ces formations orientées « outils » s’avèrent vite limitantes.

Vous l’aurez compris, les limites ne se situent pas à mes yeux, du côté des élèves, ni de leurs enseignants.

 

  • Pourrais-tu professionnellement  te passer des outils numériques ? Qu’est ce qui te manquerait le plus pour travailler ?

Ce qui me manquerait ?… Le temps consacré aux élèves ! C’est une évidence.

Lorsque je regarde l’état des réflexions et des débats sur le numérique, si on s’attache de plus à la pression permanente de l’industrie numérique sur l’éducation et les prises de position diverses, que voit-on ? Qu’entend-on ?

« Dans des logiques de marchés, et des ressources (je parle d’applications), les dépenses pour le numérique éducatif, c’est trop peu lorsque l’on compare l’institution et les familles (Educrak 2015) », « il y a urgence à considérer le caractère insupportable de la précarité de la situation actuelle (assises de l’AFINEF, Hervé Borredon au sujet des décisions à prendre pour lancer la révolution numérique dans l’éducation (octobre 2014 ref : Ludomag) »,… on en parle aussi à Ludovia, StartUp4Kids, An@é, Educatice, ed21,… la liste est longue.

Alors, je préfère m’attacher aux élèves parce qu’au sein même de mon activité de développeur, sans cette source d’inspiration constante, basée sur des constats permanents, la recherche de solutions, et l’évaluation de l’impact sur l’individu, il n’y a pas d’évolution possible de la tendance numérique. Or dans les espaces cités précédemment, il y a des décisions qui sont prises entre gens convaincus, pour ne pas dire exclusifs, qui peuvent avoir raison sur le fond, mais qui, à mon avis, se plantent sur la forme, parce que pour toucher du doigt les espaces de progrès, il faut les vivre en situation réelle. C’est la chance que nous avons, avec aussi l’opportunité de pouvoir proposer aux élèves des modes de production très différents des modalités classiques (pour certaines déjà numériques, ex : les diaporamas) qui permettent d’insérer des activités très diverses au sein d’un même support (de préférence mobile et tactile), accentuant la précision et favorisant l’originalité, la créativité et la sensibilité.

Et oui, je pourrais me passer des outils numériques. J’ai d’ailleurs mis en place des structures de cycle d’apprentissages où l’outil n’intervient que dans le cas concret d’un besoin identifié. Concrètement, il m’arrive d’avoir deux classes d’un même cycle la même année. Pour un même travail, l’approche peut-être différente, appuyée par une observation des caractéristiques des élèves et des objectifs que je vais me fixer avec eux. De fait, des contenus différents, donc des moyens différents, pour des stratégies d’atteinte de niveaux identiques.

Mais globalement, j’y trouve tellement d’intérêt pratique que c’est difficile de s’en priver. Et puis, il y a un facteur important, sur lequel je reviendrai souvent : nos élèves apprécient la démarche. Celle de « savoir », de « connaître ». Et ils sont demandeurs ! Et de plus en plus souvent, ils sont les vecteurs de la transformation des collègues au sein de l’équipe, car ayant identifié des plus-values liées à ces usages, même si elles peuvent être différentes de celles que j’énonce, ils vont au devant des collègues encore hésitants pour leur demander d’adopter certains fonctionnements qu’ils trouvent intéressants.

J’ai à ce propos un bel exemple à proposer : ChronoPerf. Une application tablette se présentant comme un chronomètre (un outil classique) mais qui apporte un écosystème de bilan, gestion et transmission sans précédent. Un outil basé sur l’expérience professionnelle permettant la construction de stratégies très personnelles. Un outil qui se place très facilement entre les mains des élèves et les rend très autonomes très rapidement dans le domaine de l’action, du bilan et des responsabilités.

 

  • En dehors de l’utilisation du numérique avec les élèves, quelles autres utilisations en fais-tu (formation,préparation, relations avec l’administration,…) ?

  • Que t’apporte le numérique dans l’exercice de ton métier hors la classe ?

La quantité d’expériences acquises ne s’est pas faite toute seule. Après avoir éprouvé ma volonté de faire différemment sur le terrain, j’ai rejoint un « GEP », groupement d’expérimentation pédagogique. On en trouve, sous des noms parfois différents, dans toutes les académies.

L’expérience partagée a débouché sur 2 choses très importantes dans mon évolution professionnelle :

– la mise en place de formations pédagogiques intégrant le numérique, y compris au sein de mon activité de formateur APSA spécifique (VTT, Rugby)

– la création d’une structure de développement, et d’un écosystème EPS complet visant à concrétiser les propos de cette interview (PDAgogie.com, FacebookTwitter).

Du point de vue de la formation, la tâche est très intense. Il y a plusieurs phénomènes qui se développent.

La formation professionnelle continue en est un des rouages. Au sein de l’académie de Versailles, cela représente de 250 à 400 demandes annuelles avec un taux d’acceptation de plus de 80%. Cela fait beaucoup de monde, et surtout des gens très motivés, poussés par des politiques d’équipements qui les mettent parfois en difficulté au lieu d’améliorer le travail au quotidien. Nous en sommes à décliner les niveaux de formation afin de pouvoir avoir une offre progressive, nourrissant les attentes de chacun, en plus de donner un vrai élan.

Il y a ensuite le domaine universitaire et la formation initiale. les montages se font de manières très diverses, et j’espère pouvoir participer à une structuration efficace du C2i, C2i2e et au-delà dans les Masters.

Depuis 2 ans maintenant, je consacre du temps au réseau CANOPE. Mon point de vue est assez critique sur cet organisme, mais ma volonté d’aider les collègues y trouve d’excellents supports. J’y développe depuis peu des aspects fondamentaux de l’interdisciplinarité (le FREPS : une vision de l’interdisciplinarité), motivé dans ma tâche par l’arrivée des EPI qui, au delà des prises de position diverses dans les salles des professeurs, correspondent à la concrétisation de travaux interdisciplinaire entrepris sporadiquement sur le terrain. Cette discussion transdisciplinaire revêt un caractère des plus intéressant, et j’ai redéfini ma mission d’animateur/formateur au sein de CANOPE  en véritable service de développement (1871 : une application ressource), rendu localement ou plus largement, à des collègues ayant des envies, des idées mais très souvent démunis face à des difficultés techniques, et parfois aussi face aux élèves.

Le dernier point que j’aborderai est le plus cocasse. On pourrait penser, pour qui le vit de l’extérieur, que la simple motivation à vouloir répondre aux besoins des élèves et aux attentes de l’institution peut suffire à promouvoir les actions pédagogiques.

Venant de la base, il n’en est en réalité… rien ! Malgré les réponses données à des questions pertinentes et intéressantes posées à notre groupe de travail sur les changements au sein de l’école provoqués par l’arrivée de nouveaux outils, l’inertie systémique, les contraintes financières, de calendrier, et autres prétextes (ex.: « on n’apprend pas mieux avec le numérique ») ne permettent pas d’aboutir à des développements locaux encadrés, ou tout du moins accompagnés.

Bien que ce n’en soit pas réellement une, une des limites à la réussite de l’intégration du numérique dans l’éducation se trouve à l’usage dans la ressource. Je précise mon propos par le fait qu’on y entre pas par l’adaptation, la prospection et l’innovation, mais qu’on y avance par la concrétisation, la réflexion, l’action ciblée et cohérente. De quoi parle-t-on ? De « Faire entrer l’école dans l’ère du numérique » ! Et depuis le début, je trouve que la phrase est obsolète avant même d’avoir été énoncée, car à bien y regarder, cela faisait longtemps qu’on y était. Il reste donc à imaginer, et produire la suite.

Mon dernier point, puisque la question est de savoir quel est l’impact de tout cet exposé sur mon quotidien, est de dire que pour en arriver à ce que vous me sollicitiez, vous ainsi que d’autres, il aura fallu passer par certains sacrifices fondamentaux qui devaient aboutir à faire en sorte que nous puissions développer des applications, suivre les évolutions, apporter du matériel sur le terrain, pousser la réflexion au-delà de l’outil et opposer des idées à des lignes tracées en dépit de certaines précautions à prendre. C’est ainsi qu’une part non négligeable de mon temps (mais aussi celui de deux de mes collègues, David Perissinotto et Eric Dalewski, tous deux enseignants et proches des élèves et des équipes pédagogiques) est donné au développement de PDAgogie.com qui permet à des structures comme notre GEP, ou CANOPE de bénéficier de compétences qui ne se développent pas dans les circuits classiques.

Par l’intégration numérique, on a retrouvé certaines manières de travailler (classe inversée, mode de production des élèves, autonomie intelligente) et on en crée de nouvelles (organisation des espaces et du temps, dialogue hors la classe avec l’enseignant, ouverture des ressources). La vraie révolution se situe là, dans la relation pédagogique. Et soyez assuré que de tout cela, les plus grands bénéficiaires sont et demeurent, nos élèves !

Martial Pinkowski

 

3 questions à Mathieu, professeur d’histoire-géographie-EMC en lycée

J’ai 43 ans, j’enseigne l’histoire-géographie-EMC dans un lycée général du centre-ville de Caen.

1. Quelle est la place du numérique aujourd’hui dans ton travail ?

Le numérique est omniprésent dans mon travail : cela va de la mise en page des documents « papiers » distribués à la classe à la préparation « d’activités numériques » « en ligne » pour mes élèves, en passant par l’animation d’un blog personnel destiné (entre autres choses) à développer l’autonomie de chacun !

2. Quels sont les avantages et les inconvénients de cet outil ?

Le numérique n’est pas une solution magique pour répondre à tous les problèmes de l’enseignant ou de la classe. C’est un outil qui offre la possibilité de diversifier les pratiques, de varier et d’adapter les activités proposées aux élèves. Le préalable est pour moi d’exploiter cet outil si les objectifs le justifient, pas simplement « pour faire du
numérique » !

Deux difficultés majeures persistent toutefois aujourd’hui : d’une part la dimension matérielle de l’affaire… à chaque fois que je prévois une longue séquence en salle informatique, je suis contraint de tester la compatibilité des ordinateurs de l’établissement, d’installer éventuellement les logiciels requis (et de passer par l’administrateur
réseau) de prévoir une solution « bis » au cas où il y aurait un « plantage du serveur » ou pas de connexion internet ! Ce qui arrive relativement fréquemment. D’autre part quand on réfléchit à partir des besoins des élèves, le temps de conception de l’exercice / de l’activité peut être considérable car il est rare de trouver le logiciel (libre) parfaitement
adapté à ce que l’on cherche et le temps d’auto-formation (jamais réellement pris en compte par l’institution) se révèle au final très important. Choisir le numérique, c’est gagner en efficience sur le plan professionnel, mais c’est aussi empiéter de manière marquée sur son temps personnel.

3. Et si tu devais t’en passer ?

J’ai du mal à imaginer mon travail sans le numérique: revenir aux feutres pour transparents, à la colle et aux ciseaux, et pourquoi pas à « l’épiscope » ? attendre que le collègue « ait fini » avec les bulletins des secondes 2 pour pouvoir les remplir ? Renoncer à mes séquences d’écriture collaborative ou de travail individualisé sur archives vidéos documentaires soigneusement mises au point et en perpétuel ajustement ? Je trouverais sans doute des solutions de remplacement, mais s’il peut s’avérer difficile de s’initier et de monter en compétence dans le domaine du numérique, il me semble encore plus compliqué d’y renoncer une fois que l’on a franchi le pas !

Mathieu Deforge

3 questions à Manon, AESH

Je suis Manon AESH depuis 4 ans en CDD. J’exerce actuellement dans un collège mais avant j’ai fait 3 ans en lycée. Je suis également étudiante en Licence 2 de psychologie et intervenante à domicile auprès d’un enfant autiste le soir.


1- Vous utilisez le numérique au quotidien dans votre métier. Expliquez-nous dans quelle mesure et dans quel objectif.

En tant qu’AESH, j’aide un jeune adolescent de 12 ans qui lui-même utilise le numérique car il a des difficultés pour écrire.  Il utilise donc un ordinateur pour prendre ses notes. Lorsque j’ai pris mes fonctions en début d’année, ce jeune garçon (que j’appellerai « L ») ne prenait pas ses cours en notes sur son ordinateur. Ses parents m’ont alors proposé d’utiliser l’ordinateur de l’élève et d’ écrire pour lui. J’ai d’emblée refusé, expliquant que si j’écrivais à sa place, jamais il ne progresserait et que s’il était passif toute la journée sans écrire il risquait de s’endormir en classe (en début d’année ce fut d’ailleurs le cas). J’ai donc soumis l’idée d’utiliser mon ordinateur pour écrire ses cours en même temps que lui. « L » me voyant écrire, eut envie d’en faire autant. Nous sommes maintenant en janvier et il prend entre 50 et 85 % de ses cours alors qu’en septembre c’était 0 à 10 % et que l’année dernière il n’a jamais écrit aucun cours. J’aurais pu écrire à la main mais j’ai pensé que le mimétisme serait plus facile pour lui si j’utilisais le même outil. Cela lui permet également de pouvoir recopier le cours en regardant directement mon ordinateur et non pas le tableau, comme il a des troubles moteurs, visuels, auditifs et des troubles DYS, regarder le support placé à côté de lui est bien plus facile pour lui. Enfin je lui envoie tous les soirs les cours par mail (ainsi qu’aux 2 parents), il est plus facile pour lui d’utiliser le numérique que des feuilles de papier.

2- Quels sont les avantages de l’utilisation du numérique pour votre métier ?

C’est un gain de temps ! Si j’écrivais à la main, je passerais plus de temps à écrire. Alors que là, j’écris le cours très rapidement et je peux ensuite surveiller, aider et booster l’élève. De plus,  les professeurs me donnent certains supports (contrôles, exercices etc…  à l’avance) je peux donc retravailler la mise en page, augmenter la taille de la police, mettre en couleur certaines choses (ce qui est important pour cet élève).

3- Quelles en sont les limites ?

Avoir mon propre matériel est assez contraignant pour moi. De plus, il faut être certain que les parents prennent le temps le soir d’aider « L » à enregistrer les cours que je lui envoie, sans cela, il n’aura rien pour réviser (lorsque je peux mettre certains fichiers directement sur son ordinateur je le fais, mais étant au collège, nous avons rarement le temps de tout faire, et les parents sont dans la demande que je leur envoie les cours). Et enfin, lorsque l’outil ne fonctionne pas, l’adaptation à d’autres supports pour pallier le manque de l’ordinateur est plus difficile à gérer.
Bien sûr cela me demande un travail supplémentaire avec le numérique, des heures supplémentaires non payées, car je prends sur mon temps perso pour envoyer les cours, parfois réintégrer certains supports vus en cours, et pour adapter les supports que les profs me donnent.
Enfin, pour l’instant mon ordinateur tient la route, et la charge aussi, mais qu’en sera-t-il le jour où ça ne sera plus le cas ?!

2 questions à Nicolas, CPE

1. Quels sont les avantages et les limites de l’utilisation du numérique dans l’exercice du métier de CPE ?

Les nouvelles technologies ont ouvert de nouveaux champs d’organisation, d’actions et d’analyse dans l’exercice du métier de CPE. Cette évolution est continue depuis de nombreuses années et nul ne peut y échapper. Lorsque l’on maitrise ces nouveaux outils numériques, cela permet à la fois d’améliorer qualitativement notre travail mais cela facilite aussi la communication des fruits de ce dernier auprès des collègues, enseignants notamment. On sait toute l’importance que revêt le travail en équipe pour les CPE et la nécessité de faire adhérer le plus grand nombre aux démarches que l’on met en place. De même, établir des diagnostiques précis est devenu plus facile et rapide à l’aide des logiciels vie scolaire ou des tableaux de bords personnalisés (on peut en trouver des prêts à l’emploi sur de nombreux sites vie scolaire académiques). Cependant cela implique que la formation des utilisateurs en charge de la saisie des absences, des punitions, …, soit efficace pour garantir des données cohérentes. Le CPE doit donc se former, informer mais aussi former et contrôler avant de pouvoir utiliser ces nouveaux outils.  Le gain de temps est donc relatif mais c’est qualitativement que l’on trouve les réels avantages. La vision que nous avons de notre établissement est plus pertinente et il est plus aisé de la partager.
L’inconvénient majeur du numérique dans le métier de CPE est l’instantanéité. Dans la communication entre les personnels elle peut être bénéfique mais il faut veiller à ne pas s’y noyer. Un CPE doit pouvoir échapper à l’urgence et prendre du recul. L’hyper-connectivité (mails, téléphones portables, ENT) des individus (élèves, parents, personnels) engendre une impatience face à laquelle nous devons lutter pour continuer à réfléchir avant d’agir. Pour conclure, bien utiliser le numérique permet à un CPE d’être plus efficace mais il ne doit pas l’amener à confondre vitesse et précipitation.

2. En quoi l’environnement numérique de travail a-t-il changé le métier de CPE ?

Le métier de CPE évolue constamment. D’une part il doit répondre à des problématiques nouvelles notamment liées aux réseaux sociaux et d’autre part il doit permettre l’utilisation des nouveaux outils en rapport avec les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) qui sont mis en place dans les établissements. Les Environnements Numériques de Travail (ENT) offrent aux CPE la possibilité de travailler avec l’ensemble de la communauté scolaire. L’emploi des logiciels académiques ou privés de gestion de la vie scolaire, l’utilisation des listes de diffusion par les équipes pédagogiques ou équipes disciplinaires préétablies dans les ENT rendent le travail du CPE et l’association des collègues enseignants au suivi des élèves plus aisés. Avec les ENT, le CPE peut transmettre aux élèves ou aux autres personnels des documents d’information, de sensibilisation voire de formation. Cela peut lui permettre de préparer ou de prolonger son travail du quotidien. En effet, un CPE ne doit pas en rester à l’aspect numérique, il doit rencontrer les personnes pour éveiller les uns ou s’assurer que les autres ont su profiter de la transmission. Les ENT sont un outil supplémentaire dans la mallette du CPE, ils n’ont pas vocation à remplacer la dimension humaine de la communication qui reste la clé de voute du CPE.

Nicolas Boeuf

3 questions à Christophe, CPE

1. Quels sont les avantages et les limites de l’utilisation du numérique dans l’exercice du métier de CPE ?

Les avantages que l’on peut tirer du numérique dépendent en grande partie de nos compétences dans ce domaine.

Le numérique a permis de gagner énormément de temps et a facilité la gestion des absences et des retards par les AED avec le développement des logiciels de gestion de vie scolaire et le développement de l’ENT. Il me permet d’avoir un regard à tout moment dans la journée et d’avoir une vision d’ensemble plus aisée. Il est l’un des outils pour la gestion de l’absentéisme. En fin d’année, je peux assez rapidement établir les tableaux de bord de la vie scolaire et en faire le bilan annuel.

Il facilite et améliore ma communication avec l’ensemble de la communauté éducative ; ne pouvant pas toujours me rendre en salle des professeurs je peux assez rapidement avoir une réponse à une interrogation sur un élève et être informé par les collègues de tous les problèmes rencontrés.

L’accès via l’ENT permet aux parents d’être informés de la scolarité de leur enfant et de communiquer avec les membres de la communauté éducative. Les parents sont ainsi très vite au courant de tout ce qui concerne la vie de leur enfant au sein du collège (notes, absences, retards, cahier de textes, groupes de travail…) Cette communication est nécessaire dans la relation école/famille et prend toute sa place dans la co-éducation.

J’utilise également le numérique en salle de permanence afin de permettre aux élèves de faire leur travail à poster sur l’ENT. Face à cette demande, j’ai travaillé avec ma collègue documentaliste à la mise en place d’un espace 3C. L’émergence du numérique en permanence représente à mes yeux un avantage dans le métier car les temps de permanence peuvent être conçus autrement : il oblige les AED à sortir du confort d’une salle d’étude en configuration « autobus » pour faire travailler les élèves en îlots, favorisant ainsi le travail en autonomie.

Les limites du numérique sont les pendants de ses avantages, il peut vite devenir chronophage et ainsi perdre l’une de ses vertus première, le gain de temps. Il est nécessaire de mettre en place une politique de communication entre les différentes parties pour garder son efficacité.

L’une des autres failles réside dans une conception fantasmée d’un numérique qui pourrait répondre à tous les problèmes alors il qu’il n’est qu’un « outil » et ne doit pas interdire ou diminuer les relations humaines.

2. L’environnement numérique de travail a-t-il changé le métier de CPE ?

Utilisateur d’un ENT depuis bientôt 10 ans, je ne trouve pas qu’il ait changé fondamentalement mon métier de CPE. Au contraire, il a fait évoluer certaines tâches du quotidien ou du service de vie scolaire, pour me recentrer sur mes missions. Je le perçois plus comme un facilitateur intégré à mes pratiques quotidiennes. L’ENT regroupe une grande partie des outils numériques nécessaires à la gestion de l’établissement et il tire les principaux avantages liés à l’usage du numérique pour devenir un atout pour nos missions.

Les évolutions apportées touchent en premier lieu la communication. Il vise à rassembler l’ensemble des informations sur les élèves et de la vie de l’établissement. Il met à disposition en quelques « clics » l’essentiel pour pouvoir faire le suivi des élèves et facilite la tenue de nos entretiens avec les élèves ou leurs parents. En décloisonnant l’information, il devient le lien entre tous les membres de l’établissement, facilitant les échanges entre nous. Cet avantage lié à l’usage de l’ENT peut avoir quelque peu modifié le métier. Auparavant nous détenions la majeure partie des informations concernant la vie scolaire et nous étions les principaux acteurs de leur communication. La mise à disposition de l’ENT profite ainsi aux premiers utilisateurs du service public d’éducation, les parents qui peuvent ainsi accéder en temps réel au suivi de la scolarité de leurs enfants.

En second lieu, il facilite la gestion dans le service de vie scolaire et le traitement des absences/retards/punitions. Le travail des AED s’en est trouvé grandement transformé en faisant disparaître les contraintes liées au ramassage des billets et en rendant la gestion des absences/retards plus aisée. Le travail des AED peut ainsi être centrée sur l’accueil, l’accompagnement et la surveillance des élèves. En nous libérant de tâches administratives laborieuses, l’ENT nous rend plus disponible aux partenaires de la communauté au sein de laquelle nous évoluons : la relation aux élèves est ainsi favorisée puisque nous gagnons du temps grâce à l’outil.

3. La fonction de référent numérique dans ton établissement t’a-t-elle permis de développer de nouvelles compétences professionnelles ?

La fonction de référent numérique est une mission récente au sein des établissements scolaires et je l’exerce pour la deuxième année. Une formation est en cours cette année pour nous donner accès à des nouvelles compétences dans les différents domaines liés au numérique (Internet, logiciel pédagogique,…), à la réglementation, aux usages et pilotage de projets.

Je vais devoir mettre en place avec le chef d’établissement une politique numérique clairement définie et connue de tous, dans le cadre d’un volet spécifique du projet d’établissement. Après concertation avec les collègues, nous définirons les grands axes et les services à déployer. Je vais apprendre à faire de la « veille informationnelle » afin d’informer sur les nouveaux outils disponibles par la mise en place d’une communication dédiée. Ce pilotage par délégation me permet d’avoir un autre regard sur les usages numériques au sein d’une classe et leur impact en terme pédagogique.

Je développe mes compétences numériques en administrant l’ENT. En tant qu’administrateur je communique avec notre prestataire et le chef de projet responsable de l’ENT au Conseil Départemental pour leur faire remonter les difficultés rencontrées et les demandes d’évolution émanant des collègues. En début d’année je dois former les collègues sur l’usage de l’ENT ou sur ses évolutions. Je forme également les parents à leur demande pour leur permettre de naviguer et trouver les informations sur l’ENT.

Une compétence nouvelle sera la réglementation sur les usages du numérique au sein de l’établissement afin de veiller à garantir la responsabilité du chef d’établissement face aux multiples offres proposées par différents sites. Les élèves peuvent être informés sur les risques du mauvais usage du numérique.

Cette fonction va m’apporter des compétences qui seront transposable par la suite dans ma mission de CPE.

Mon avis tient compte de mes capacités à gérer le numérique, mais je suis conscient des contraintes pour certains collègues moins à l’aise avec l’outil informatique. Les difficultés peuvent pousser certains à croire qu’ils ont changé de métier.

Christophe Horta

3 questions à Régine, conseillère pédagogique

1. Quelle est votre utilisation du numérique dans le cadre de vos missions ?

Dans mes diverses missions (accompagnement des enseignants, des équipes, groupes de travail départementaux, participation au pilotage de la circonscription…), j’utilise beaucoup le numérique pour communiquer avec les personnes : enseignants, directeurs, collègues CPC, IEN, secrétaire…

Dans le cadre de la formation continue des enseignants, j’utilise le numérique pour concevoir des parcours spécifiques en lien avec des sujets définis, en complément d’interventions en présentiel. Ces parcours sont disponibles sur la plateforme académique FCP et réservés aux enseignants de la circonscription. Il s’agit de proposer, en plus des supports utilisés lors des présentations, des liens vers des sites qui permettent d’approfondir la réflexion avec des conférences en lignes ou des exemples de pratiques, ainsi que des documents ressources produits par l’institution, les formateurs ou les enseignants dans un esprit de mutualisation.

En lien avec la pédagogie, je conçois des documents en versions numériques (supports de travail : programmations, séquences, séances), destinés à être communiqués aux enseignants.

Toujours en lien avec la formation des enseignants, dans le cadre de mes interventions, j’utilise la vidéo pour faciliter le lien entre théorie et pratique. Afin de rester au plus proche de la réalité du contexte d’exercice, j’ai réalisé la majorité de ces vidéos en allant tourner en classe avec un caméscope numérique et en réalisant des montages qui permettent de servir au mieux le propos abordé. Le caméscope et le logiciel de montage utilisés  sont des investissements personnels.

Enfin, en ce qui concerne ma propre formation professionnelle, j’ai également recours au numérique. Régulièrement, je consulte des sites qui proposent des problématiques en lien avec la formation, et qui s’adressent aux formateurs ; il s’agit notamment des sites de l’IFE ou de l’ESEN, avec des conférences en ligne ou d’autres supports qui traitent de ces questions. Un espace destiné aux CPC est d’ailleurs alimenté dans ce sens sur la plateforme FCP.

 

2. Les avantages et les inconvénients ?

En ce qui concerne la communication, le numérique permet d’entrer plus facilement en relation avec les enseignants, via leur mail académique. Je peux ainsi transmettre aisément des informations : se mettre d’accord sur un rendez-vous, envoyer des documents, proposer de la ressource en ligne, recueillir des besoins, etc. Je suis aussi plus souvent sollicitée par ce biais pour des demandes d’information ou d’accompagnement.

De cette façon, certains des enseignants néo-titulaires n’hésitent pas à me soumettre leurs documents de travail pour avis avant de se rencontrer (suivi en classe ou réunion de travail). Cela permet un premier retour pour régulation de la conception de leur enseignement avant la mise en œuvre pratique et l’analyse accompagnée.

  • Mais cela ne peut fonctionner que si les enseignants consultent effectivement leur boîte académique, ce qui n’est pas encore systématique.

Le numérique permet de réduire les tirages papiers.

Il permet également de travailler à distance plus facilement (les ressources restant accessibles) et impose moins de contraintes de déplacements grâce à un ordinateur portable fourni à chaque CPC depuis plusieurs années déjà.

  • Cela demande que la maintenance de l’équipement soit régulière ce qui n’est pas le cas actuellement. L’utilisation du matériel personnel est très souvent nécessaire pour pouvoir être plus efficace.
  • Et du reste, l’accès internet n’est pas toujours disponible dans les écoles.

Cette facilité de travail offre également plus de souplesse dans la gestion du temps.

  • Mais de ce fait, il est plus difficile de poser des limites entre le temps professionnel et le temps personnel. Il y a un risque de voir ces tâches professionnelles liées au numérique (notamment de consultation et de réponse aux mails) déborder sur le temps personnel (en soirée, le WE, durant les congés) en plus de la charge de travail déjà réalisée dans la journée.

 

3. Les besoins en formation : pour vous ?

Mes besoins en formation sont liés à l’appropriation de nouveaux logiciels qui faciliteraient l’usage du numérique dans le cadre des formations. Je pense notamment à la maîtrise de logiciel de cartes heuristiques pour faciliter la construction de documents de synthèses de façon collective.

Une formation approfondie sur la formation numérique à distance me semble également nécessaire ; il s’agit non pas d’être formée sur le développement de plateformes ou d’outils utilisables (ce qui a déjà été fait par le passé), mais de réfléchir aux problématiques qui freinent l’accès des enseignants à ce type de formation et de trouver des réponses efficientes.

  • Pour les enseignants ?

Certains ont encore besoin d’être accompagnés pour débuter dans l’appropriation de l’outil informatique. Il s’agit de leur permettre d’accéder à ce mode communication qui s’avère incontournable aujourd’hui.

Mais pour la plupart, il s’agirait de proposer une formation à deux niveaux :

  1. Une formation pour optimiser l’utilisation du numérique dans le cadre de leur enseignement.
  2. Un accompagnement pour leur permettre une utilisation du numérique au service de leur formation professionnelle personnelle. Cette utilisation ne va pas de soi, et demande à être explicitée et accompagnée, si on veut que se développe effectivement une formation à distance gérée par les personnes elles-mêmes au service de leur développement professionnel.

Régine Ballandras, CPC Strasbourg 5

Chroniques d’un Professeur des Ecoles devenu Prof d’EPS

Enfant d’enseignants, j’ai eu la chance de ne jamais quitter l’école depuis l’âge de 3 ans ; même mon service militaire chez les Pompiers de Paris m’a permis d’enseigner.

L’Éducation Nationale m’offre ce que j’ai toujours souhaité : les conditions pour m’épanouir dans mon métier. Enseigner c’est avant tout éduquer, partager, rendre heureux les élèves dans leurs apprentissages.

Dès ma première année d’enseignement dans le primaire en 1998, Porte de Champerret à Paris, j’ai découvert le monde de l’USEP (Union Sportive Enseignement Premier degré) qui permet de proposer aux élèves, dans et hors temps scolaire, un    complément des enseignements de classe, par le biais sportif.

Fraîchement arrivé en Dordogne, je me souviens de l’appel téléphonique en 2004 de Stéphane Crochet, alors secrétaire départemental SE-Unsa, m’annonçant l’obtention du poste de directeur dans le village de Chantérac. Quelle joie ! Quelles responsabilités ! Un nouveau défi professionnel. Je découvre à ce moment tous les rouages d’une école.

Acteur local pour l’USEP, je décide quelques années plus tard de passer le CAFIPEMF (Certificat d’Aptitude aux Fonctions de Professeur des Ecoles Maître Formateur) et deviens maître formateur en EPS : en effet, j’ai la chance d’obtenir un poste de conseiller pédagogique EPS en Dordogne. Je m’investis également davantage à l’USEP pour en devenir quelques années son président départemental.

En 2010, un collègue et ami obtient son détachement dans le secondaire pour être Professeur d’EPS… une passerelle magnifique à mes yeux, moi qui valorise l’EPS au quotidien depuis le début de ma pratique professionnelle et personnelle.

Je tente alors trois années de suite des demandes de détachement qui n’aboutissent pas. Rappelons que le détachement est la position d’un fonctionnaire placé hors de son corps d’origine mais qui continue à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l’avancement et à la retraite.

Arrivé à 40 ans, je découvre qu’une autre possibilité s’offre à moi sous forme d’accès à la liste d’aptitude. En effet, en dehors de la voie des concours externes ou internes, l’accès au corps des professeurs d’EPS est possible par inscription sur liste d’aptitude, sous certaines conditions de diplômes, d’ancienneté et d’âge notamment.

Et c’est  Yann Chandivert, élu SE-Unsa en CAPN (Commission Administrative Paritaire Nationale), qui m’annonce l’énorme nouvelle à la fin de l’année 2014-2015. Je suis admis sur liste d’aptitude et serai Professeur d’EPS stagiaire à la rentrée scolaire dans mon département, la Dordogne. Actuellement en poste sur un lycée professionnel, j’ai le plaisir d’enseigner l’EPS et de participer aux différents projets fédérateurs de l’établissement.

Ce qui change pour moi :

– La découverte du monde du secondaire, les relations pédagogiques et humaines au sein d’une plus grosse équipe pédagogique.

– Le changement d’élèves à chaque cours contrairement au suivi continu dans le primaire.

– L’approche de la relation et du suivi dans les apprentissages est différente mettant en avant l’importance du partage entre collègues.

– La continuité, pour moi, dans l’apprentissage de l’EPS.

– Les liens USEP et UNSS.

– Le constat de l’importance de l’accompagnement et de la valorisation que chaque élève est en droit de   recevoir malgré les difficultés scolaires et/ou sociales rencontrées.

– …

La fin d’année verra ma validation, je l’espère, par ma hiérarchie pédagogique et administrative, me permettant de participer au mouvement intra-départemental en Aquitaine. De nouveaux horizons s’ouvrent donc à moi, pour mon grand plaisir.

Stéphane CHAGNON

Olivier, prof d’EPS en EREA témoigne…

Comment abordes-tu l’EPS dans ton EREA ?

J’aborde l’EPS par l’objectif «  savoir jouer ensemble dans une bonne ambiance » c’est-à-dire en mettant la priorité (et non pas l’exclusivité) sur les compétences psychosociales. L’apprentissage en EREA n’est pas secondaire, mais il est impossible lorsqu’il y a trop de tensions entre les élèves dans le groupe. Le savoir jouer ensemble est une étape avant « le savoir apprendre ensemble » qui est lui-même une étape avant « le savoir apprendre avec les autres » sans pour autant que ces étapes soient totalement cloisonnées.

Les programmes EPS te semble-t-il adaptés pour le public scolaire d’EREA ?

L’esprit du programme collège est adapté aux élèves de SEGPA, mais le niveau d’attente est souvent trop élevé , sauf si l’on se centre sur un nombre d’APS réduit. Les jeux traditionnels tels que la balle assise (APS qui ne figurent pas au programme) ont une grande importance pour moi dans la construction de l’ambiance de cours car ils produisent toujours beaucoup de plaisir chez les élèves à jouer ensemble.

Quelles relations as-tu avec les collègues EPS des collèges et lycées généraux ? Avec tes autres collègues à l’EREA ?

Je fréquente les collègues du collège à l’UNSS et lors des stages de formation continue. Je participe également à une commission académique portant sur les publics dits «  difficiles » où j’échange avec des collègues qui ont des élèves en difficulté.

Concernant les collègues de l’EREA , les relations sont très bonnes et nous échangeons travaillons beaucoup ensemble. La mise en place d’EPI ne sera pas un problème pour nous sachant qu’ils existent déjà officieusement.

La formation initiale et/ou continue te semble-t-elle suffisante pour enseigner l’EPS en EREA ?

Je pense que tout simplement que, quelque soit l’établissement dans lequel on travaille, la formation initiale n’est jamais suffisante. Nous avons un métier où il faut toujours aller de l’avant et pour cela se former constamment. Concernant la formation continue, les stages proposés en EPS ne sont pas toujours adaptés à nos attentes. Je serais intéressé par des stages portant sur la gestion de dynamique de classe et le développement des capacités psychosociales et méthodologiques à travers la pratique du sport sans pour autant mettre de côté le besoin de sens pour les élèves.

Qu’est-ce qui a motivé ce choix professionnel et quelles améliorations faudrait-il selon toi apporter dans ce milieu professionnel ?

Mon choix est dû pour une part au  hasard, étant TZR et ayant choisi l’EREA comme rattachement administratif. Ce choix de rattachement est dû au fait que j’ai enseigné pendant 8 ans, en LP difficile et que cela m’avait  plu.

Pour améliorer le travail en EREA, il faudrait sortir du cadre traditionnel de cours , donner du temps pour faire les choses sereinement et donner plus de temps d’échanges avec les élèves. Ce qui est important c’est de construire une relation de confiance entre les élèves et le professeur. Cette confiance passe par la réussite et les progrès significatifs identifiés et reconnus par l’élève…

Comment s’est passée ta première année en EREA, puis l’adaptation de ta mission sur les années suivantes ?

C’est ma première année  à temps plein à l’EREA et elle se passe comme je m’y attendais. Tous les projets que j’ai mis en place prennent forme. On verra ce que cela donnera en fin d’année et les répercussions sur l’année suivante. L’année prochaine, je pense m’impliquer encore un peu plus en mettant en place en grand nombre d’EPI.

Comment organises-tu le sport scolaire dans ton établissement ?

Je pense que l’AS à l’EREA est essentielle et doit être coordonnée avec les cycles EPS. Je pratique en interne et je participe aux journées sportives de l’UNSS. Pour moi l’AS donne une dynamique à l’ EPS. Les élèves de l’AS sont très souvent des élèves moteurs en cours d’EPS. Le temps de l’AS est un moment privilégié pour le dialogue avec les élèves et la construction d’une relation de confiance entre les élèves et le professeur.

3 questions à Jean-François, PE

Jean-François est professeur des écoles en secteur urbain, il a un triple niveau CE2, CM1, CM2.

 

1. Quelle est ton utilisation du numérique pour préparer ta classe et au sein de la classe ?

En salle informatique (2h/enfant/semaine ; en groupe pour que les enfants soient seuls à l’ordi la majorité du temps), activités réalisées en alternance :

– apprendre à chercher sur internet (risques, pertinence etc)

– mettre en forme un travail déjà préparé sur papier (traitement de texte + insertion docs images)

– travail sur les articles sur le site de l’école (les enfants ne font pas la mise en page, c’est encore moi pour l’instant qui manipule WordPress)

– utilisation d’exercices en lignes sur des sites comme linstit.com ou matoumatheux

– utilisation de la messagerie et du blog de l’ENT de la classe

En classe : vidéoprojecteur pour projeter des pages web (préparation au passage en salle info)

Perso : j’aurais du mal à préparer la classe sans ordinateur (prep, docs élèves, recherches…) !

ENT : j’utilise Beneylu depuis 3 ans

Chaque enfant et chaque parent a un identifiant avec son mot de passe.

Messagerie : possibilité d’envoyer un message à tous les utilisateurs mais ceux des enfants doivent être validés (je suis prévenu à chaque envoi : 1/3 des enfants l’utilisent en dehors du temps de classe, entre 0 et 15 messages par jour en général soit entre 0 et 3 minutes)

Blog : possibilité pour les enfants d’écrire un texte visible par tous les utilisateurs (j’utilise beaucoup moins depuis que l’on utilise le site de l’école)

Cahier de texte : je note les travaux à rendre, les infos importantes (seuls les parents y ont accès, 2 minutes chaque soir de classe)

Messagerie : je communique avec tous les parents par mail (mail de classe)

2. Quels sont les avantages et les inconvénients de cet outil ? (conciliation entre vie pro et vie perso)

Tous les mots ou informations collées dans le cahier de liaison sont envoyés par mail. J’envoie aux parents les liens vers les nouveaux articles sur le site et les liens des albums photos des sorties et activités de classe

Quelques messages individuels pour aller plus vite que le cahier de liaison (et parce que j’écris mal…) : demande de docs, de rendez-vous…

C’est la messagerie qui prend le plus de temps mais c’est irrégulier (j’ai déjà eu des échanges de mails d’une vingtaine de lignes pour répondre à des interrogations mais cela reste rare)

Je donne le mail à la rentrée et je dis à mes parents d’élèves que je réponds à leurs messages. Je m’y astreins. Cela prend en général quelques minutes par semaines mais ponctuellement plus. Depuis que les mails arrivent sur le smartphone, cela permet d’y répondre n’importe quand et n’importe où. Je pense que cela me fait gagner beaucoup de temps de rendez-vous à l’école. Mais cela rentre dans la sphère « privée » puisque c’est hors temps scolaire.

ENT + messagerie me prennent quelques minutes par jour mais m’en font gagner en rendez-vous et en inquiétudes (retour parents : « je vois ce qu’ils font car il ne me raconte rien« , « je sais ce qu’il a à faire« …).

C’est la mise en ligne des photos et des articles sur le site de l’école qui prend le plus de temps mais c’est plus rare.

Inconvénient, c’est un peu tout le temps, il faut savoir couper le téléphone et l’ordinateur.

3. Quels seraient les besoins de formation que tu as pu ressentir que ce soit pour toi ou pour des collègues que tu as dû aider ?

Je pense que c’est autour de la gestion du réseau de la salle informatique. C’est un peu une crainte pour quelques collègues car ils pensent ne pas savoir quoi faire si ça plante. Ils appellent au secours de temps en temps.

WordPress pour le site de l’école : on a déjà eu la venue du référent tice mais cela n’a pas suffit pour certains (la directrice s’occupe de mettre en ligne leurs articles).